Trois heures d’interview. Des promesses, des refus, et des lignes rouges. Sur TF1, Emmanuel Macron a défendu son bilan économique et dévoilé ses priorités. Entre retraites, guerre commerciale, fiscalité et emploi industriel, voici tout ce qu’il faut savoir de cet interminable entretien en direct.
Macron refuse le référendum sur les retraites et écarte une hausse d’impôts

Pas de retour en arrière sur les retraites. Pas de hausse des impôts sur les héritages. Pas de nationalisation des usines en crise. Mais la promesse d’un combat « jusqu’au bout » pour défendre le cognac français. Macron s’est montré inflexible sur certains sujets, et prudent sur d’autres.
Retraites : « On ne l’a pas faite de gaieté de cœur », mais il n’y aura pas de référendum, annonce Macron
Emmanuel Macron l’a répété sans détour : l'impopulaire réforme des retraites votée en 2023 reste en place. Interpellé par la secrétaire générale de la CGT Sophie Binet, le président a exclu tout retour au statu quo : « Si on abroge la réforme, chaque année, ce sont des dizaines de milliards d’euros qu’il faut trouver. Cet argent, on ne l’a pas ».
Aujourd’hui, les actifs paient pour les retraités dans un système qui compte 1,7 cotisant pour un retraité, contre trois dans les années 1970. Selon le président, cette réforme permettra d’économiser 17 milliards d’euros par an, dont un tiers serait « réinvesti dans des mesures sociales ». Et pour ceux qui espéraient un référendum, la réponse est tombée : « Non. »
Un conclave entre syndicats et patronat est en cours pour proposer des ajustements. Macron reste ouvert à des aménagements sur la durée de cotisation, mais ferme sur l’âge légal. Il appelle aussi à une « conférence sociale » sur le financement de notre protection sociale, jugé trop dépendant du travail : une possible ouverture à la « TVA sociale », défendue par le Medef.
Dette publique : 3 300 milliards, et aucun plan clair pour boucher le trou
Sur les finances de l’État, Emmanuel Macron a sorti les graphiques. Et pour cause : la France affiche aujourd’hui un déficit estimé à 3 300 milliards d’euros, « le pire de la zone euro », a rappelé Agnès Verdier-Molinié au fondateur d'En Marche sur TF1. Le président assume une trajectoire fragile, invoquant les crises successives, notamment le Covid : « On a augmenté le déficit d’1,8 point, mais mes prédécesseurs l’ont fait sans crise », a-t-il défendu.
Pour l’après-crise, pas de coupe brutale annoncée. Mais un cap : « Le cœur de la bataille, c’est de garder une réforme des retraites efficace et de freiner les autres dépenses sociales », a-t-il affirmé. Il appelle à produire plus, travailler plus, sans toucher aux impôts. En clair : pas de hausse fiscale, mais pas non plus de plan détaillé pour réduire les 40 milliards d’économies nécessaires dès 2026.
Fiscalité : pas touche aux héritages
Alors que les inégalités sont de plus en plus importantes, la question de l’impôt sur les successions revient régulièrement sur la table. Mais là encore, Macron a coupé court. Interrogé par Cécile Duflot, directrice d’Oxfam, sur un possible alourdissement de la taxation des héritages, il s’y est opposé : « Je ne crois pas que la solution soit dans la taxation. La clé, c’est d’aider nos compatriotes à constituer un patrimoine dans leur vie ».
Ce choix, qui bénéficie clairement aux patrimoines déjà constitués, s’inscrit dans une ligne fiscale que le président assume depuis son élection en 2017 : pas de hausse d’impôts, priorité à l’activité. Mais il soulève aussi une question : qui finance les milliards d’économies à venir pour résorber un déficit public qui flirte désormais avec les 3 300 milliards d’euros ?
Industrie : pas de nationalisation, même pour sauver l’acier
L’autre échange robuste de la soirée a concerné ArcelorMittal. L’industriel prévoit plus de 600 suppressions de postes. Mais Macron a tranché : « Je ne vais pas nationaliser, ce serait dépenser des milliards d’euros ». Selon lui, une nationalisation serait un mauvais usage des finances publiques, d’autant plus si l’entreprise « n’arrive pas à s’installer sur un marché ».
En revanche, il promet de « sauver » les sites de Dunkerque et Fos-sur-Mer via une « politique européenne », et des « clauses de sauvegarde » pour protéger l’acier européen face à la concurrence asiatique. Une promesse qui sonne bien, mais dont les modalités concrètes restent floues.
Commerce international : comment sauver le cognac français ?
C’est un produit français emblématique, et il est dans le viseur de Washington. Le président américain Donald Trump a menacé de surtaxer plusieurs importations européennes, dont le cognac. Emmanuel Macron s’est montré combatif : « Je sais combien il y a de la souffrance, de l’anxiété » chez les producteurs, a-t-il reconnu, avant d’ajouter : « On est là et on se battra jusqu’au bout ».
Il affirme qu’une action est en cours à Bruxelles, et dit être « raisonnablement optimiste » sur les discussions en cours avec la Chine et les États-Unis. Mais les producteurs de spiritueux, déjà fragilisés par l’inflation et la baisse de la consommation intérieure, scruteront les prochaines semaines de négociations avec nervosité et inquiétude.