Énergie : la facture de l’État français explose à plus de 2 milliards

L’énergie, pourtant au cœur des politiques climatiques, reste mal maîtrisée au sommet de l’administration.

Paolo Garoscio
By Paolo Garoscio Published on 23 juillet 2025 13h50
L’une des principales annonces concerne le retour de l’envoi automatique du chèque énergie pour les bénéficiaires identifiés. En 2024, de nombreux ménages avaient dû faire une demande manuelle, entraînant une perte de droits pour près de 75 % des foyers concernés.
L’une des principales annonces concerne le retour de l’envoi automatique du chèque énergie pour les bénéficiaires identifiés. En 2024, de nombreux ménages avaient dû faire une demande manuelle, entraînant une perte de droits pour près de 75 % des foyers concernés. - © Economie Matin
92%la France dispose déjà d’un mix énergétique décarboné à 92%

Le 22 juillet 2025, la Cour des comptes a publié un rapport alarmant sur la consommation d’énergie de l’État français. Ce document dévoile une réalité méconnue : malgré des objectifs environnementaux ambitieux, les dépenses énergétiques publiques explosent, tandis que les données manquent de fiabilité.

L’État français face à une consommation d’énergie hors de contrôle

La Cour des comptes ne mâche pas ses mots : la consommation énergétique de l’État reste largement incontrôlée. Si les chiffres bruts montrent une baisse apparente, le manque de rigueur méthodologique invalide tout optimisme prématuré. D’après le rapport publié le 22 juillet 2025, les dépenses énergétiques de l’État se sont élevées à 2,23 milliards d’euros en 2023, contre 1,36 milliard d’euros en 2018. Cette augmentation vertigineuse de près de 900 millions d’euros en cinq ans met en lumière une dépendance énergétique persistante. En 2024, la facture a légèrement reflué à 1,69 milliard d’euros, mais ce recul reste fragile et mal expliqué.

Or, la trajectoire globale semble contradictoire : les volumes d’énergie consommés auraient diminué, mais « les données disponibles ne permettent pas de certifier cette baisse » selon la Cour des comptes, dans son rapport "La consommation d’énergie de l’État : des objectifs ambitieux, un suivi à fiabiliser", publié le 22 juillet 2025 sur le site officiel de l’institution.

Un coût budgétaire abyssal et mal suivi

Les chiffres dévoilés soulèvent une autre problématique majeure : le coût réel de cette consommation reste largement méconnu. D’après Challenges, « l’État ne sait pas exactement ce qu’il consomme ». Les dépenses ne sont pas consolidées, les ministères appliquent chacun leurs propres méthodes, et la nature des contrats d’énergie varie d’un bâtiment public à l’autre.

Résultat : aucune vision globale ne permet d’identifier les postes les plus énergivores ni les leviers d’optimisation budgétaire. C’est un aveu d’impuissance administrative : le suivi est morcelé, l’État lui-même navigue à vue. Pourtant, ces dépenses pèsent lourd dans le budget public et dans la stratégie de réduction des émissions de gaz à effet de serre.

Consommation énergétique publique : des objectifs climatiques ambitieux, mais peu pilotés

L’État français s’est engagé à réduire ses émissions de 22 % d’ici 2027 par rapport à 2022, et 80 % d’ici 2050. Ces objectifs, inscrits dans la stratégie nationale bas carbone, sont indissociables d’un effort massif de maîtrise de la consommation énergétique. Pourtant, le dernier rapport de la Cour des comptes démontre que le pilotage est insuffisant : « L’absence de données consolidées empêche tout pilotage stratégique ». Pire, aucun indicateur fiable ne permet de mesurer l’impact des politiques engagées. La majorité des données repose sur des estimations ou des extrapolations, sans traçabilité rigoureuse. La consommation d’énergie de plusieurs ministères, y compris ceux en charge de la transition écologique, n’est pas mesurée de façon homogène. Ce déficit de gouvernance mine la crédibilité des engagements climatiques. Comment espérer réduire la consommation si l’on ignore ce qui est réellement utilisé ?

Face à ce constat, la Cour des comptes appelle à une réforme structurelle. Parmi les recommandations : mettre en place une collecte unifiée, automatisée et obligatoire des données énergétiques pour tous les services de l’État ; renforcer la transparence des achats d’énergie ; instaurer un indicateur de performance environnementale pour chaque entité publique. Ces propositions visent une double rationalisation : écologique et budgétaire. Car derrière les kilowattheures mal comptabilisés se cachent aussi des millions d’euros mal dépensés.

Paolo Garoscio

Rédacteur en chef adjoint. Après son Master de Philosophie, il s'est tourné vers la communication et le journalisme. Il rejoint l'équipe d'EconomieMatin en 2013.   Suivez-le sur Twitter : @PaoloGaroscio

1 comment on «Énergie : la facture de l’État français explose à plus de 2 milliards»

  • O

    Et voilà, les politiques feraient mieux de regarder au niveau de l’Etat ce qui cloche, un vrai scandale (comme disait Marchais) !

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