Assurance : 5 milliards d’euros balayés par les catastrophes climatiques en 2024

Les chiffres tombent comme la grêle en été : massifs, alarmants, inévitables. Derrière les chiffres, des maisons effondrées, des champs noyés, des murs fissurés. L’assurance vacille, les sinistres s’empilent. Et si ce n’était que le début ?

Paolo Garoscio
By Paolo Garoscio Published on 26 mars 2025 7h30
1er avril 2024, changement,d roit, allocations, aides, logement, assurance, règlementation
1er avril 2024, changement,d roit, allocations, aides, logement, assurance, règlementation - © Economie Matin
12%La fréquence des sinistres liés à l’eau a grimpé de 12 % en 2024

Le 26 mars 2025, l’organisme France Assureurs a révélé une donnée choc : le coût des catastrophes climatiques en France a atteint cinq milliards d’euros pour l’année 2024. Dans un contexte de multiplication des aléas extrêmes, cette nouvelle secoue un secteur de l’assurance déjà fragilisé par la récurrence et la gravité des sinistres. Est-ce un simple pic passager ou l’illustration d’un basculement structurel irréversible ?

Assurance : une industrie au bord de la rupture face aux aléas climatiques

Cinq milliards d’euros. Voilà le chiffre avancé par France Assureurs pour l’année 2024. Ce montant cumulé des indemnisations classe l’année au neuvième rang depuis la création du régime des catastrophes naturelles en 1982. Un répit ? Pas vraiment. Car cette enveloppe colossale reste inférieure à la moyenne de 5,6 milliards d’euros par an sur la période 2020-2024, mais nettement supérieure à la moyenne historique de 1,5 milliard sur les années 1982-1989. En clair : les standards d’hier sont devenus les planchers d’aujourd’hui.

La profession observe une transformation profonde de la nature du risque. Selon le site officiel de France Assureurs, « entre 2020 et 2023, les sinistres climatiques ont déjà dépassé de 18 % les projections établies pour… 2050 ». Autrement dit : le futur a déjà commencé, et il coûte cher.

Assurance et climat : les désastres les plus coûteux de 2024

Trois grandes familles d’aléas se partagent la facture de 2024. Les tempêtes, grêles et neiges représentent 2,2 milliards d’euros, les catastrophes naturelles (séismes, inondations, sécheresses) 2 milliards, et l’assurance récolte 800 millions d’euros.

Parmi les événements les plus ravageurs, les tempêtes Kirk et Leslie d’octobre 2024 cumulent 785 millions d’euros de dommages. Les inondations dans le Nord et le Pas-de-Calais entre novembre 2023 et janvier 2024 alourdissent la note de 430 millions d’euros. Et les cyclones outre-mer ? Ils explosent les compteurs : plus d’un milliard d’euros en trois occurrences, dont 500 millions d’euros rien que pour le cyclone Chido à Mayotte.

Et si le secteur est en alerte, c’est que ça ne peut qu’empirer. Comme l’indique le rapport : « la fréquence des événements et leur intensité s’accentuent, fragilisant la capacité d’absorption des compagnies ». Un euphémisme pour dire que le modèle économique vacille.

Assurance habitation : fissures invisibles, facture bien réelle

Le secteur résidentiel n’est pas épargné. France Assureurs signale que les dégâts des eaux sont devenus en 2024 le premier poste de sinistre en assurance habitation. En cause : une pluviométrie exceptionnelle, une exposition accrue, mais aussi une usure accélérée des infrastructures. Le constat est limpide : la fréquence des sinistres liés à l’eau a grimpé de 12 % en un an. Et en vingt ans, le coût moyen des indemnisations a bondi de 134 %.

Mais ce n’est pas tout. Un danger menace pour l’été 2025 : le retrait-gonflement des argiles (RGA), conséquence des sécheresses. Ce phénomène provoque des fissures structurelles sur les bâtiments, parfois invisibles au premier regard, mais dévastatrices pour les fondations. Et France Assureurs prévient déjà : un été sec pourrait transformer cette menace en crise assurantielle de grande ampleur.

Les projections climatiques terrassent les certitudes assurantielles

Les données prospectives sont glaçantes. Selon France Assureurs, les coûts des catastrophes climatiques pourraient doubler entre 2020 et 2050, passant de 73,4 à 143 milliards d’euros. Et ce n’est pas une supposition : sur la seule période 2020-2023, les pertes ont déjà surpassé les estimations prévues pour… trois décennies plus tard.

Face à cette trajectoire, les professionnels réclament une stratégie nationale de prévention, une réforme du régime d’indemnisation et surtout, une prise de conscience collective. Car à force de reconstruire dans les mêmes zones à risques, de repousser les adaptations structurelles et de nier le caractère systémique des dérèglements, c’est la soutenabilité même du modèle d’assurance qui vacille.

Le secteur de l’assurance va droit dans le mur

Le secteur de l’assurance envoie un message clair : il n’est plus capable d’absorber seul le coût croissant des catastrophes naturelles. L’année 2024, avec ses cinq milliards d’euros de pertes, n’est qu’un symptôme d’un basculement bien plus vaste. Et si la sécheresse de 2025 confirme les prévisions, ce sera une double peine : pour les assurés, pour les compagnies, mais surtout pour un système à bout de souffle, fondé sur des modèles météo d’un autre siècle.

Paolo Garoscio

Rédacteur en chef adjoint. Après son Master de Philosophie, il s'est tourné vers la communication et le journalisme. Il rejoint l'équipe d'EconomieMatin en 2013.   Suivez-le sur Twitter : @PaoloGaroscio

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