Samsung va faire payer certaines fonctions santé de ses montres connectées

Une déclaration officielle du Dr Hon Pak, directeur de la santé numérique chez Samsung, est venue perturber les certitudes des utilisateurs de la gamme Galaxy ce 17 juin. Le géant sud-coréen envisage de faire basculer certaines fonctions de santé de ses montres connectées vers un modèle payant. Une tendance déjà amorcée par d’autres acteurs du secteur. Et qui, sous couvert d’innovation, pourrait bien cloisonner l’accès aux données physiologiques derrière un mur tarifaire.

Stephanie Haerts
By Stéphanie Haerts Published on 20 juin 2025 16h00
Samsung va faire payer certaines fonctions santé de ses montres connectées
Samsung va faire payer certaines fonctions santé de ses montres connectées - © Economie Matin

Samsung et l’abonnement santé : après Galaxy AI, un modèle qui s’étend aux montres

Samsung ne s’en cache plus. Après avoir annoncé en janvier 2024 que les fonctionnalités Galaxy AI seraient gratuites jusqu’en décembre 2025, le groupe ouvre une nouvelle brèche dans son écosystème. Cette fois, c’est la santé qui est visée. Lors d’une interview relayée le 17 juin par Les Numériques, le Dr Hon Pak a déclaré, dans des propos rapportés par le site Les Numériques : « Nous envisageons un abonnement payant à Samsung Health, dans un format comparable à Fitbit Premium ou Garmin Connect Plus. »

Les fonctionnalités aujourd’hui gratuites, comme le suivi du stress oxydatif, l’analyse avancée du sommeil ou encore la détection des niveaux d’antioxydants, pourraient devenir payantes. À l’instar de Fitbit (propriété de Google) avec Fitbit Premium ou Garmin avec son modèle Connect Plus, Samsung prépare donc un service de santé à deux vitesses. Le forfait de base pour les utilisateurs standards. Et l’accès intégral aux outils les plus avancés… moyennant un prélèvement mensuel.

Des fonctions gratuites aujourd’hui, mais pour combien de temps encore ?

Sur la page officielle de Samsung Health, aucune mention explicite d’un abonnement n’est visible à ce jour. Mais les indices s’accumulent. Plusieurs fonctions clés nécessitent déjà des conditions spécifiques : avoir une Galaxy Watch4 ou plus récente, utiliser la dernière version de l’application (6.27 ou ultérieure), disposer d’un smartphone Galaxy compatible, et activer certaines options comme le coaching du sommeil ou le score d’énergie.

Surtout, une mention discrète apparaît à plusieurs reprises : « certains services sont payants ». De quoi préparer, en douceur, le terrain pour une bascule tarifaire complète. D’autant que les déclarations du Dr Pak ne laissent guère de doute. L’homme précise que les nouvelles fonctionnalités de santé à venir avec One UI 8 Watch seront intégrées gratuitement dans les futures montres, mais potentiellement verrouillées pour les modèles précédents. Pour garder ses fonctions santé à jour, il faudra soit acheter une nouvelle montre, soit s’abonner.

Une stratégie technologique qui interroge sur la logique de péage numérique

La santé devient donc un service. Et qui dit service, dit abonnement. Après la musique, les films, les logiciels, et même l’intelligence artificielle, les données physiologiques sont la nouvelle frontière monétisable. Mais cette logique pose de sérieuses questions. Jusqu’à quel point peut-on rendre payant l’accès à son propre corps ?

Faut-il désormais s’abonner pour connaître son rythme cardiaque, sa température nocturne, ou la qualité de son sommeil ? Samsung adopte ici une stratégie déjà éprouvée par d’autres, mais dans un domaine particulièrement sensible. Car si les utilisateurs acceptent (à contrecœur) de payer pour de la productivité ou du divertissement, il est bien moins certain qu’ils accueillent avec la même passivité la transformation de leur santé en modèle économique.

L’illusion du "coaching santé" : l’IA au service de la segmentation marketing ?

À cela s’ajoute la promesse du Score d’énergie, dopé par l’intelligence artificielle Galaxy AI. L’outil analyse le sommeil, la fréquence cardiaque, l’activité physique… pour proposer des conseils personnalisés. Mais ces données, issues du corps de l’utilisateur, sont captées, interprétées, et monétisées par un acteur tiers. Un paradoxe éthique qui interroge. L’utilisateur devient à la fois le produit, la source de données, et… le client. Derrière l’apparente sophistication du système – reconnaissance des cycles du sommeil, suivi des ronflements, coaching intelligent, se profile un modèle redoutablement segmenté. Et si ce modèle s'impose, Samsung pourrait bien faire payer aux utilisateurs ce qu’ils fournissent eux-mêmes gratuitement, leurs données.

Samsung justifie cette orientation par la volonté d’investir davantage dans la recherche et l’innovation. Mais ce virage risque de renforcer les inégalités d’usage. Une montre Galaxy Watch achetée en 2022 pourrait perdre l’accès à certaines fonctions… sauf à souscrire un abonnement. Quant aux modèles de 2025, ils intègrent déjà certaines fonctions verrouillées, comme l’analyse du stress oxydatif ou le suivi de l’exposition à l’environnement. Dans cet écosystème de plus en plus fragmenté, la notion même de montre « connectée » dépend du statut d’abonné.

Stephanie Haerts

Rédactrice dans la finance et l'économie depuis 2010. Après un Master en Journalisme, Stéphanie a travaillé pour un courtier en ligne à Londres où elle présentait un point bourse journalier sur LCI. Elle rejoint l'équipe d'Économie Matin en 2019, où elle écrit sur des sujets liés à l'économie, la finance, les technologies, l'environnement, l'énergie et l'éducation.

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