Grève chez Ford en Allemagne : des milliers d’emplois menacés, les syndicats en colère

Ford a essuyé un nouveau revers dans sa stratégie industrielle européenne. À l’appel du syndicat IG Metall, 11.500 salariés allemands ont cessé le travail pour protester contre la suppression programmée de 2.900 postes d’ici fin 2027. L’usine historique de Cologne, en Rhénanie-du-Nord-Westphalie, épicentre de cette mobilisation, cristallise les frustrations face aux choix brutaux de la direction.

Stephanie Haerts
By Stéphanie Haerts Published on 13 mai 2025 15h00
Grève chez Ford en Allemagne : des milliers d’emplois menacés, les syndicats en colère
Grève chez Ford en Allemagne : des milliers d’emplois menacés, les syndicats en colère - © Economie Matin

Ford confronté à une grève massive en Allemagne : les ouvriers exigent des garanties

Le constructeur américain, embourbé dans une série de plans d’économie, a de nouveau mis en colère ses équipes européennes. Le déclencheur ? L’annonce, en novembre 2024, d’une cure d’amaigrissement prévoyant la suppression de 2.900 emplois en Allemagne. Une décision qui n’a laissé aucune marge de négociation, poussant IG Metall à suspendre les discussions salariales tant qu’une « offre acceptable » ne serait pas sur la table, comme l’a confirmé le syndicat dans des propos relayés par BFMTV, le 12 mai 2025.

Le mouvement de grève a paralysé pendant 24 heures le site de Cologne, cœur névralgique de la production européenne de Ford. Fondée en 1930, cette usine incarne la présence historique du constructeur outre-Rhin. Pourtant, malgré un investissement massif destiné à en faire un bastion de l’électrification, l’usine est aujourd’hui le théâtre d’un conflit ouvert. Le plan de licenciement ne passe pas, d’autant qu’il s’ajoute à un passif déjà lourd : depuis 2020, Ford a supprimé 12.000 emplois en Europe et fermé plusieurs usines.

Une restructuration sous tension

En mars 2025, la direction américaine annonçait une injection de 4,4 milliards d’euros pour renflouer sa filiale allemande. Mais cet effort financier, loin de calmer les esprits, a déclenché une nouvelle polémique. En contrepartie de cet investissement, Ford a supprimé une clause interne qui l’obligeait à couvrir les pertes de sa filiale. Une décision vivement contestée par IG Metall, qui y voit une manière habile de se désengager sans l’assumer ouvertement.

Cette gestion jugée opaque par les syndicats s’inscrit dans une série de choix perçus comme incohérents. Alors que Ford affirme vouloir s’imposer comme un acteur de l’électromobilité, la fermeture programmée de l’usine de Saarlouis, à la frontière française, où aucun modèle ne sera produit après l’arrêt de la Focus en 2025, laisse planer le doute. À quoi bon investir des milliards dans une transition verte si elle rime avec licenciements massifs ?

Ford et ses rivaux allemands en crise

Le constructeur n’est pas seul à tanguer. Volkswagen, Audi, Porsche : tous ont annoncé des plans de licenciement massifs ces derniers mois, avec jusqu’à 50.000 postes supprimés à eux trois. L’Allemagne, bastion de l’automobile européenne, est touchée de plein fouet par la baisse de la demande mondiale, la concurrence exacerbée des constructeurs chinois et les effets boomerang des nouvelles barrières douanières américaines. Pour Ford, l’équation est d’autant plus rude que ses résultats en Allemagne s’effondrent. En 2024, sa part de marché est tombée à 3,5 % contre 4,1 % en 2023.

Les ventes de véhicules électriques, censées relancer la dynamique, ne suffisent pas à compenser les pertes, notamment depuis la suppression des aides publiques à l’achat en Allemagne. Cette grève marque donc bien plus qu’un simple épisode social : elle symbolise une rupture de confiance entre salariés et direction. Elle pose aussi une question stratégique : Ford est-il prêt à assumer les conséquences sociales de sa mutation industrielle, ou entend-il poursuivre ses coupes sombres sans véritable dialogue ?

Stephanie Haerts

Rédactrice dans la finance et l'économie depuis 2010. Après un Master en Journalisme, Stéphanie a travaillé pour un courtier en ligne à Londres où elle présentait un point bourse journalier sur LCI. Elle rejoint l'équipe d'Économie Matin en 2019, où elle écrit sur des sujets liés à l'économie, la finance, les technologies, l'environnement, l'énergie et l'éducation.

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