La consommation de carburants routiers en France suit une tendance à la baisse depuis plusieurs années, mais à un rythme bien plus lent que prévu. La transition vers des modes de transport plus propres peine à s’accélérer, en raison d’une adoption encore timide des véhicules électriques et d’un contexte économique incertain.
Les Français consomment toujours beaucoup de carburants

En 2023, les Français ont consommé 47,8 millions de mètres cubes de carburants, une diminution de seulement 0,4 % par rapport à l'année précédente. Cette érosion est bien inférieure aux objectifs fixés par la programmation pluriannuelle de l'énergie, qui tablait sur une baisse de 5 % par an en 2020 et de 6 % pour les années à venir.
Le diesel en net recul face à l'essence
Malgré la montée en puissance des véhicules électriques, leur impact sur la consommation de carburants reste encore marginal. « La part des véhicules électriques dans le parc automobile français ne se voit pas encore au niveau des consommations de carburants », souligne Olivier Gantois, président de l'Ufip Energies et Mobilités, aux Échos. Selon lui, l'amélioration de l'efficacité énergétique des véhicules thermiques joue un rôle plus important dans la réduction progressive de la consommation.
L'évolution du marché des véhicules électriques reste incertaine. Après une année 2023 marquée par un ralentissement des ventes, le gouvernement a annoncé une réduction des aides à l'achat en 2024. Un frein supplémentaire à la transition, d'autant que les véhicules électriques restent plus coûteux que leurs homologues thermiques.
Au-delà de la consommation globale, c'est la répartition entre les types de carburants qui évolue. Le gazole, historiquement dominant en France, voit sa part diminuer progressivement : il représentait 69 % des volumes consommés en 2024, contre 81 % en 2015. Cette baisse accompagne la « dédiésélisation » du parc automobile : les immatriculations de véhicules diesel sont passées sous la barre des 10 % en 2023, alors qu'elles atteignaient 70 % au début des années 2010.
Les infrastructures des carburants en question
Le scandale du Dieselgate, la prise de conscience environnementale et la popularité croissante des véhicules hybrides, majoritairement essence, ont accéléré cette mutation. Pourtant, la fiscalité avantageuse du gazole demeure un frein à son recul. En effet, la taxe sur le diesel reste inférieure à celle du SP95-E10 (59 centimes par litre contre plus de 66 centimes par litre), une situation héritée des politiques d'après-guerre et épargnée par les gouvernements successifs, notamment après le mouvement des « gilets jaunes ».
La baisse progressive du diesel modifie les équilibres énergétiques du pays. Longtemps importatrice de gazole en raison d'une production nationale insuffisante, la France réduit peu à peu sa dépendance. En 2023, 48,6 % du diesel consommé a été importé, contre plus de 50 % les années précédentes. Ce recul contribue à réduire le déficit commercial lié aux énergies fossiles, un enjeu clé depuis l'embargo sur les produits pétroliers russes début 2023.
En revanche, la hausse de la consommation d'essence pose un problème logistique. Les raffineries françaises sont bien adaptées à cette augmentation, mais les capacités de stockage pourraient s'avérer insuffisantes. « Si les volumes d'essence consommés continuent d'augmenter, on risque de manquer de capacités de stockage pour maintenir un approvisionnement fluide », avertit Olivier Gantois. Des investissements seraient nécessaires pour adapter les infrastructures, mais les incertitudes sur l'évolution de la consommation compliquent la prise de décision.