Une étude dirigée par Michael Mann, climatologue à l’université de Pennsylvanie, a été publiée, le 14 juillet 2025, dans la prestigieuse revue Proceedings of the National Academy of Sciences. Son constat est sans appel, les nor’easters, ces tempêtes hivernales qui frappent la côte Est américaine avec des vents violents, des chutes de neige massives et des inondations paralysantes, sont devenues plus violentes sous l’effet du changement climatique.
Pourquoi les prochaines tempêtes pourraient être bien plus violentes

Selon l’étude, la vitesse maximale des vents lors des nor’easters les plus puissants a augmenté d’environ 6 % depuis 1940. Ce chiffre, en apparence modeste, se traduit par une hausse de 20 % de leur potentiel destructeur. « C’est considérable », insiste Mann, interrogé par CNN. En parallèle, la quantité de pluie et de neige générée par ces tempêtes a crû de 10 %.
Nor’easters : les monstres climatiques du climat moderne
Pour comprendre la montée en puissance de ces phénomènes, il faut remonter à leurs racines physiques. Les nor’easters naissent de la confrontation entre l’air froid venu de l’Arctique et l’air chaud et humide de l’Atlantique. Or, dans un monde qui se réchauffe, les océans s’évaporent davantage, injectant toujours plus d’humidité dans l’atmosphère. Cela veut dire des tempêtes plus chargées, plus longues, plus intenses.
Mann rappelle l’épisode personnel qui a initié sa recherche. Bloqué trois jours dans un hôtel à Philadelphie lors de Snowmageddon en 2010, il a commencé à se demander si ces événements allaient devenir plus violents. Quinze ans plus tard, ses données confirment ses soupçons. L’analyse, fondée sur 900 tempêtes recensées entre 1940 et 2025, dresse un atlas numérique du risque climatique croissant sur le littoral américain.
Villes côtières en première ligne face à la tempête
Ce renforcement des nor’easters ne frappe pas au hasard. Les villes densément peuplées comme Boston, New York ou Philadelphie sont particulièrement vulnérables. Le projet en cours de la NOAA (National Oceanic and Atmospheric Administration), lancé en 2021, le confirme, la montée du niveau de la mer combinée à des tempêtes plus puissantes expose gravement les infrastructures et écosystèmes côtiers de la Nouvelle-Angleterre.
Utilisant des modèles numériques sophistiqués (Adcirc+Swan, Funwave, Xbeach, SLAMM), le programme projette les conséquences futures sur cinq parcs nationaux et deux refuges naturels. La finalité est claire, préparer plutôt que réparer, en dotant les collectivités locales d’outils de simulation pour anticiper les pires scénarios.
Un avertissement ignoré ?
Le coût humain et matériel des tempêtes passées est un sinistre rappel. En mars 1993, la « Storm of the Century » tua plus de 200 personnes, avec des vents dépassant les 160 kilomètres/heure et jusqu’à 150 centimètres de neige tombés localement. En 2010, Snowmageddon priva des centaines de milliers de foyers d’électricité. Et en 1962, la tempête du Mercredi des Cendres causa des dégâts équivalents à ceux d’un ouragan majeur, en euros constants : plusieurs dizaines de milliards.
Pourtant, selon Mann, ces tempêtes ont été négligées dans les évaluations du risque climatique. « Cela contribue à une vulnérabilité côtière sous-estimée », déclare-t-il à CNN. Même son de cloche du côté de Jennifer Francis, climatologue au Woodwell Climate Research Center : « Les communautés côtières du nord-est doivent se réveiller. Mieux vaut prévenir que reconstruire. »