La start-up grenobloise Stellaria a officialisé, le 17 juillet, une levée de fonds de vingt-trois millions d’euros, avec un objectif clairement affiché. Mettre au point d’ici 2035 le tout premier réacteur nucléaire à sels fondus et neutrons rapides au monde. Soutenue par des fonds américains et européens, l’entreprise née au sein du Commissariat à l’énergie atomique (CEA) entre dans une phase critique de son développement technologique.
Une start-up française veut révolutionner le nucléaire avec un réacteur inédit
Une levée de fonds stratégique pour un réacteur nucléaire de rupture
La somme levée ne provient pas de n’importe qui. Le fonds américain At One Ventures et le groupe européen Supernova Invest rejoignent les investisseurs historiques de Stellaria : CEA Investissement, Schneider Electric, Technip Energies et Exergon. À ce soutien privé s’ajoute une subvention publique de dix millions d’euros, allouée dans le cadre du programme France 2030, au titre des projets dits de « réacteurs innovants ».
Cette injection financière permettra de doubler les effectifs de l’entreprise, actuellement en pleine montée en puissance, afin de mener les études techniques et réglementaires nécessaires à la conception de son réacteur. Un premier démonstrateur industriel est attendu d’ici 2029, avant un déploiement à l’échelle opérationnelle six ans plus tard.
Le Stellarium : une technologie duale pour un réacteur nucléaire nouvelle génération
Le projet de Stellaria repose sur une combinaison technologique rare. Un réacteur à sels fondus (RSF), utilisant un combustible liquide, couplé à un réacteur à neutrons rapides (RNR), qui ne ralentit pas les neutrons produits lors de la fission nucléaire. Résultat, moins de déchets hautement radioactifs, plus de sécurité passive, et la possibilité d’utiliser des matières non valorisées par les réacteurs classiques à eau pressurisée (REP).
Surnommé le Stellarium, ce réacteur vise une autonomie de vingt ans sans recharge, et pourrait alimenter jusqu’à 400 000 habitants avec une seule paire d’unités. L’architecture est pensée pour être enterrée, équipée de quatre barrières de confinement, avec un système de refroidissement autonome en cas de surchauffe. Objectif annoncé : « faire du Stellarium le réacteur le plus sûr du marché, en toutes circonstances ».
Un pas vers la surgénération et l’indépendance énergétique
Le pari de Stellaria, c’est aussi celui de la surgénération. Produire autant, voire plus, de combustible que le réacteur n’en consomme. En valorisant notamment le thorium, très abondant dans la nature, et les déchets nucléaires existants, l’entreprise ouvre la voie à une autonomie stratégique inédite pour la France. Selon les estimations citées dans Lyon Capitale, les ressources pourraient couvrir les besoins de l’Hexagone « pour les cinq mille prochaines années ».
Un objectif qui séduit les investisseurs. Laurie Menoud, associée chez At One Ventures, déclare dans le même article : « Nous avons investi parce que Stellaria s’attaque aux principaux verrous techniques et économiques qui freinent le nucléaire : le coût, la complexité et les déchets ». Elle insiste sur le faible coût d’investissement (CAPEX) et le coût nivelé de l’énergie (LCOE) de la technologie, ainsi que sur sa montée en puissance rapide.