Budget de l’USAID coupé par Trump : un gaspillage sans nom de nourriture et médicaments

Contraceptifs inutilisés, biscuits périmés, médicaments abandonnés : l’administration Trump accumule les destructions de stocks humanitaires. Derrière les coupes budgétaires qui ont ciblé, entre autres, l’USAID, un immense gâchis logistique et humain se dévoile. Pourquoi ces ressources n’ont-elles jamais atteint les populations ciblées ?

Paolo Garoscio
By Paolo Garoscio Published on 21 juillet 2025 5h57
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Budget de l’USAID coupé par Trump : un gaspillage sans nom de nourriture et médicaments - © Economie Matin
10 MILLIONS $Près de 10 millions de dollars de contraceptifs seront détruits.

Fin de l’aide aux populations en difficulté : Trump gèle l’USAID dès février 2025

Le 10 février 2025, le président Donald Trump signe l’Executive Order 14169, marquant un tournant radical dans la politique étrangère des États-Unis. Ce décret instaure un gel immédiat de 90 jours sur toutes les aides internationales financées par les États-Unis – à quelques exceptions près. Seuls les programmes de soutien militaire et une minorité d’interventions humanitaires d’urgence échappent à la suspension.

Dans la foulée, l’Agence des États-Unis pour le développement international (USAID), pilier de l’aide mondiale depuis plus de six décennies, est démantelée. La structure est fusionnée au Département d’État. Résultat : 83 % des programmes sont arrêtés, 94 % des effectifs mis à pied, des milliards de dollars de contrats gelés.

L’administration Trump justifie cette réforme comme une réponse à une prétendue “inefficacité chronique” de l’USAID. Mais très vite, les conséquences humanitaires apparaissent : les aides alimentaires restent bloquées, les traitements antirétroviraux n’arrivent plus à destination, les campagnes de vaccination sont suspendues. Et ce n’est que le début.

Des centaines de tonnes de nourriture détruites dans l’indifférence générale

Le 16 juillet 2025, Reuters révèle que plus de 1 100 tonnes de biscuits énergétiques stockés à Dubaï et destinés à des programmes d’urgence arrivent à expiration. En cause : la suspension des acheminements logistiques par USAID, désormais inopérante.

Malgré les alertes précoces des ONG, 622 tonnes seulement sont sauvées in extremis et redirigées vers la Syrie, le Bangladesh et le Myanmar. Le reste – soit 496 tonnes, estimées à 793 000 dollars (environ 730 000 euros) – est purement détruit. À ce coût s’ajoute une facture logistique de 100 000 dollars pour l’élimination réglementaire des denrées. En tout, plus de 830 000 euros de pertes.

À Djibouti, Houston et les Philippines, d’autres stocks similaires attendent leur sort. Selon AP News, près de 500 tonnes ont déjà été incinérées. Les rations auraient pu nourrir jusqu’à 27 000 enfants pendant un mois.

Contraceptifs, médicaments : un gâchis sanitaire aux proportions colossales

Le 18 juillet 2025, The Guardian dévoile que près de 9,7 millions de dollars (8,9 millions d’euros) de contraceptifs longue durée (implants, stérilets) stockés en Afrique ne seront jamais distribués. La Maison-Blanche a refusé de prolonger leur acheminement. Motif invoqué : changement de stratégie. Ces produits, pourtant financés sur fonds publics, seront détruits. Une décision qui suscite l’incompréhension des organisations de santé sexuelle, alors que plusieurs États africains faisaient état de ruptures critiques dans leurs centres de planification familiale.

Le New York Times révèle en parallèle que des cargaisons de traitements contre le VIH, la tuberculose et le paludisme, commandés avant février, sont bloqués dans des entrepôts ou sur des navires à quai depuis des mois. Les volumes sont considérables : plusieurs centaines de millions de dollars de fournitures pharmaceutiques. Des pays comme la Zambie, l’Ouganda et Haïti signalent des interruptions de traitements vitaux.

Une étude publiée par The Lancet en juin 2025 tire la sonnette d’alarme : l’arrêt du financement du programme PEPFAR (President’s Emergency Plan for AIDS Relief) pourrait provoquer jusqu’à 2,9 millions de décès supplémentaires liés au VIH, et 10,8 millions d’infections nouvelles d’ici trois ans.

Scandale politique : les critiques se multiplient à Washington

Face à l’ampleur des révélations, les réactions politiques ne tardent pas. Le sénateur démocrate Tim Kaine déclare dans une conférence de presse le 18 juillet relayée par Die Welt : « Nous venons de jeter à la poubelle des rations qui auraient pu sauver 27 000 enfants. Il ne s’agit pas d’un excès de précaution mais d’un crime politique humanitaire. »

De son côté, le Département d’État tente de justifier ces destructions : « Les denrées et produits concernés étaient proches ou au-delà de leur date limite. Leur distribution aurait exposé les bénéficiaires à des risques sanitaires. », relaye The Guardian.

Mais les ONG dénoncent une stratégie de désengagement brutal, sans plan de transition, sans coordination, ni logique de reprise. Pour Action Against Hunger, il s’agit d’une « conséquence directe, prévisible et évitable de décisions politiques prises dans l’urgence ».

Même certains anciens alliés républicains expriment leur malaise. Un conseiller anonyme du Congrès confie à CNN : « Cette décision de geler l’USAID s’apparente à une exécution sommaire. Elle crée un vide humanitaire sans précédent dans plusieurs régions du monde. »

Un gaspillage gigantesque décidé par l’administration Trump

Ce gaspillage international, désormais bien documenté, s’ajoute à une série de décisions unilatérales de l’administration Trump en matière de politique étrangère. Si le président justifie ces coupes par la volonté de réduire les “dépenses inutiles”, les conséquences concrètes pour les populations vulnérables sont accablantes.

Entre destruction de 500 tonnes de nourriture, 9,7 millions de dollars de contraceptifs incinérés, traitements antituberculeux bloqués, le coût humain dépasse largement les économies fiscales revendiquées. À cela s’ajoutent des dizaines de milliers de vies exposées, des structures humanitaires désorganisées, et une image des États-Unis considérablement détériorée dans les zones où leur aide était historiquement vitale.

Paolo Garoscio

Rédacteur en chef adjoint. Après son Master de Philosophie, il s'est tourné vers la communication et le journalisme. Il rejoint l'équipe d'EconomieMatin en 2013.   Suivez-le sur Twitter : @PaoloGaroscio

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