Trop de promesses, trop peu de résultats ? Quand un magnat de la tech se frotte aux rouages de l’État, l’arithmétique de la rigueur budgétaire vire au burlesque et à l’échec cuisant. Le départ partiel d’Elon Musk confirme que l’homme d’affaires n’est pas un politicien.
Elon Musk quitte la politique sur un échec et retourne dans ses bureaux

Le 25 mai 2025, Elon Musk a annoncé qu’il allait se retirer progressivement de ses engagements politiques pour se concentrer sur ses entreprises. Cette décision intervient au terme de mois d’instabilité, entre dérives technocratiques et fiascos numériques, au sein du très controversé DOGE (Department of Government Efficiency). Le fondateur de Tesla et SpaceX laisse derrière lui un chantier étatique ébranlé par les ambitions mal contenues d’un entrepreneur aux méthodes abruptes.
Elon Musk et l’État : un tandem dysfonctionnel dès le départ
La promesse était aussi simple que tonitruante : économiser 2 000 milliards de dollars en sabrant dans les dépenses publiques. Elon Musk, propulsé à la tête du DOGE par Donald Trump au lendemain de sa réélection, jurait de tailler à la tronçonneuse dans la bureaucratie fédérale. Il l’a fait, en partie.
Très vite, l’objectif a été revu à la baisse. Lors d’un entretien en janvier 2025, Musk affirmait : « Je pense que si nous visons 2 000 milliards, nous avons de bonnes chances d'en obtenir 1 000. » Finalement, seulement 160 milliards de dollars d’économies ont été revendiqués. Une goutte d’eau par rapport aux près de 7.000 milliards de dollars du Budget des Etats-Unis.
Sauf que cette somme, déjà dix fois inférieure à l’objectif initial, est largement contestée. Le Partnership for Public Service, une organisation indépendante, estime que les coûts induits par les licenciements massifs, les procès en cascade, les réembauches forcées et les pertes de productivité s’élèveraient à 135 milliards de dollars. Résultat net : un gain budgétaire quasi nul.
DOGE : un programme d'efficacité devenu machine à perdre
Le projet DOGE s’est peu à peu transformé en usine à gaz. Présenté comme un bras armé anti-gaspillage, il est devenu synonyme de chaos organisationnel. Selon NPR, les initiatives lancées ont surtout servi à démonter des structures entières : agences sanitaires, programmes d’aide alimentaire, subventions à la recherche, instance de contrôle de la sécurité des voitures (dont les voitures autonomes)
À cela s’ajoute une gestion opaque. Le site officiel du DOGE revendique 160 milliards d’économies, mais seuls 63 milliards peuvent être vérifiés par des documents. Certaines des réductions annoncées concernent des contrats... qui n’avaient jamais été signés. Même Donald Trump, pourtant architecte du programme, semble s’être laissé berner. Lors d’un discours à la Maison-Blanche, il affirmait : « DOGE a sauvé au moins 150 milliards ». Ce à quoi Musk répondait en plaisantant : « 160 milliards, mais qui compte vraiment ? »
La débâcle X : symptômes d’une gestion déconnectée
Parallèlement à ses aventures institutionnelles, Elon Musk a vu son réseau social X s’enfoncer dans la tourmente. Le 24 mai 2025, une panne majeure a paralysé la plateforme pendant plusieurs heures. Ce nouvel incident s’ajoute à une longue liste de dysfonctionnements observés depuis son rachat.
Selon Le Parisien, les utilisateurs signalent des interruptions récurrentes, des bugs d’interface et des modérations incohérentes. La plateforme, censée être le fer de lance de la liberté d’expression selon Musk, est aujourd’hui perçue comme instable, dégradée et peu fiable. Le 25 mai, dans une publication désormais virale, Musk lâchait : « Je vais me recentrer sur mes entreprises. X est devenu un frein, pas un levier. » Et ce même si selon certains analystes le réseau social racheté à 44 milliards de dollars aurait récupéré un peu de sa valeur, après que celle-ci a été réduite de trois quarts.
Elon Musk : une retraite déguisée ou une réorientation stratégique ?
Le ton employé par Elon Musk ces dernières semaines laisse peu de place au doute : la lune de miel politique est terminée. Le Point relate : « J’en ai fait assez. Ce n’est pas mon rôle. »
Sa contribution à la campagne de Trump – évaluée à 290 millions de dollars – n’aura pas suffi à faire oublier les dérives du DOGE. Dans un moment d’auto-dérision assumé, il déclarait à Trump : « Ils aiment brûler mes voitures », en référence aux actes de vandalisme contre Tesla. Un aveu amer des retombées concrètes de son engagement public.
Aujourd’hui, il limite son temps consacré à DOGE à un ou deux jours par semaine, préférant désormais se concentrer sur Tesla, SpaceX et Neuralink. Une annonce à peine voilée de retrait, selon CNBC.
La fin d’une illusion managériale : l’échec du DOGE
Derrière les effets de manche, Elon Musk laisse un champ de ruines : des économies fictives, une administration déboussolée, un réseau social moribond et une crédibilité politique en lambeaux. Le DOGE, vanté comme le parangon de l’efficience numérique, n’aura été qu’une illusion d’optimisation.
Le verdict est sans appel pour Max Stier, directeur du Partnership for Public Service, cité par The New York Times : « Non seulement Musk surestime massivement les économies réalisées, mais il crée un gaspillage encore plus important. Il a infligé ces coûts au peuple américain, qui les paiera pendant des années. »