Malgré une offre de véhicules électriques en pleine explosion, les Français continuent de privilégier les motorisations thermiques. Publié en exclusivité par Le Figaro, un sondage Ifop commandé par le site La Centrale, révèle une résistance qui dépasse largement les simples considérations économiques. Pourquoi cette défiance perdure-t-elle, alors même que les incitations se multiplient et que l’électrique devient plus accessible ?
Les Français boudent toujours la voiture électrique, malgré des prix en baisse

Voiture électrique : l’offre explose, la demande piétine
L’année 2024 a été marquée par une poussée spectaculaire de l’offre en voiture électrique : +85 % par rapport à 2023, contre un maigre +2 % pour les véhicules thermiques, selon les chiffres de La Centrale. Les constructeurs multiplient les modèles, rognent les marges, peaufinent les aides. Rien n’y fait. Le sondage Ifop pour La Centrale révèle qu’à prix égal, seuls 13 % des Français opteraient pour un modèle électrique immédiatement, tandis que 24 % envisageraient de le faire d’ici quelques années.
Cela laisse une majorité, 63 %, soit fermement réticente, soit franchement indifférente à l’offre électrique. Une claque pour les industriels, un signal pour les pouvoirs publics. Comme le résume Jérôme Fourquet, directeur du département Opinion à l’Ifop, dans des propos rapportés par Le Figaro : « L’achat de véhicules électriques marque le pas, certes en raison du prix élevé de ces modèles. Mais la question du prix n’est manifestement pas le seul frein ».
Les Français et leurs doutes
Les obstacles sont connus mais s’enracinent. Une étude Kantar pour La Centrale, réalisée en avril 2024, révèle que 58 % des acheteurs potentiels redoutent le coût élevé du remplacement de la batterie. Le même pourcentage s’inquiète de la différence de prix avec les véhicules thermiques. 55 % doutent de la durée de vie réelle de la batterie. Le doute technique s’ajoute au frein financier. Mais c’est surtout l’achat d’un véhicule électrique d’occasion qui devient un casse-tête.
Selon la même étude, 60 % des Français trouvent cet achat anxiogène, complexe ou trop chronophage. Pour une large partie du public, l’électrique reste un pari technologique encore incertain, difficile à appréhender, surtout hors des grands centres urbains. Cette prudence trouve un écho dans les mots d’Anaïs Harmant, directrice marketing de La Centrale, qui voit là un « frein culturel », dans des propos rapportés par le quotidien : « Il y a quelques années, les gens regardaient leur compte en banque sur leur ordinateur en pensant que c’était plus sécurisé que sur leur mobile. Aujourd’hui, cela paraît incongru ».
Voiture électrique : fracture sociale et générationnelle
Le rejet de la voiture électrique n’est pas uniforme. Les données de l’Ifop dessinent une fracture générationnelle et territoriale. Chez les 18-24 ans, 47 % se disent prêts à passer à l’électrique. Chez les 25-34 ans, ils sont 53 %. Les catégories socio-professionnelles aisées et les Franciliens affichent aussi un taux d’adhésion de 50 %. Les autres restent plus froids.
Si vous vivez dans une zone rurale avec une famille à charge, vos préoccupations en matière de mobilité ne sont pas les mêmes que celles d’un étudiant en région parisienne qui utilise quotidiennement les transports en commun. La voiture électrique séduit quand elle devient un signe de statut, une expérimentation urbaine, ou un geste militant. Elle convainc moins quand elle doit remplacer, au quotidien, une voiture fiable et bon marché.
L'hybride, le bon compromis
Dans ce paysage fragmenté, l’hybride trace sa voie. Les données de La Centrale montrent que cette motorisation représente désormais 12 % du marché de l’occasion, contre 4 % seulement pour l’électrique. Dans ces conditions, opter pour un véhicule hybride s’impose comme une solution intermédiaire crédible, située entre les motorisations traditionnelles et les modèles entièrement électriques.
C’est un pont technologique, un sas de transition. Mais cela témoigne aussi de la lenteur de l’évolution. La bascule ne se fera pas à marche forcée. L’analogie est frappante : « Pour le numérique, le shift a pris une dizaine ou quinzaine d’années. Pour l’électrique, ce sera pareil », explique Anaïs Harmant au Figaro.