Droits de diffusion : TF1 attaque Canal+

L’affrontement entre deux géants de la télévision française s’intensifie. Une offre d’abonnement à bas prix, des chaînes diffusées sans accord et une plainte salée conduisent à un nouveau duel explosif entre Canal+ et TF1.

Paolo Garoscio
By Paolo Garoscio Published on 23 juillet 2025 7h57
Warsaw,,poland, ,may,2021:,polish,headquarters,of,platforma,canal+
Warsaw, Poland - May 2021: Polish headquarters of Platforma Canal+ (Groupe Canal+, French television company), with a company logo on the facade - © Economie Matin
6,5 MILLIONS €TF1 demande 6,5 millions d'euros à Canal+

Le 19 juillet 2025, un nouveau front judiciaire s’est ouvert dans l’univers de la télévision française. La chaîne privée TF1 a déposé une plainte contre Canal+, accusant ce dernier de diffuser ses contenus sans autorisation via son offre TV+.

Canal+ mise sur TV+ à 2 euros pour séduire les abonnés

Lancée en mai 2024, l’offre TV+ de Canal+ propose un accès à près de 80 chaînes, dont les principales chaînes de la TNT, des chaînes thématiques comme MTV, Infosport+, Planète+ ou Nickelodeon, des chaînes “digitales” ainsi qu’une sélection de programmes issus du catalogue Canal+, disponibles via une application dédiée. Le tout pour deux euros par mois, une somme symbolique qui permet d'attirer les foyers en quête d’une solution simple et économique pour regarder la télévision linéaire et en replay.

Mais cette stratégie agressive a ravivé de vieilles tensions avec les chaînes diffusées sans accord explicite, en premier lieu TF1. La Une, intégrée à cette offre, est accessible aussi bien en direct qu’en différé, ce qui, selon TF1, constitue une exploitation commerciale illicite de ses contenus.

TF1 dégaine une plainte à 6,5 millions d’euros contre Canal+

Dans une plainte déposée le 19 juillet 2025 devant le tribunal judiciaire de Paris, TF1 réclame 6,5 millions d’euros à Canal+, en l’accusant d’atteinte aux droits voisins, usage frauduleux de marque et parasitisme économique. Selon Alloforfait, la chaîne reproche également à Canal+ de rendre son flux accessible au Royaume-Uni, au mépris du règlement européen sur la portabilité des contenus, qui limite ce droit aux seuls pays de l’Union européenne .

TF1 dénonce une appropriation de ses investissements sans contrepartie, évoquant une atteinte directe à son modèle économique. La chaîne considère cette offre à bas coût comme un levier de "contrefaçon et de parasitisme", d’autant plus qu’elle court-circuite les négociations directes avec les opérateurs .

Quelle position pour Canal+ face aux accusations de TF1 ?

La riposte de Canal+ ne s’est pas fait attendre. Le groupe audiovisuel affirme agir dans le respect du cadre juridique, en s’appuyant sur le fait que TF1 est une chaîne en clair donc, selon lui, librement accessible au public. À ce titre, sa diffusion au sein de TV+ ne nécessiterait pas d’accord spécifique.

Une lecture juridique que TF1 conteste vigoureusement, arguant que la gratuité de diffusion n’équivaut pas à une liberté de rediffusion par un acteur tiers dans un bouquet payant. Le point de friction réside dans la définition des droits voisins appliqués à la distribution numérique de flux gratuits, un domaine encore flou en matière de jurisprudence.

De plus, Les Échos révèlent que Canal+ refuse de retirer TF1 de son offre TV+ malgré les menaces judiciaires, mettant en avant sa légitimité à distribuer les chaînes gratuites comme France Télévisions ou M6, avec qui des accords auraient été conclus.

Un conflit aux ramifications plus larges pour la télévision

Ce bras de fer ne concerne pas uniquement TF1 et Canal+ : il soulève des questions majeures sur la redistribution des chaînes gratuites, l'équilibre entre acteurs historiques et plateformes hybrides, et les modèles économiques de la télévision linéaire à l’heure du streaming.

D’autres affrontements similaires ont déjà atterri devant les juges : Molotov avait déjà été condamné en 2022 pour diffusion illégale des chaînes TF1, ce qui avait ouvert la voie à une série de procédures analogues.

Paolo Garoscio

Rédacteur en chef adjoint. Après son Master de Philosophie, il s'est tourné vers la communication et le journalisme. Il rejoint l'équipe d'EconomieMatin en 2013.   Suivez-le sur Twitter : @PaoloGaroscio

No comment on «Droits de diffusion : TF1 attaque Canal+»

Leave a comment

* Required fields