Plus-value immobilière : pourrez-vous vendre votre bien plus tôt ?

Derrière les annonces choc, les chiffres tranchants et les promesses à double tranchant, un vieux serpent de mer fiscal ressurgit dans le débat : la plus-value immobilière. Une proposition de loi alimente à nouveau les tensions entre réforme et immobilisme.

By Alix de Bonnières Published on 24 mai 2025 16h00
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Plus-value immobilière : pourrez-vous vendre votre bien plus tôt ? - © Economie Matin
36,2La ponction totale sur la plus-value immobilière est de 36,2 %.

Le 16 mai 2025, une proposition déposée à l’Assemblée nationale par Éric Ciotti a remis sur le devant de la scène un sujet explosif : la fiscalité des plus-values immobilières. Un texte ambitieux qui promet une exonération totale après seulement dix ans de détention d’un bien. Mais au-delà des effets d’annonce, qu’en est-il réellement de cette promesse ? Et que dit aujourd’hui la loi sur ce levier fiscal aussi sensible que complexe ?

La plus-value immobilière : un impôt redouté mais bien rodé

Aujourd’hui en France, la plus-value réalisée lors de la vente d’un bien immobilier (hors résidence principale) est soumise à une imposition rigoureuse. L’État prélève 19 % d’impôt sur le revenu, auxquels s’ajoutent 17,2 % de prélèvements sociaux, portant la ponction totale à 36,2 %.

Mais cette pression s’estompe avec le temps : des abattements s’appliquent en fonction de la durée de détention. À partir de la 6e année, le fisc accorde un rabais annuel progressif. Résultat : l’exonération totale de l’impôt sur le revenu est acquise après 22 ans, tandis que l’exonération complète des prélèvements sociaux n’intervient qu’au bout de 30 ans. Une éternité pour ceux qui espèrent réinjecter rapidement leur capital.

Ce que dit (encore) la loi de 2025 : rien n’a changé… pour l’instant

La loi de finances pour 2025, promulguée le 14 février 2025 (texte n° 2025-127, JORF du 15 février), ne modifie en rien le régime de la plus-value immobilière. Aucun article ne prévoit pour l’instant une réduction des durées d’exonération. La fiscalité en vigueur reste donc figée dans le marbre : 22 ans pour l’impôt sur le revenu, 30 ans pour les prélèvements sociaux, sauf exceptions prévues pour certaines cessions spécifiques (logement social, expropriation, etc.).

Le projet Ciotti : une révolution en attente de validation

L’opposant LR, Éric Ciotti, entend bien bousculer cette inertie fiscale avec une proposition de loi qui ferait tomber le seuil d’exonération totale à seulement 10 ans de détention. L’objectif : libérer les transactions bloquées, fluidifier le marché et donner un coup de pouce aux petits propriétaires.

Selon l’article publié sur Actual Immo en mai 2025, cette proposition vise à « retirer une barrière fiscale majeure pour les vendeurs potentiels ». Le texte évoque également un moratoire sur l’interdiction de location des logements énergivores, ces fameuses passoires thermiques dont les obligations de rénovation pèsent lourd sur les finances des petits bailleurs.

« Le coût substantiel des rénovations énergétiques, rendu souvent prohibitif par des règles d’emprunt restrictives, complique la mise en conformité », rappelle l’article d’Actual Immo.

Une réforme à double tranchant

Si elle venait à être adoptée, la réforme Ciotti changerait radicalement la donne. Fini les longues années d’attente avant de vendre sans être saigné à blanc. Pour les propriétaires de résidences secondaires ou de biens locatifs, c’est la promesse d’un déblocage massif de biens.

Mais ce scénario idyllique cache ses propres risques : explosion des ventes opportunistes, hausse des prix, tension sur l’offre locative… et manque à gagner fiscal pour l’État. Sans parler de la cohérence avec les engagements climatiques : alléger la fiscalité sans inciter fermement à la rénovation pourrait ralentir la transition énergétique.

Pour l’instant, un texte… sans poids légal

La proposition Ciotti n’a pas encore franchi les étapes législatives nécessaires. Elle reste une intention, certes médiatisée, mais sans effet sur le droit en vigueur. En clair, aucun propriétaire ne peut aujourd’hui revendiquer une exonération à 10 ans.

L’effet d’annonce, lui, est bien réel. Il s’adresse aux électeurs, aux petits bailleurs en difficulté, aux investisseurs frileux… Mais aussi à une majorité gouvernementale qui peine à faire passer ses propres réformes sur le logement.

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