Un projet de loi à 15 milliards d’euros, des patrons du CAC 40 version US mobilisés, et une idée qui semble sortie d’un épisode de Black Mirror. À la Maison-Blanche, un plan économique fait parler de lui. Il vise les plus petits. Littéralement.
Insolite : Trump veut offrir 1 000 dollars à chaque bébé américain

Un bébé né en 2025, 2026, 2027 ou 2028 ? Il pourrait toucher 1 000 dollars de la Maison-Blanche… à ses 18 ans. Grâce à Trump. Grâce à Dell. Grâce à l’économie de marché. Sérieusement.
Trump : des bébés... et des milliards
Le 20 janvier 2025, Donald Trump est officiellement redevenu président des États-Unis, après son premier passage à la Maison-Blanche de 2017 à 2021. Moins de six mois plus tard, il lance une initiative économique aussi lunaire qu’assumée : chaque bébé américain né pendant son mandat recevra 1 000 dollars à sa naissance. Un geste, dit-il, pour “mettre les jeunes Américains sur la bonne voie financière”. Concrètement, un capital versé sur un “compte Trump”, bloqué jusqu’à la majorité. Une idée qui coûterait environ 15 milliards d’euros à l’État fédéral, si l’on compte les 3,6 millions de naissances par an sur le sol américain.
Mais ce n’est pas l’État qui paiera tout. Pour faire vivre ces “Trump Accounts”, Trump mise sur l’élite du capitalisme américain. Une brochette de dirigeants influents, Michael Dell (Dell Technologies), David Solomon (Goldman Sachs), Dara Khosrowshahi (Uber), s’est réunie à la Maison-Blanche le 9 juin 2025 pour valider un plan d’investissements massifs. Objectif : injecter plusieurs milliards dans ces comptes au nom de leurs employés, via des contributions supplémentaires. Michael Dell a même promis de doubler la mise pour les enfants de ses collaborateurs : “dollar pour dollar”. Une forme de parrainage boursier, version corporate.
Des comptes pour graines d’actionnaires
Ces comptes spéciaux suivent l’évolution du marché boursier, façon fonds indiciels. Ils seraient accessibles uniquement à partir de 18 ans, et peuvent recevoir jusqu’à 5 000 dollars par an de la part des familles. Trump n’a rien inventé : dans le Colorado ou le Connecticut, des systèmes similaires existent déjà. Mais aucun n’a été aussi massif, aussi symbolique… et aussi clivant. Le président promet une “politique transformatrice”, quand Elon Musk y voit une “abomination répugnante”.
Derrière l’annonce se cache surtout un vaste projet de loi budgétaire, la “Big Beautiful Bill”. Le texte inclut une baisse d’impôts historique, des coupes dans les aides sociales, et la création de ces comptes. Il a été validé par la Chambre, mais reste bloqué au Sénat. Plusieurs élus républicains dénoncent un risque d’explosion de la dette (2 400 milliards de dollars sur dix ans selon le Congressional Budget Office). Le plan retire aussi la couverture santé de 10,9 millions d’Américains. En clair : pour faire place à un bébé-investisseur, on sacrifie une partie du filet social. Et ça, certains conservateurs n’achètent pas.