Les chefs d’État et de gouvernement de l’Organisation du traité de l’Atlantique nord (OTAN) se retrouveront, le 24 juin prochain, à La Haye pour un sommet capital. En toile de fond, la volonté pressante de Donald Trump, revenu à la présidence des États-Unis, d’imposer aux alliés une hausse drastique des budgets de défense à hauteur de 5 % du produit intérieur brut. Une exigence qui bouleverse les équilibres internes de l’Alliance et suscite une onde de choc sur le Vieux Continent.
Dépenses militaires : l’Europe cède à l’exigence des 5 % de Trump

Trump, l’architecte d’un virage budgétaire sans précédent dans la défense
C’est une ritournelle que les capitales européennes n’avaient pas envie d’entendre à nouveau. Mais voilà, de retour à la Maison-Blanche, Donald Trump remet une pression maximale sur les membres de l’OTAN. Et cette fois, le seuil ne se limite pas aux 2 % du PIB, longtemps critiqués mais globalement admis. Désormais, c’est un effort porté à 5 % qui est exigé. Cette revendication, à peine croyable il y a quelques mois encore, est en passe d’être entérinée. Le jeudi 5 juin 2025 à Bruxelles, les ministres de la Défense de l’OTAN ont ouvert la voie à ce changement radical.
À la manœuvre, Matthew Whitaker, nouvel émissaire de Trump auprès de l’Alliance, dont la mission semble aussi limpide qu’impérative, forcer les Européens à accepter l’ultimatum budgétaire s’ils souhaitent éviter une humiliation diplomatique à La Haye. Les ministres ont ainsi franchi une étape significative vers cet engagement. La stratégie est brutale mais efficace, conditionner la présence de Trump au sommet à un alignement clair sur ses exigences. Car le souvenir de la claque de 2018, quand Trump avait publiquement fustigé chaque chef d’État pour leur “paresse budgétaire”, reste vivace.
Une OTAN bousculée : la défense au cœur de tensions politiques
Mais l’affaire est loin d’être consensuelle. Dans les couloirs de l’Alliance, des voix s’élèvent contre ce que certains qualifient de « diktat financier américain ». Si Mark Rutte, nouveau secrétaire général de l’OTAN, a affirmé que « la plupart des membres soutiennent » la proposition, les interrogations sur la soutenabilité d’un tel seuil sont légion.
Mark Rutte propose une répartition en deux blocs, 3,5 % pour les dépenses militaires pures, et 1,5 % pour les investissements stratégiques annexes (infrastructures critiques, cybersécurité, logistique). Un compromis qui vise à rendre la pilule moins amère, mais qui ne règle en rien les déséquilibres persistants entre les pays membres. Pete Hegseth, secrétaire américain à la Défense, a été clair dans des propos rapportés par Al Jazeera : « Nous devons aller plus loin et plus vite ». Un avertissement plus qu’un appel, qui laisse peu de place à la négociation.
Une Europe divisée, contrainte de choisir entre sujétion et autonomie
L’unanimité est une illusion diplomatique. En privé, plusieurs chancelleries européennes peinent à masquer leur irritation. L’Espagne juge l’objectif de 5 % « démesuré », tandis que d’autres, comme l’Italie ou la Belgique, redoutent que l’essentiel de ces nouveaux budgets parte nourrir l’industrie militaire américaine. Car derrière la rhétorique sécuritaire, c’est bien la question de la souveraineté industrielle qui refait surface.
Ces nouveaux budgets ne peuvent contribuer qu'à acheter des armes américaines. Une préoccupation largement partagée dans les milieux stratégiques européens. L’ombre du Buy American Act plane sur ces futures dépenses, avec le risque que l’Europe devienne un simple débouché pour le complexe militaro-industriel des États-Unis. Le spectre de la dépendance technologique, déjà palpable avec les programmes F-35 ou les systèmes C4ISR américains, pourrait s’en trouver encore renforcé.