Ils étaient nombreux à croire au déclic écologique. Mais entre l’inflation, les rabais et le découragement général, la consommation responsable se retrouve au placard. Que s’est-il passé ?
Consommation responsable : les Français tournent le dos aux promesses
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Published on 27 juin 2025 8h00
84%84% des Français approuvent l’interdiction des publicités pour les produits polluants.
Alors que la planète suffoque et que l’urgence environnementale n’a jamais été aussi criante, l’intérêt des Français pour une consommation plus sobre marque un net recul, peut-on conclure à la lecture du dernier baromètre GreenFlex–ADEME. Le phénomène n’est pas marginal, il est structurel. En l’espace d’un an, les pratiques dites responsables s’érodent. Et derrière les discours climatiques, c’est l’acte d’achat qui reprend le dessus.
Consommation responsable : un déclin lent mais certain
Ce n’est plus une simple hésitation, c’est une désaffection. En 2025, seuls 13% des Français affirment faire tout ce qu’ils peuvent pour consommer de manière responsable. Ils étaient 18% l’an passé. Cette baisse de 5 points dit tout d’une dynamique enrayée.
Même tendance pour l’achat de seconde main : 38% des répondants s’y adonnent désormais, contre 44% en 2024. Une pratique pourtant centrale dans la panoplie des gestes « durables ». Ce recul trahit une forme de désillusion collective, voire une lassitude.
Une conscience intacte… mais fatiguée
On ne peut pas accuser les Français d’ignorer les enjeux climatiques. Huit sur dix reconnaissent que la crise environnementale impose de changer nos habitudes. Mais cette lucidité s’émousse quand il s’agit de passer à l’action. La part des sondés se déclarant « tout à fait d’accord » chute de 40% à 31% en un an. Même fatigue du côté de l’engagement collectif : ceux qui disaient inciter leur entourage à consommer autrement passent de 26% à 20%.
Quand l’urgence sociale écrase l’urgence climatique
L’explication se niche sans doute dans la hiérarchie des priorités. L’environnement quitte le podium des préoccupations principales pour trois Français sur quatre, alors qu’il y figurait encore pour un sur trois en 2024. Pendant ce temps, la sécurité grimpe en flèche, intégrant le top 3 pour 41% des sondés. La santé, le pouvoir d’achat, le sentiment d’insécurité : tout concourt à reléguer l’écologie au second plan. Une réorientation brutale qui reconfigure l’acte d’achat.
Le piège des rabais et la dictature du prix
La consommation responsable souffre d’un environnement commercial hostile. En effet, 84% des Français estiment que la société les pousse à consommer constamment. 77% accusent les marques de sursolliciter les acheteurs durant les périodes promotionnelles. Et 51% reconnaissent « se faire avoir » lors de ces temps forts, malgré leur vigilance.
Le prix demeure le facteur déclencheur n°1. Résultat : même les plus engagés finissent par céder, observe Laure Blondel, directrice conseil « Marques, Produits et Consommation Responsables » chez GreenFlex : « Même les consommateurs les plus engagés finissent par ‘craquer’ pour des achats qu'ils regrettent ensuite face à la pression des incitations commerciales omniprésentes ».
Un désir d’alternatives, mais sans boussole
Le paradoxe est là : les Français veulent faire mieux, mais ne savent plus comment. 77% se disent ouverts à des livraisons plus lentes mais moins chères. 72% apprécieraient qu’un vendeur les incite à réparer plutôt qu’à racheter du neuf. Mais 45% estiment que marques et médias ne donnent pas assez d’informations pour faire les bons choix. Le sentiment d’impuissance s’installe, comme le déplore Valérie Martin, cheffe du service Mobilisation Citoyenne et Médias à l'ADEME : « Les consommateurs témoignent d’une sorte de résignation, de lassitude. Mais ils attendent des marques de nouvelles formes d’offres à des prix abordables ».
Et maintenant ? L’État en arbitre du match
Si les gestes individuels faiblissent, la demande d’un encadrement collectif se renforce. 91% des sondés soutiennent le développement des énergies renouvelables, 84% approuvent l’interdiction des publicités pour les produits polluants et 72% sont favorables à la rénovation obligatoire des logements. Même le budget public est scruté : 70% des Français souhaitent qu’il soit prioritairement dirigé vers des objectifs écologiques.
Le désamour envers la consommation responsable ne relève ni du cynisme ni de l’ignorance. Il est le fruit d’un découragement. Entre les prix qui explosent, les marques qui sursollicitent et les options écologiques souvent marginales, les citoyens reculent. Mais ils ne renoncent pas. À condition que l’offre suive, que les discours se concrétisent, et que la transition cesse d’être un luxe.