Publicité : 5 minutes de malbouffe à l’écran et vos enfants mangent moins bien

Une étude récente remet en cause l’innocuité de l’exposition publicitaire chez les plus jeunes. Un temps d’écran court suffirait à influencer significativement leur comportement alimentaire. Les implications sanitaires pourraient être majeures.

Jade Blachier
By Jade Blachier Published on 12 mai 2025 14h26
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publicite-malbouffe-ecran-enfants-mangent-bien - © Economie Matin
130 kilocaloriesLes enfants consomment en moyenne 130 kilocalories supplémentaires par jour après ce genre de publicité.

Le 11 mai 2025, lors du Congrès européen sur l’obésité à Malaga, une étude britannique a jeté une lumière crue sur un phénomène que beaucoup suspectaient déjà. Dans une société saturée de messages publicitaires, ces cinq minutes semblent peser bien plus lourd qu’on ne le pensait.

Une étude implacable sur l’impact de la malbouffe et de la publicité sur les enfants

Menée par l’Université de Liverpool, l’étude a impliqué 240 enfants âgés de 7 à 15 ans. Son protocole est simple : exposer les jeunes à cinq minutes de publicité pour des aliments riches en graisses, sucres ou sel, puis mesurer leur comportement alimentaire.

Le résultat est sans appel. Les enfants consomment en moyenne 130 kilocalories supplémentaires par jour après cette brève exposition. Cela équivaut à un petit chocolat ou une barre sucrée. Plus troublant encore : l’effet persiste plusieurs heures après le visionnage, y compris lors du repas suivant. Les chercheurs ont même observé que les publicités montrant uniquement une marque, sans présenter de produit, ont un impact similaire.

« Nos résultats montrent que le marketing des aliments malsains entraîne une augmentation soutenue de l'apport calorique chez les jeunes à un niveau suffisant pour provoquer une prise de poids au fil du temps », a déclaré la professeure Emma Boyland, auteure principale de l’étude.

Cette même étude indique que les enfants ayant un indice de masse corporelle (IMC) plus élevé sont particulièrement sensibles à ces stimuli, avec 17 kcal supplémentaires consommées pour chaque unité standardisée d’IMC. Aucun canal n’est épargné : réseaux sociaux, télévision, podcasts, affichage urbain… tous participent à cette surenchère calorique orchestrée.

La malbouffe, un enjeu de santé publique trop longtemps ignoré

La dangerosité de la malbouffe sur la santé des enfants n’est pas une nouveauté, mais les chiffres deviennent de plus en plus accablants. Déjà en 2020, Santé publique France alertait : plus de la moitié des publicités vues par les enfants concernent des produits à faible qualité nutritionnelle (Nutri-Score D et E). Les enfants français de 6 à 17 ans sont 17 % à être en surpoids, et 4 % obèses.

L’organisme soulignait également que les créneaux horaires les plus regardés par les enfants (19h-22h) sont ceux où les publicités de malbouffe sont massivement diffusées. Un cocktail potentiellement nocif dont les effets s’accumulent dans le temps.

« Être exposé à la publicité pour des produits gras, sucrés, salés, crée des préférences et augmente la consommation. Cela augmente également les pressions des enfants exposés sur leurs parents, pour qu’ils en achètent », déclarait Anne-Juliette Serry, responsable de l’unité nutrition à Santé publique France.

Publicité et malbouffe : une alliance difficile à encadrer

Face à ces constats, les réactions politiques divergent selon les pays. Au Royaume-Uni, une loi interdira dès octobre 2025 les publicités pour les aliments riches en gras, sucre ou sel avant 21h sur les chaînes télévisées et sur la publicité en ligne payante à toute heure. Toutefois, certaines formes de publicité resteront autorisées, notamment l’affichage public et les contenus de marque sans produits visibles.

En France, la législation est encore plus permissive. Aucune interdiction formelle n’existe. Une charte de bonnes pratiques, renouvelée tous les cinq ans sous l’égide de l’Arcom, encadre ces campagnes. Toutefois, elle reste dépourvue d’engagements chiffrés et d’effets contraignants.

Alexandra Murcier, diététicienne-nutritionniste, explique pour Doctissimo : « Ces publicités devraient être plus encadrées, parce que les enfants ne sont pas du tout sensibles aux bandeaux ou aux messages de prévention. Ils ne savent pas juger ce qui est bon pour eux ou pour leur santé. Il y a donc un travail de régulation législative à faire. »

Cinq minutes d’influence, des conséquences durables

L’impact d’un message publicitaire dépasse de loin son instant de diffusion. Selon l’étude, il n’est même pas nécessaire de montrer un produit pour déclencher une consommation. La simple exposition à une marque, à un univers graphique ou sonore suffit.

Par ailleurs, la promotion des produits sains reste marginale, ce qui contribue à déséquilibrer les choix alimentaires proposés aux enfants. « C’est dommage qu’il y ait très peu de publicité dans ce sens. Mais c’est sans doute au Gouvernement de faire bouger ces lignes », ajoute Alexandra Murcier pour Doctissimo.

Jade Blachier

Diplômée en Information Communication, journaliste alternante chez Economie Matin.

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