Sologne : des oiseaux protégés tués, Olivier Bouygues placé en garde à vue

Quatre personnes ont été placées en garde à vue, dans le département du Loiret, le 9 juillet, dont Olivier Bouygues, homme d’affaires influent et héritier du groupe éponyme. La procureure de la République d’Orléans, Emmanuelle Bochenek-Puren, a confirmé cette information à France 3. L’enquête, ouverte un mois plus tôt, concerne des faits graves de destruction d’espèces protégées en bande organisée.

Stephanie Haerts
By Stéphanie Haerts Published on 10 juillet 2025 16h30
Sologne : des oiseaux protégés tués, Olivier Bouygues placé en garde à vue
Sologne : des oiseaux protégés tués, Olivier Bouygues placé en garde à vue - © Economie Matin

Cette affaire prend sa source dans une perquisition menée le 4 juin 2025 sur la propriété de Fontenaille, vaste territoire de 90 hectares détenu à 99 % par Olivier Bouygues lui-même. L’Office français de la biodiversité (OFB), appuyé par la gendarmerie, y avait découvert des dizaines de cadavres d’oiseaux protégés, parmi lesquels des faucons crécerelles, des buses, des cormorans et des aigrettes. Ces spécimens figurent sur la liste des espèces strictement interdites à la chasse ou à l’abattage, sauf dérogation spécifique.

Espèces protégées sacrifiées pour la chasse privée ?

Les investigations en cours s’appuient sur des éléments inquiétants. Selon les constats réalisés sur place, ces oiseaux auraient été tués pour préserver artificiellement un biotope favorable à la chasse de gibier introduit, notamment des faisans et des perdrix élevés à cette fin. L’exploitation cynégétique du domaine serait ainsi au cœur d’un système où la biodiversité naturelle est considérée comme un obstacle gênant, et non comme un héritage à préserver. Dès le 4 juin, quatre autres personnes liées à l’exploitation du domaine, un régisseur, un gestionnaire, un chauffeur et un coordinateur cynégétique, avaient été interpellées.

L’affaire, prise en main par la brigade de recherches d’Orléans, a été requalifiée sous l’angle du délit environnemental organisé. Les auditions du 9 juillet ont été conduites simultanément dans cinq lieux différents du Loiret, dont la gendarmerie d’Artenay. Selon une source proche du dossier citée par France 3, les enquêteurs s’intéressent aussi à la présence d’un enclos surpeuplé d’animaux, suspecté d’abriter un élevage illégal de sangliers destiné à fournir du gibier aux chasses privées du domaine.

Des règles environnementales contournées en toute discrétion

En droit français, la destruction d’espèces protégées ne peut être autorisée qu’à travers des dérogations strictes, délivrées par les préfets et encadrées par l’article L411-1 du Code de l’environnement. À Fontenaille, aucune de ces dérogations n’aurait été accordée, selon les premières analyses administratives. Les oiseaux retrouvés morts étaient intacts, parfois dissimulés, comme si leurs dépouilles ne devaient jamais être découvertes. La « destruction systématique depuis plusieurs années » évoquée par la procureure renforce cette hypothèse.

Dans un article parallèle publié le 9 juillet 2025 par MagCentre, le journaliste Michel Vialay décrivait la Sologne comme un territoire miné par le « séparatisme cynégétique ». De vastes propriétés y seraient gérées selon des logiques privées où la faune est domestiquée, contrôlée, exterminée si nécessaire, pour maintenir une illusion de nature sauvage au service des loisirs d’une minorité très fortunée.

Olivier Bouygues, un héritier rattrapé par la justice

Olivier Bouygues, fils du fondateur Francis et frère de Martin, président du groupe Bouygues, n’est pas un inconnu. Longtemps resté dans l’ombre, il gérait ce domaine de Fontenaille comme un refuge discret, loin des marchés financiers. Mais depuis le mois dernier, ce havre forestier est devenu le théâtre d’une procédure pénale retentissante.

Le parquet d’Orléans a confirmé qu’une cinquième personne, proche de l’exploitation, a été entendue en audition libre. Si les responsabilités sont établies, les peines encourues peuvent aller jusqu’à trois ans d’emprisonnement et 150 000 euros d’amende, en vertu de l’article L415-3 du Code de l’environnement. La qualification de « bande organisée » pourrait alourdir encore davantage les sanctions.

Stephanie Haerts

Rédactrice dans la finance et l'économie depuis 2010. Après un Master en Journalisme, Stéphanie a travaillé pour un courtier en ligne à Londres où elle présentait un point bourse journalier sur LCI. Elle rejoint l'équipe d'Économie Matin en 2019, où elle écrit sur des sujets liés à l'économie, la finance, les technologies, l'environnement, l'énergie et l'éducation.

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