Altice joue son va-tout. Le mastodonte des transmission-connexion, plombé par une créance abyssale, enclenche une manœuvre juridique de dernier recours.
Altice bascule en sauvegarde accélérée : SFR bientôt vendu ?
Une dégringolade patiemment amorcée. Des cessions à la chaîne, un capital dilué, un opérateur valorisé à 30 milliards d’euros potentiellement sur le marché. Et en coulisses, un accord chèrement négocié pour tenter d’éviter l’asphyxie financière.
Altice en sauvegarde : une manœuvre calculée pour éviter le gouffre
Le groupe Altice France, entité-dirigeance de SFR, enclenchera dans les jours qui viennent une procédure de sauvegarde accélérée. Une modalité juridique rarement anodine, mais ici anticipée depuis février 2025. D’après une source interrogée par l’AFP le 21 mai 2025, ce recours « fait partie du processus juridico-administratif nécessaire pour entériner l’accord sur la dette ». Le plan, validé par plus de 90 % des détenteurs de la créance, vise à clore la conciliation et à figer juridiquement un compromis complexe : réduction de 8,6 milliards d’euros sur les près de 24 milliards affichés au troisième trimestre 2024, contre cession de 45 % du capital du groupe.
Une restructuration express dont l’aboutissement est programmé pour la fin septembre ou début octobre 2025. Objectif : comprimer la créance à 15,5 milliards d’euros. Et potentiellement à 13 milliards, si les ventes d’élément-actifs non stratégiques aboutissent, comme l’a indiqué Altice début 2025.
Ce que Drahi ne dit pas encore officiellement, mais que Bloomberg a révélé le 20 mai 2025, c’est que SFR pourrait changer de mains. Des négociations seraient en cours avec plusieurs acteurs, français ou étrangers, autour d’une potentielle vente du pilier-télécoms, valorisé à 30 milliards d’euros. Un bouleversement inédit depuis l’arrivée de Free sur le créneau en 2012. La reconfiguration serait radicale, et la consolidation du domaine, accélérée. Mais elle dépendra du feu vert des régulateurs.
Car céder SFR, ce n’est pas céder un simple fournisseur. C’est céder une structure-infrastructure critique, des millions de consommateurs, un levier commercial puissant. Et une partie du patrimoine industriel français.
Quand l’urgence dicte la gouvernance
Ce retournement brutal d’Altice, en moins d’un an, n’a rien d’une surprise. Le groupe accumule les passifs depuis des années. Il ne s’agit pas seulement d’une gestion financière hasardeuse. C’est une stratégie. Drahi a multiplié les leviers d’endettement, tout en cédant à la découpe ses sections non essentielles : médias (BFM, RMC), part dans La Poste Mobile, centres de données, etc.
Altice n’est plus en cotation boursière depuis 2021. Plus de comptes à rendre au marché, mais une pression gigantesque sur les épaules d’un seul homme. Patrick Drahi joue sa réputation et peut-être son empire. D’autant que l’ombre du scandale de corruption au Portugal continue de peser sur l’image du groupe.
Peut-on gouverner un tel ensemble avec une stratégie aussi agressive, sans en payer le prix ? Altice a poussé le levier de l’endettement jusqu’au point de rupture.