Télécoms : Bouygues et Niel en lice pour le rachat de SFR

Un opérateur en quête d’air, deux magnats aux dents longues, une dette qui explose, et une bataille qui s’annonce électrique. Le futur de SFR ne se jouera pas dans les bureaux de la tour Altice, mais bien dans les coulisses feutrées de Rothschild et Perella Weinberg. Et derrière les sourires en façade, c’est une guerre de positions qui s’engage. Martin Bouygues contre Xavier Niel. Deux visions. Deux ambitions. Et une cible : SFR.

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By Grégoire Hernandez Published on 13 mai 2025 9h28
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Télécoms : Bouygues et Niel en lice pour le rachat de SFR - © Economie Matin
60 MILLIARDS €Altice, maison-mère de SFR, affiche 60 milliards d’euros de dette.

Patrick Drahi n’a jamais aimé perdre du temps. Et cette fois, c’est tout son empire télécoms qui pourrait lui rapporter gros. Très gros.

SFR : un opérateur au bord du gouffre

Avant de parler de rachat, il faut regarder les chiffres. Et ils donnent le vertige. Altice, maison-mère de SFR, affiche 60 milliards d’euros de dette. Dont 24 milliards rien que pour la branche française. Et SFR, elle-même, traîne une ardoise de 15,5 milliards. Impossible, dans ces conditions, de continuer à faire semblant. Il faut vendre. Et vite.
Patrick Drahi, toujours majoritaire avec 55 % d’Altice France, s’est donc résolu à lâcher SFR. Officiellement, pour restructurer. Officieusement, pour sauver ce qui peut encore l’être. La vente pourrait lui rapporter jusqu’à 5 milliards d’euros. À condition que la surenchère prenne. Bonne nouvelle pour lui : elle est déjà lancée.

Ils se connaissent par cœur. Ils se sont souvent évités, parfois croisés, mais jamais frontalement affrontés. Cette fois, plus de détour. Martin Bouygues veut grossir. Face à Orange, il manque encore la taille critique. Absorber SFR, c’est atteindre ce seuil. Et devenir l’alternative crédible à l’hégémonie orange.
Xavier Niel, lui, voit plus large. Iliad est déjà bien implanté en Europe. En rachetant SFR, il renforce sa base française tout en gagnant du poids à Bruxelles. L’opération serait autant industrielle que politique. Car selon le scénario du vainqueur, ce ne sont pas les mêmes autorités qui devront trancher : l’Autorité de la concurrence en France pour Bouygues, la Commission européenne pour Iliad. Deux terrains, deux stratégies, un seul objectif : gagner.

Une opportunité en or pour Patrick Drahi

Dans le chaos, il y a parfois des fenêtres de tir. Drahi l’a bien compris. Sa mise en retrait progressive du secteur des télécoms devient une aubaine. Deux acteurs solides qui s’affrontent, des enchères qui montent, et un opérateur à vendre. Parfait.
Comme le note La Lettre de l’Expansion, les négociations sont déjà lancées, même si rien n’a encore fuité officiellement. Mais tout le monde s’active. Rothschild et Darrois & Savoie pour Bouygues. Perella Weinberg pourrait conseiller Iliad. Orange, en embuscade, suit le dossier via Evercore. Et derrière, des groupes étrangers (Etisalat, STC – et quelques fonds d’investissement) restent à l’affût.

Ce n’est pas juste un rachat. C’est une recomposition. Une redistribution totale des forces. Si SFR tombe dans l’escarcelle d’un de ces deux groupes, c’est tout l’équilibre du marché qui bascule. L’opérateur est affaibli, c’est vrai : revenus et abonnés en baisse sur 2024. Mais sa valeur stratégique reste forte. Un actif de poids dans un paysage ultra-concurrentiel.
Il reste des obstacles. Beaucoup. Réglementaires d’abord, financiers ensuite. Et une question brûle les lèvres : une vente à la découpe est-elle envisageable ? Rien n’est exclu. Mais le face-à-face Bouygues–Niel rend cette hypothèse moins probable. Quand deux poids lourds montent au front, c’est rarement pour se contenter de miettes.

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Étudiant en école de journalisme. Journaliste chez Économie Matin depuis septembre 2023.

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