Reprendre confiance en l’IA industrielle

Améliorer la productivité et l’innovation, mais aussi transformer des modèles d’entreprise et l’expérience client, tel est le potentiel qui réside dans l’intelligence artificielle. En 2023, Goldman Sachs était pour le moins optimiste au sujet de cette technologie, prévoyant qu’elle augmenterait le PIB mondial annuel de 7 % sur 10 ans, soit près de 7 milliards d’euros. Pourtant, il y a peu, ses économistes ont émis des réserves quant au retour sur investissement de l’IA, admettant un certain surplus de confiance.

Stephane Merour
By Stéphane Merour Published on 8 juillet 2025 4h30
Generation Image Intelligence Artificielle
Reprendre confiance en l’IA industrielle - © Economie Matin
7%Selon les estimations l'IA va augmenter le PIB mondial de 1% à 7% en dix ans.

Sur le terrain, la situation est complexe : nombreux sont les projets d’IA qui ont du mal à dépasser le stade de pilote et les promesses portées par la technologie ont souvent du mal à se concrétiser. Résultat, la confiance dans ses capacités serait quelque peu en berne. Ainsi, l’économiste du MIT Daron Acemoglu n’était pas aussi élogieux que Goldman Sachs en 2023 : d’après son article publié dans le NBER, l’IA n’augmenterait le PIB mondial que de 1 % sur la même période.

Comment peut-on donc expliquer une telle revue à la baisse ? La réponse n’est sans doute pas dans l’intelligence artificielle en elle-même, mais plutôt dans la façon dont les entreprises s’y sont préparées, et dans les stratégies qu’elles ont mises en œuvre à son égard.

IA industrielle : entre enthousiasme et prudence

Récemment, une étude de Censuswide1 a relevé qu’une majorité (84 %) des cadres supérieurs étaient confiants vis-à-vis des capacités de l’intelligence artificielles à amener de réels avantages pour leur entreprise. Toutefois, pour 82 % des décideurs, l’absence de stratégie définie, de mise en œuvre adéquate ou de communication efficace constituerait un frein pour les projets d’IA, condamnés à stagner à l’étape de pilote. L’emballement autour de la technologie en prend ainsi pour son grade.

Ce n’est donc par un hasard si l’analyste Gartner a avancé que près d’un tiers des projets de genAI (intelligence artificielle générative) seraient abandonnés d’ici la fin de l’année. Pour résumer, l’engouement autour de l’IA est bien là, encore faut-il adopter les bonnes méthodes pour en tirer des bénéfices… ce qui n’est pas sans difficultés.

La qualité de l’IA tributaire de celle des données

L’échec de la mise en œuvre de l’IA s’explique généralement par une mauvaise préparation de la data qu’elle exploite. En effet, cet outil doit se nourrir de très grands volumes de données pour être performant, un paramètre que de nombreuses entreprises ont tendance à ne pas prendre en compte. Selon l’étude, seule une minorité dispose des équipements adéquats pour gérer, traiter et analyser la data avec efficacité. Par conséquent, les projets d’IA ne peuvent évoluer dans le bon sens.

Par ailleurs, l’IA industrielle dépend énormément de la qualité des données internes, critère souvent négligé par les entreprises. Ces dernières passent donc à côté de la grande richesse qui réside dans les informations issues de leurs propres systèmes, pourtant nécessaire à une adoption optimale de l’IA. C’est pour cette raison qu’il est indispensable de repositionner l’intégration et l’analyse des données internes au sommet de la pile pour gagner en efficacité. Pour ce faire, il faut élaborer la bonne stratégie et faire appel aux bons outils, et ainsi extraire les informations exploitables.

Comprendre la technologie pour mieux la déployer

Derrière la sous-exploitation du potentiel de l’IA se cachent de grandes lacunes techniques. Sans compréhension approfondie de cette technologie, ni des problèmes spécifiques qu’une entreprise compte résoudre via l’IA, le déploiement de cette dernière sera dispersé et ses résultats seront indéniablement en deçà des attentes. Car il faut garder à l’esprit que l’intelligence artificielle est un outil complexe. Elle aura donc tendance à être surestimée si elle n’est pas correctement maîtrisée.

De fait, un déploiement réussi de cet outil passe par des investissements sérieux dans le recrutement et la formation d’un personnel qualifié qui sera en mesure de renforcer la cohérence entre les aspects techniques et les aspects commerciaux. Ainsi, data scientists et spécialistes de l’IA pourront faire le pont entre les stratégies mises en œuvre autour de la technologie et les objectifs plus globaux de l’entreprise.

Les raisons derrière la déception

Nous l’avons vu, l’écart entre les grandes espérances autour de l’IA peuvent être contrebalancées par une mise en application infructueuse. Un tel décalage entre les attentes et la réalité peuvent s’expliquer par trois mauvais réflexes.

En premier lieu, les entreprises ont tendance à surestimer les capacités de l’intelligence artificielle. Certes, cet outil a un pouvoir transformatif sensationnel, mais elle ne peut pas tout changer d’un coup de baguette magique. Il faut y consacrer du temps et de l’énergie, mais aussi bien saisir ses limites.

En découle une deuxième habitude à proscrire : le déploiement à l’aveugle de cette technologie. Sans objectifs bien définis, un projet d’IA sera inévitablement bancal et l’absence de ligne directrice débouchera sur des résultats peu significatifs.

Enfin, sous-estimer la gestion du changement rend difficile la mise en pratique de l’intelligence artificielle. Ainsi, pour déployer cette dernière, il est impératif d’opérer d’importants changements au niveau des workflows, des processus et de la culture organisationnelle.

Quel futur pour l’IA industrielle ?

Ne baissons donc pas les bras. Certes, la confiance en l’intelligence artificielle peut être mise à mal, mais il ne faut pas oublier tous les bénéfices que l’on peut en tirer. On peut déverrouiller tout son potentiel principalement en gommant les mauvaises habitudes autour de son déploiement. Par une stratégie, une infrastructure, une expertise et une gestion du changement adéquates, les entreprises seront en mesure d’aller au-delà du stade de projet d’IA, et ainsi se démarquer.

Bien évidemment, réussir à apprivoiser totalement l’intelligence artificielle n’est pas chose aisée. Mais avec les bons réflexes, une entreprise a tout à gagner en posant une réelle réflexion autour de cet outil. Elle se positionnera alors en cheffe de file et tirera d’indéniables avantages compétitifs par une mise en œuvre raisonnée de l’IA.

1) Industrial AI: the new frontier for productivity, innovation and competition, étude menée auprès de 1 700 cadres supérieurs

Stephane Merour

Team Leader PreSales d’IFS.

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