Alors que la saison estivale approche à grands pas, un nouveau front social s’ouvre sur les rails français. Des millions d’usagers vont-ils devoir composer avec un été placé sous le signe de la grève ? Les annonces syndicales se multiplient et dessinent déjà un horizon agité pour les voyageurs.
Grève SNCF : Sud-Rail menace tout l’été, les vacances en sursis

Un été sous le signe de la grève à la SNCF
La grève est sur toutes les lèvres depuis l’annonce tonitruante du syndicat Sud-Rail. Le 12 juin 2025 à 19 heures précises, débutera un préavis de grève reconductible couvrant l’intégralité de l’été, jusqu’au lundi 1er septembre 2025 à 8 heures. Une menace claire, massive, et dont les conséquences sur le trafic ferroviaire pourraient s’avérer explosives. Ce préavis n’est pas une formalité : il autorise des appels à la grève à tout moment, sur simple notification cinq jours avant.
Derrière cette manœuvre, Sud-Rail ne cache pas sa colère. Selon l’article de Franceinfo, le syndicat revendique "l'augmentation immédiate de la prime de travail de 100 euros mensuels" et dénonce de manière frontale des "conditions de travail dégradées". Pour les cheminots concernés, notamment les agents commerciaux à bord des trains (ASCT), les raisons de l’exaspération sont nombreuses : plannings instables, notifications de changements de dernière minute, vie privée sacrifiée sur l’autel de la flexibilité ferroviaire.
Pourquoi cette grève tombe au pire moment pour les vacanciers ?
Ce conflit n’arrive pas par hasard. Sud-Rail agit avec un calendrier chirurgical. L’objectif : frapper là où ça fait mal. L’été, avec ses transhumances familiales, ses trains bondés vers la côte atlantique ou les Alpes, représente le nerf sensible de la mobilité ferroviaire. Et la SNCF n’a pas besoin de ça : déjà bousculée par les grèves des 4, 5 et 11 juin à l’appel de la CGT-Cheminots, l’entreprise publique entre dans une période de turbulence qui pourrait s’étirer sur plusieurs mois.
Selon Le Télégramme, cette grève estivale constitue un prolongement des mobilisations de mai 2025, organisées notamment par le Collectif national ASCT, déjà présent lors des arrêts de travail des 9, 10 et 11 mai. Ces dates n’étaient pas anecdotiques : elles ont coïncidé avec le long week-end de l’Ascension, désorganisant le réseau et mettant les équipes locales sous tension. Résultat : aucune réponse de la direction. Ce que Sud-Rail qualifie aujourd’hui de « silence méprisant ».
Face à cette inertie, le syndicat a décidé de hausser le ton. Et ce n’est pas un simple bras de fer : c’est un siège. En Bretagne, prévient Le Télégramme, seuls deux TER sur cinq devraient rouler le 6 juin. Une avant-première du chaos à venir ?
Un syndicat isolé ou un prélude à une grève estivale générale ?
Il serait tentant de voir dans ce préavis de grève une action solitaire. Ce serait une erreur stratégique. Car Sud-Rail n’est pas seul sur les quais. L’automne dernier, en novembre 2024, tous les syndicats de la branche ferroviaire – CGT-Cheminots, UNSA-Ferroviaire, CFDT-Cheminots – avaient appelé à une grève illimitée contre le démantèlement de Fret SNCF. Cette unité syndicale, bien que mise à mal par des divergences d’approche, reste potentiellement explosive si la direction venait à ignorer les signaux d’alerte.
Et ils sont nombreux. Le site TER Sud PACA, dans son bulletin du 5 juin 2025, alerte sur des perturbations notables liées aux mouvements sociaux dans plusieurs régions. Même son de cloche sur la plateforme TER Occitanie, qui annonce des horaires modifiés en raison de grèves locales. En creux, un message : la conflictualité sociale est généralisée, et la grève estivale pourrait être le point de bascule d’une fronde plus large.
Une colère ancrée dans le quotidien des agents SNCF
La prime de travail de 100 euros n’est pas une coquetterie. C’est, selon Sud-Rail, une compensation nécessaire face à l'intensification de la charge mentale, à la fatigue chronique, et aux injonctions de polyvalence croissantes. Les agents ne demandent pas la lune : ils réclament le respect de leur équilibre de vie, bafoué par des changements de roulement à la dernière minute. Franceinfo rapporte les propos amers de représentants syndicaux : "Les plannings sont modifiés la veille pour le lendemain, voire le jour même. C’est devenu invivable."
La question qui se pose désormais est celle de la réaction du public. Car si les usagers soutiennent souvent les causes sociales, leur patience a des limites. Et elles risquent d’être rapidement atteintes si des milliers de familles se retrouvent clouées sur les quais un 15 juillet ou un 1er août.
Sud-Rail joue donc une partie risquée. Soit la direction lâche du lest rapidement, et le conflit s’apaise. Soit le rapport de force se radicalise, au risque d’enflammer l’ensemble du réseau. Un été bloqué, c’est un été perdu pour la SNCF. Et peut-être bien pour sa réputation.