Les chiffres communiqués par Google cette semaine sur la modération publicitaire sont impressionnants. Mais au-delà des statistiques, c’est une évolution structurelle des outils de détection et de prévention qui se dessine en toile de fond.
Google bloque 5,1 milliards de publicités frauduleuses grâce à l’IA
Le 16 avril 2025, Google a publié son rapport annuel sur la sécurité publicitaire, le « Ads Safety Report 2024 ». Cette publication fait état d’un renforcement notable des moyens de lutte contre les publicités frauduleuses, avec le blocage de 5,1 milliards d’annonces non conformes. L’entreprise s’appuie désormais largement sur l’intelligence artificielle pour mener cette tâche, dans un contexte d’augmentation des menaces liées à l’usurpation d’identité, à la désinformation et aux contenus générés automatiquement.
Google s’appuie sur l’IA pour bloquer les annonces frauduleuses
En 2024, les modèles d’intelligence artificielle utilisés par Google ont bénéficié de plus de 50 améliorations techniques. Ces mises à jour ont permis d’accélérer l’analyse des contenus, d’identifier des comportements suspects dès l’inscription d’un compte annonceur et de bloquer les publicités problématiques avant même leur diffusion. Selon Alex Rodriguez, General Manager Ads Safety chez Google, « l’IA nous permet d’être plus précis, plus rapides et plus efficaces dans notre réponse aux abus ». Il précise également que 97 % des vérifications de conformité sont désormais effectuées par ces systèmes automatisés. L’automatisation permet aux équipes humaines d’intervenir uniquement sur les situations les plus complexes.
Dans le même temps, une équipe de plus de 100 experts a été mobilisée pour suivre l’évolution des techniques de fraude. Ce groupe a travaillé à la révision des règles internes, notamment celles liées à la déclaration trompeuse, afin d’inclure les pratiques émergentes comme l’utilisation de deepfakes ou de contenus générés par des intelligences artificielles. En conséquence, 700 000 comptes publicitaires ont été suspendus de manière définitive. Selon Google, cette mesure a permis de réduire de 90 % le volume de signalements relatifs à ce type de fraude.
Deepfakes, cryptomonnaies : des formes d’arnaques en expansion
Les publicités frauduleuses détectées en 2024 ont largement impliqué des campagnes d’usurpation d’identité ou des incitations financières douteuses. Plusieurs cas recensés ont mis en scène des visages de personnalités publiques détournés, par exemple ceux de célébrités comme Tom Hanks, pour promouvoir des produits associés aux cryptomonnaies ou à des services financiers fictifs. Ces formats exploitent les capacités des générateurs d’images et de voix pour donner l’illusion de légitimité, rendant plus difficile leur détection manuelle.
Pour contenir ces pratiques, Google a développé des solutions de filtrage s’appuyant sur des signaux techniques et comportementaux. Ces outils permettent de détecter les anomalies, telles que les informations de paiement suspectes ou les incohérences géographiques dans les comptes annonceurs. Les mesures prises ont également conduit à la suspension de 39,2 millions de comptes publicitaires au total. En parallèle, 9,1 milliards d’annonces ont été restreintes, c’est-à-dire que leur diffusion a été encadrée, limitée ou conditionnée à des modifications.
Un encadrement renforcé dans un contexte politique mondial
L’année 2024 a été marquée par une forte activité électorale à l’échelle mondiale, ce qui a amené Google à renforcer ses dispositifs en matière de transparence des campagnes politiques. L’entreprise a élargi ses exigences de vérification pour les annonceurs engagés dans la diffusion de contenus électoraux. Cela inclut l’identification obligatoire, la mention visible de la source de financement des messages (« payée par »), et l’obligation de signaler les contenus créés par des intelligences artificielles.
Google affirme avoir validé plus de 8 900 nouveaux annonceurs électoraux en 2024. En parallèle, 10,7 millions d’annonces électorales ont été supprimées pour non-respect des nouvelles règles ou absence de vérification. Ce volet s’inscrit dans une volonté plus large de renforcer la transparence et la fiabilité de l’information dans un environnement où les fausses informations peuvent circuler rapidement via des canaux numériques.
Vers une coordination sectorielle contre la fraude publicitaire
Enfin, Google a souligné la nécessité d’une action concertée entre les différents acteurs de l’écosystème publicitaire. L’entreprise a rejoint l’Alliance globale anti-scam et a contribué au lancement du Global Scam Signals Exchange, une plateforme de partage de signaux de fraude. L’objectif de cette initiative est de permettre une circulation rapide des informations sur les menaces identifiées, afin que d’autres entreprises puissent également adapter leurs systèmes de modération. Alex Rodriguez déclare à ce propos : « Les acteurs malveillants se parlent entre eux, nous devons faire de même ».