L’UE menace Shein d’une amende pour pratiques trompeuses

L’Union européenne vient de lancer une procédure formelle contre l’un des leaders mondiaux du prêt-à-porter à bas coût : Shein. Un signal fort adressé à l’ensemble des plateformes étrangères opérant sur le marché européen.

Jade Blachier
By Jade Blachier Published on 27 mai 2025 9h14
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lue-menace-shein-amende-pratiques-trompeuses - © Economie Matin
1/31/3 des Français a déjà commandé sur le site Shein.

Le 26 mai 2025, la Commission européenne a officiellement notifié au géant chinois Shein une série de manquements graves à la législation européenne en matière de protection des consommateurs. Cette annonce marque un tournant dans la stratégie de régulation des plateformes de e-commerce par l’Union européenne (UE). Shein, désormais dans le viseur de Bruxelles, a un mois pour répondre aux griefs sous peine d’amendes colossales. L’affaire secoue autant le marché que les habitudes d’achat des Européens.

Shein dans le collimateur de l’Union européenne

Les accusations portées contre Shein par la Commission européenne ne sont pas anodines. Le Réseau de coopération en matière de protection des consommateurs (CPC), réunissant les régulateurs des États membres, dénonce un « large éventail » de pratiques abusives, incluant des « faux rabais », des « délais d’achat fictifs » et des « étiquettes de produits trompeuses », selon un communiqué du 26 mai.

Des manquements sont également pointés concernant l’accès aux informations essentielles : le service client de Shein serait difficilement joignable, les coordonnées de contact peu accessibles, les droits de rétractation mal expliqués, et des allégations environnementales difficilement vérifiables apparaîtraient sur le site.

Bruxelles sort les crocs : amendes à la clé

Shein dispose désormais de 30 jours, jusqu’au 26 juin, pour formuler des engagements correctifs. Passé ce délai, les autorités nationales pourront infliger des amendes proportionnelles au chiffre d’affaires de l’entreprise dans chaque État membre concerné. Michael McGrath, commissaire européen à la protection des consommateurs, a déclaré : « La législation de l’UE en matière de protection des consommateurs n’est pas facultative : elle doit être appliquée dans tous les cas ».

La défense de Shein : coopération et prudence

Shein a réagi par la voix de ses représentants en affirmant « travailler de manière constructive avec les autorités nationales de protection des consommateurs et la Commission européenne pour démontrer [son] engagement à respecter les lois et règlements de l’Union européenne ». Quentin Ruffat, porte-parole de la marque en France, a déclaré à Franceinfo que l’entreprise était « en échange actif avec les organismes » concernés et souhaitait « répondre à leurs sollicitations ».

Il a également exprimé des réserves sur la proposition de taxe de deux euros sur les colis importés : selon lui, une telle mesure risquerait de « pénaliser les consommateurs sans garantir une industrie textile plus verte ».

Une action coordonnée dans un contexte plus large

Cette procédure fait écho à une enquête distincte, ouverte en février 2025 dans le cadre du Digital Services Act (DSA), visant également la plateforme Temu. Les autorités européennes s’intéressent en particulier aux interfaces numériques de Shein, suspectées d’employer des « dark patterns », ces mécanismes qui influencent de manière opaque les comportements d’achat.

L’Union européenne a par ailleurs proposé, le 20 mai, une taxe sur les petits colis importés et prévoit d’ici 2028 de supprimer l’exemption de droits de douane pour les commandes inférieures à 150 euros. Ces mesures pourraient affecter significativement le modèle économique de Shein.

Pour les consommateurs, un changement de cap ?

Derrière cette action réglementaire, l’enjeu est clair : garantir aux consommateurs européens un environnement commercial transparent et conforme aux normes communautaires. L’accumulation de pratiques jugées trompeuses et la difficulté d’obtenir des réponses de la part de la plateforme chinoise justifient, selon Bruxelles, la fermeté de la réponse.

La Commission insiste sur le fait que la régulation ne concerne pas uniquement la conformité des prix ou des informations, mais bien l’intégralité de l’expérience d’achat, y compris l’accès au service après-vente et la fiabilité des avis produits.

Un avenir incertain pour Shein en Europe

À l’heure où Shein vise une introduction en Bourse à Londres, ces accusations publiques fragilisent sa position sur le marché européen. Son transfert de siège à Singapour en 2022, ses volumes massifs de vente et ses faibles prix en font une cible prioritaire dans la volonté de l’UE de rééquilibrer les conditions de concurrence.

Tout dépendra désormais de sa capacité à répondre aux exigences réglementaires posées dans les délais impartis. Une chose est certaine : la période de tolérance face aux grandes plateformes internationales semble révolue en Europe.

Jade Blachier

Diplômée en Information Communication, journaliste alternante chez Economie Matin.

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