Ékranoplans, hydravions et réacteurs : la Chine relance son industrie aéronautique

Suspendre les lois de l’aérien classique ? Un vaisseau hybride ravive une technologie militaire soviétique et redessine en coulisses les contours d’une ambition économique stratégique.

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By Amandine Leclerc Last modified on 1 juillet 2025 19h42
Ekranoplan
Ékranoplans, hydravions et réacteurs : la Chine relance son industrie aéronautique - © Economie Matin
65,6 M USDLe marché chinois de la maintenance aéronautique (MRO) atteindra 65,6 milliards USD en 2035, contre 19,6 milliards en 2024, avec un taux de croissance annuel de 11,6 %

Depuis le 30 juin 2025, un impressionnant avion à réaction amphibie a émergé dans la baie de Bohai. Ce colosse volant à effet de sol incarne à la fois la montée en puissance de la technologie aéronautique chinoise et son rôle moteur dans la croissance économique nationale.

Un déclencheur pour l’industrie aéronautique chinoise

L’essor du low‑altitude economy

Pékin mise massivement sur ce nouveau secteur stratégique. Selon The Economist, cette économie de l’espace aérien inférieur à 1 000 m devrait atteindre 1,5 trillion de yuans (≈ 208 milliards USD) en 2025. La Financial Times évoque même un objectif de 3,5 trillion (≈ 490 milliards USD) à l’horizon 2035. L’ekranoplan, volant à quelques mètres au-dessus des flots, s’inscrit parfaitement dans ce cadre réglementaire accéléré.

Un moteur pour AVIC & CASIC

Le conglomérat AVIC a généré 44,9 milliards USD de revenus défense en 2023, se classant second au niveau mondial. De son côté, CASIC disposait déjà de 21,3 milliards USD en 2012. Ces géants mobilisent leurs capacités en propulsion, avionique, structures composites et systèmes embarqués dans la mise en œuvre de ce projet hybride.

Enjeux industriels et chaîne de valeur

Souveraineté technologique

Face aux restrictions américaines sur les semi-conducteurs, Pékin intensifie sa production nationale de composants critiques : radars, calculateurs embarqués, commandes de vol. L’ekranoplan devient un démonstrateur industriel pour renforcer cette autonomie.

Un effet d'entraînement civil

Le projet militaire stimule l’innovation dans les plateformes civiles : hydravions comme l’AG600 Kunlong, drones‑cargo, engins hybrides pour la logistique côtière. Il structure aussi un réseau de PME spécialisées, appelées à devenir des fournisseurs stratégiques.

Un retour en force sur la scène mondiale

Renaissance d’un héritage soviétique

Ce nouvel engin réinvente les anciens modèles soviétiques comme le Lun ou le Caspian Sea Monster. Il conserve le principe WIG (Wing in Ground Effect) tout en intégrant des avancées modernes : moteurs réactifs, coque catamaran, empennage en T.

Face au “Liberty Lifter” américain

Tandis que la DARPA travaille sur une version cargo civil de WIG, la Chine adopte une logique duale — militarisée mais adaptable. Cette dissymétrie pourrait accroître l’avantage concurrentiel chinois sur les marchés émergents.

Retombées économiques et perspectives

  • Compétences techniques : ingénierie WIG, propulsion réactive, systèmes avioniques.
  • Réseau localisé : PME, équipementiers, sous-traitants du MRO.
  • Exportations hybrides : Afrique, Asie, marché dual civil/militaire.
  • Résilience stratégique : filières technologiques autonomes.

Selon Spherical Insights, le marché chinois de la maintenance aéronautique (MRO) atteindra 65,6 milliards USD en 2035, contre 19,6 milliards en 2024, avec un taux de croissance annuel de 11,6 %. Un levier clair de transformation économique pour tout le secteur.

L’ekranoplan chinois n’est pas un projet isolé, mais un révélateur. À la croisée du civil et du militaire, du passé soviétique et de l’avenir hybride, il incarne une stratégie industrielle offensive. Moteur d’une low-altitude economy ambitieuse, il pourrait imposer la Chine comme leader dans l’aéronautique amphibie du XXIe siècle.

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