En plein cœur d’une session parlementaire déserte, l’Assemblée nationale a adopté, le 19 juin, un amendement porté par le Rassemblement national (RN), appelant à rouvrir la centrale nucléaire de Fessenheim. Cette décision a suscité de vives réactions dans le débat public. Le même jour, l’Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR) a toutefois précisé, lors d’une conférence de presse, que toute remise en service de la centrale était irréalisable.
Fessenheim ne rouvrira pas : la centrale nucléaire est définitivement condamnée

Fessenheim : un vote symbolique déconnecté des réalités
Le nom de Fessenheim a refait surface à l’Assemblée nationale, à la faveur d’un amendement inattendu et essentiellement symbolique. Adopté dans la nuit du 18 au 19 juin 2025, le texte porté par le RN, soutenu par une coalition de circonstance LR et quelques députés d’outre-mer, réclame le redémarrage d’une centrale mise à l’arrêt il y a cinq ans. Ce vote intervient la veille même de la présentation par l’ASNR de son rapport annuel de sûreté nucléaire pour le Grand Est.
Ceux qui rêvent d’une relance nucléaire immédiate y voient une revanche sur la fermeture jugée précipitée de 2020. Mais sur le terrain, personne ne s’y trompe. Claude Brender, maire de Fessenheim, désormais fervent défenseur du projet industriel de reconversion, a définitivement tourné la page, dans des propos rapportés par France 3 régions : « C'est un projet important pour notre territoire. Après la fermeture de la centrale nucléaire, cela représente un rebond économique, des emplois, des finances pour la commune. », déclarait-il déjà en 2024. Même EDF n’a jamais envisagé le moindre scénario de redémarrage.
Fessenheim : une centrale nucléaire techniquement condamnée
L’ASNR a mis les points sur les i lors de sa conférence du 19 juin. Son verdict est sans appel : « Plusieurs opérations irréversibles ont été réalisées, pour lesquelles il n’existe pas à ce jour de solution technique pour revenir en arrière », peut-on lire dans L'Alsace. Parmi ces opérations : la décontamination des circuits, le démantèlement de composants en cœur de cuve et le prélèvement de matériaux pour caractérisation radiologique. Ces interventions, engagées dès 2021, rendent toute perspective de réactivation improbable.
Mais ce n’est pas tout. Sur le plan réglementaire, la centrale a perdu toute assise juridique : « Il n’existe pas de procédure pour remettre en service une installation définitivement arrêtée. Le projet serait considéré comme une nouvelle installation à part entière », précise le rapport de l’ASNR, dans des propos rapportés par France 3 régions. Et cette "nouvelle" installation ne répondrait à aucun des standards de sûreté en vigueur aujourd’hui, le quatrième réexamen décennal n’ayant jamais eu lieu.
Fessenheim, un gouffre économique
On aurait pu penser que le nucléaire, en regain de grâce politique, méritait des investissements massifs. Mais dans le cas de Fessenheim, la messe est dite : « Il n’est pas du tout avéré que le projet serait opportun. D’ailleurs EDF ne l’a jamais envisagé », a martelé l’ASNR. Même l’exploitant n’en veut pas. Le chantier de démantèlement est bien avancé, et un "technocentre" de recyclage de métaux faiblement radioactifs, estimé à 450 millions d’euros, doit voir le jour sur le site.
Ce projet s’inscrit dans une logique d’économie circulaire, bien plus compatible avec les exigences contemporaines de transition énergétique. Relancer Fessenheim signifierait donc détruire le travail déjà accompli, investir des milliards supplémentaires dans une structure dépassée et réglementairement obsolète. Le simple bon sens semble avoir déserté les bancs parlementaires.