Croissance française : alerte sur tous les fronts

La Banque de France a de nouveau abaissé ses prévisions de croissance pour 2025, en raison de la guerre commerciale menée par les États-Unis. Le gouverneur François Villeroy de Galhau appelle à un effort budgétaire équitable, et prévient que, sans discipline collective, la dette publique continuera de déraper. La reprise s’annonce incertaine, sur fond de tensions internationales et de fragilité structurelle.

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By Rédacteur Published on 6 juillet 2025 8h00
Croissance : les mauvaises nouvelles de la Banque de France pour 2025
Croissance : les mauvaises nouvelles de la Banque de France pour 2025 - © Economie Matin
4,6%Le gouvernement vise un déficit ramené à 4,6 % du PIB en 2026

Une croissance rabotée par la guerre commerciale

Le verdict est tombé : pour la deuxième fois en trois mois, la Banque de France revoit à la baisse ses prévisions de croissance. En 2025, le produit intérieur brut ne devrait progresser que de 0,6 %, contre 0,7 % attendu en mars, et 0,9 % auparavant.

Cette révision traduit les conséquences directes des tensions commerciales provoquées par les décrets douaniers du président américain Donald Trump, qui ont imposé des droits de 10 % sur les biens européens, et de 25 % sur l’acier et l’automobile. « Le chaos semé par l’administration Trump pénalise d’abord la croissance américaine, mais il pèse sur la croissance mondiale », a souligné le gouverneur de la Banque de France François Villeroy de Galhau.

Le commerce extérieur, premier moteur de l’économie française en 2024, devient en 2025 un facteur de ralentissement, affaibli par un euro fort et des exportations hors zone euro en net recul.

Un déficit public sous pression

Cette croissance atone complique considérablement les efforts de redressement des finances publiques. Le gouvernement vise un déficit ramené à 4,6 % du PIB en 2026, puis sous la barre des 3 % en 2029, tout en devant combler un trou de 40 milliards d’euros d’ici là. Pour cela, le gouverneur de la Banque de France plaide pour un effort « partagé et juste, fourni par tous, à commencer par les plus favorisés ».

Même dans ce scénario, la dette publique atteindrait 120 % du PIB en 2027, et la charge des intérêts dépasserait les 100 milliards d’euros en 2030. L’idée d’une « année blanche » pour 2026, sorte de gel budgétaire en volume, est évoquée comme levier possible pour freiner cette dérive. Le gouverneur invite à plus de rigueur, à une plus grande maîtrise des dépenses, faute de quoi la France resterait « un cancre en zone euro », selon les mots de François Villeroy de Galhau.

Des perspectives contrastées à moyen terme

Malgré un climat pesant, la Banque de France reste optimiste à moyen terme. Après un second trimestre 2025 atone (+0,1 %), l’activité devrait se redresser lentement, portée par la demande intérieure, les variations de stocks, et surtout la consommation des ménages, soutenue par un regain de pouvoir d’achat.

Les salaires progresseraient plus vite que les prix, tandis que l’investissement des ménages (notamment dans l’immobilier) repartirait, favorisé par une baisse des taux. L’inflation, elle, reculerait nettement : après 2,3 % en 2024, elle serait contenue à 1,0 % en 2025, avant de remonter graduellement à 1,8 % en 2027. « La victoire contre l’inflation semble donc durable », se satisfait François Villeroy de Galhau, qui juge « très peu probable » un retour de la flambée des prix provoqué par les tensions commerciales actuelles.

Une incertitude qui pèse sur la stabilité économique

Reste que l’économie française avance dans une brume épaisse. La Banque de France chiffre à 0,4 point de PIB la perte cumulée liée à la guerre commerciale sur la période 2025-2027, dont 0,3 point uniquement en raison de l’incertitude qu’elle génère. « Cette imprévisibilité amplifie le défi français et européen qu’est la croissance molle, depuis trop longtemps », insiste le gouverneur.

Si l’emploi résiste — le chômage resterait autour de 7,6 % — la fragilité de la reprise pose la question d’un modèle économique plus résilient. Dans un contexte d’instabilité géopolitique et de poids de la dette croissant, l’économie française devra conjuguer rigueur, innovation et solidarité pour retrouver une trajectoire de croissance solide.

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