IA générative : un coût minime, un impact majeur ?

L’IA générative s’impose comme un outil incontournable pour les entreprises. Avec des coûts d’accès attractifs, des promesses d’automatisation et de gains de productivité, elle séduit par sa simplicité apparente. Mais derrière l’usage unitaire à quelques centimes, la réalité économique est plus complexe. Pour en faire un levier de transformation durable, les entreprises doivent engager des investissements bien plus profonds — et souvent sous-estimés.

Pierre Begue
By Pierre Begue Published on 6 juillet 2025 9h30
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IA générative : un coût minime, un impact majeur ? - © Economie Matin
2000 MILLIARDS $D'ici 2030, le marché de l'intelligence artificielle devrait représenter près de 2000 milliards de dollars

Un coût d’appel séduisant

Aujourd’hui, une large partie des solutions IA proposées aux entreprises s’intègrent dans des modèles de consommation à l’usage. Dans l’écosystème Microsoft, les outils comme Copilot ou Azure AI Foundry permettent d’automatiser les tâches, d’améliorer les processus ou encore d’enrichir l’expérience utilisateur avec un coût unitaire faible. Une requête générative ou une réponse automatisée ne coûte en effet que quelques centimes.

Ce modèle donne l’impression d’une technologie accessible, facilement rentabilisable et rapidement déployable. Pourtant, cette vision masque l’essentiel : l’IA n’est efficace qu’à condition d’être bien cadrée, bien intégrée, et surtout bien gouvernée.

Les coûts invisibles d’un projet IA

Mettre en place une solution IA réellement utile pour les métiers suppose d’aller bien au-delà de la simple consommation d’API. Dès la phase de cadrage, plusieurs prérequis sont en effet nécessaires : identifier les cas d’usage pertinents, comprendre les attentes fonctionnelles, auditer les données disponibles, mais aussi vérifier les contraintes de l’organisation en matière de sécurité et de conformité.

S’ajoutent ensuite les coûts d’infrastructure pour exécuter les modèles, ceux liés à la transformation ou au nettoyage des données, à la mise en place de règles d’accès, à l’orchestration technique entre les systèmes existants. L’architecture cloud devient un sujet à part entière, tout comme la gestion des modèles, leur supervision et leur mise à jour.

Enfin, il ne faut pas oublier l’essentiel : la montée en compétence des utilisateurs. Former les équipes, créer une culture d’usage responsable, redéfinir les rôles et les interactions avec les outils… Autant de conditions indispensables pour que l’IA s’intègre réellement dans le quotidien des entreprises et de leurs équipes.

Des ordres de grandeur très variables

Les données internes et les retours d’expérience montrent à quel point les écarts de coût peuvent être importants selon la taille de l’entreprise, le niveau de complexité du projet, et la maturité organisationnelle.

Pour une petite entreprise, un déploiement IA simple (sur un processus RH ou service client) peut aller de 10 000 à 50 000 euros, contre 5 000 à 20 000 euros pour une solution classique. Mais à ce niveau, chaque euro investi demande un cadrage fin pour garantir le retour sur investissement.

Dans une entreprise de taille moyenne, les projets s’échelonnent souvent entre 50 000 et 200 000 euros. Et dans les grands groupes, certaines initiatives transverses peuvent atteindre jusqu’à 10 millions d’euros, notamment lorsqu’elles touchent à des enjeux de planification, de prévision ou d’intégration dans des systèmes critiques.

Dans tous les cas, le coût d’un projet IA ne dépend pas uniquement de la technologie choisie, mais du niveau d’ambition de l’entreprise, de la qualité de ses données, et de sa capacité à accompagner le changement.

Un retour sur investissement progressif

Car si les promesses de ROI sont réelles, elles doivent être nuancées. Dans les cas d’usage simples et bien ciblés, les premiers bénéfices peuvent apparaître sous 6 à 12 mois. Sur des projets plus structurants, le ROI s’étale sur deux ans voire davantage.

Ce qui compte, ce n’est pas tant la rapidité du retour que sa solidité dans le temps. L’IA permet des gains durables si elle est pensée pour s’adapter, évoluer et se réentraîner. Ce qui suppose une logique de pilotage sur le long terme, avec une supervision continue et une évaluation des performances dans la durée.

La donnée, pivot stratégique et levier de productivité

Or, rien ne fonctionne sans une donnée maîtrisée. Et c’est souvent là que le bât blesse. Données dispersées, mal structurées, non gouvernées, parfois sensibles sans être protégées : ces fragilités freinent les projets et en augmentent les coûts indirects.

Aujourd’hui, de nombreuses entreprises découvrent que leur principal actif — la donnée — est aussi leur principal obstacle. Il ne suffit pas d’ajouter une couche d’intelligence, il faut d’abord garantir la qualité, la traçabilité et la sécurité de ce qui alimente les modèles. Ce n’est pas l’IA qui coûte cher, ce sont toutes les conditions qu’il faut réunir pour qu’elle fonctionne. L’alignement technique, la robustesse des données, la gouvernance, la sécurité, la montée en compétence, l’évolution des pratiques métier : voilà les vrais chantiers derrière la facture visible.

Dans ce contexte, les entreprises qui réussissent ne sont pas celles qui choisissent l’outil le plus rapide ou le plus “intelligent”. Ce sont bien celles qui font de l’IA un projet structurant, et pas un gadget isolé, au service d’une transformation durable.

Pierre Begue

Technical Architect chez Insight

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