Le 8 juillet 2025 marque une date clé. Pour la première fois depuis sa dissolution surprise il y a plus d’un an, Emmanuel Macron peut à nouveau convoquer les Français aux urnes pour une élection législative. Une arme constitutionnelle redevenue active… mais explosivement instable.
Assemblée nationale : Macron retrouve le pouvoir de dissolution
Un an après son pari risqué après le cataclysme de sa majorité aux élections européennes de 2024, Emmanuel Macron retrouve cette semaine un levier puissant : celui de la fameuse dissolution de l'Assemblée nationale.
Dissolution : Macron retrouve son arme fatale
Depuis ce mardi 8 juillet, Emmanuel Macron peut de nouveau activer l’article 12 de la Constitution française. Celui-ci lui permet de dissoudre l’Assemblée nationale, après consultation du Premier ministre et des présidents des deux chambres. La dernière utilisation de ce levier remonte au 9 juin 2024, soir des élections européennes, quand le chef de l’État, confronté à la percée historique du Rassemblement national (RN), avait annoncé la dissolution. Résultat : un Parlement éclaté en trois blocs, sans majorité claire. Une situation dont il ne s’est jamais complètement remis.
Selon l’article 12, une nouvelle dissolution ne peut intervenir qu’un an après la précédente. C’est donc depuis le 8 juillet 2025 que ce pouvoir redevient disponible, le lendemain du second tour des élections législatives, où le Nouveau front populaire avait obtenu une courte victoire. Mais s’il en a la possibilité juridique, son efficacité politique reste profondément incertaine avec l'échec cuisant de la dernière. « S’il y a une dissolution, on meurt », alertait une ministre macroniste citée par France Inter le 7 juillet 2025.
L'élection des européennes de 2024 de la majorité présidentielle
Le précédent du 9 juin 2024 reste un traumatisme dans les rangs de la majorité présidentielle. Emmanuel Macron espérait alors clarifier le jeu parlementaire. Il a surtout semé le doute dans ses propres troupes. Le président de la République avait justifié son geste en invoquant « un score de seulement 14 % » aux européennes, jugeant que poursuivre son programme dans ces conditions serait illégitime. Mais loin de ramener la stabilité, cette décision a fragmenté davantage l’Assemblée, entre un bloc de gauche qui s'est progressivement détruit, une coalition centriste fragile, et une extrême droite renforcée par rapport à la dernière législature.
Depuis, Emmanuel Macron tente de se repositionner dans le jeu politique. Il multiplie les apparitions publiques, les déclarations sur les enjeux nationaux et les réunions de crise. « Macron n’a jamais autant essayé de se réinviter dans le jeu politique », observait un collaborateur cité par Le Parisien le 6 juillet 2025. Un retour en scène discret mais calculé, au moment où le pouvoir exécutif paraît plus affaibli que jamais.
Des prochaines élections législatives sans Marine Le Pen ?
Le spectre d’une nouvelle dissolution hante désormais l’Hémicycle. Les députés, toutes tendances confondues, redoutent l’hypothèse d’un nouveau scrutin précipité. Pour les élus du bloc central, cette menace agit comme un rappel à l’ordre. « La possibilité de dissolution sert d’arme de discipline massive », reconnaissait Mathieu Lefèvre, député Renaissance, dans Le Figaro Politique le 7 juillet 2025.
Du côté des oppositions, la perspective d’un nouveau vote électrise les ambitions. Le Rassemblement national, fort d’une progression à environ 120 députés en 2024, se dit prêt à repartir au combat. « Il y aura des députés du RN beaucoup plus nombreux », assurait Marine Le Pen dans RTL le 3 juillet. Et d’ajouter : « Que j’y sois ou que je n’y sois pas, l’intérêt des Français est que cela arrive. » Car oui à l'heure où on se parle, la double finaliste de la présidentielle ne pourrait pas se présenter aux prochaines élections législatives, avec sa condamnation le 31 mars 2025 dans l'affaire de détournements de fonds du FN. Même Sébastien Chenu, vice-président du RN, a qualifié cette dissolution de « nécessaire dès que possible », sur CNEWS le 29 juin 2025.
Mais à gauche, les tensions internes entre La France insoumise (LFI) et le Parti socialiste (PS) rendent une nouvelle campagne commune assez inimaginable. L’union du Nouveau Front populaire de 2024 pourrait ne pas résister à une nouvelle échéance rapprochée. Et au centre, l’alliance entre Renaissance et Les Républicains se délite, avec le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau comme nouveau chef de file de la droite française.
En cas de blocage, que peut faire le Président ?
Face à ce désordre institutionnel, Emmanuel Macron ne dispose pas que de l’article 12. Il pourrait, en théorie, convoquer un référendum, voire, dans des circonstances extrêmes, activer l’article 16 de la Constitution, qui lui accorde les pleins pouvoirs en cas de crise grave (une guerre par exemple). Il n'a été déclenché qu'une seule fois dans l'histoire de la Vᵉ République, par le général de Gaulle, du 23 avril au 29 septembre 1961, à la suite du putsch des généraux en Algérie. Mais aucun de ces scénarios ne semble aujourd’hui réellement envisagé.
Un sondage Ifop-Fiducial pour Sud Radio indique que 50 % des Français sont favorables à une nouvelle dissolution, tandis que 56 % souhaitent le renversement du gouvernement actuel, dirigé par François Bayrou depuis maintenant plus de six mois. Pourtant, seuls 34 % jugent crédible que Macron ose une nouvelle dissolution dans les mois à venir.
À moins de deux ans de la fin de son mandat, Emmanuel Macron joue gros. Une dissolution pourrait lui permettre de reprendre l’initiative. Ou bien précipiter sa majorité dans le vide. Pour l’instant, il temporise. Mais l’arme est là. Visible. Chargée. Et chacun, dans l’Hémicycle, sait qu’il pourrait à nouveau appuyer sur la détente.