L’année 2025 s’annonçait comme celle du rebond. Pourtant, l’INSEE vient doucher les espoirs d’une reprise franche en publiant sa note de conjoncture du 18 mars 2025. La croissance française, après un honorable +1,1 % en 2024, devrait s’enliser cette année, peinant à dépasser un maigre +0,4 % à mi-année. L’économie patine, étouffée par un contexte international trouble, une consolidation budgétaire qui pèse sur les entreprises et un marché du travail en perte de vitesse. En clair, la France avance, mais au ralenti.
Croissance 2025 : la France tourne au ralenti, alerte l’INSEE

Une économie française qui cale dès le début d’année
L’INSEE ne laisse planer aucun doute : le premier semestre 2025 sera morose. Le produit intérieur brut progresserait timidement de +0,1 % au premier trimestre, puis de +0,2 % au deuxième. Le moteur de la croissance tourne au ralenti, affaibli par une consommation prudente, une industrie sous pression et un climat des affaires toujours dégradé.
Les signes de ralentissement se multiplient. L’indicateur de climat des affaires, tombé à 96 en février, reste en dessous de sa moyenne historique. L’industrie manufacturière continue de décrocher, affichant un recul de -0,4 % au premier trimestre. La construction, déjà affaiblie par une demande en berne, perd encore du terrain avec une activité en repli de -0,3 %. Seuls les services marchands tentent de résister, affichant une modeste progression de +0,1 %, portée par une consommation des ménages qui, malgré tout, augmente de +0,4 %.
Cette timide dynamique cache une réalité plus inquiétante : les entreprises investissent de moins en moins. L’investissement des ménages poursuit son recul, notamment dans l’immobilier, avec une baisse de -0,3 %. Du côté des entreprises, la situation est plus contrastée. Si certains secteurs, comme l’automobile, enregistrent une légère hausse des achats (+0,5 %) due à un effet d’anticipation avant l’application du malus écologique en mars, l’investissement en construction reste désespérément dans le rouge (-0,5 %).
Un marché du travail sous tension : l’emploi en recul, le chômage en hausse
Les tensions sur le marché du travail deviennent palpables. Après une année 2024 déjà marquée par un ralentissement des embauches, l’économie française a détruit 90 000 postes salariés sur les trois derniers mois de 2024. Et la tendance ne s’inverse pas. L’INSEE prévoit une nouvelle perte de 50 000 emplois au premier semestre 2025. Dans le même temps, la population active continue d’augmenter sous l’effet de la réforme des retraites, ce qui pousse inexorablement le taux de chômage vers le haut. Il atteindrait 7,6 % à mi-2025, contre 7,4 % fin 2024.
Le coup de frein sur l’emploi s’explique par plusieurs facteurs. D’abord, la fin des aides exceptionnelles à l’embauche et à l’apprentissage, qui avaient dopé artificiellement le marché du travail ces dernières années. Ensuite, le ralentissement de l’activité économique, qui oblige les entreprises à revoir leurs prévisions à la baisse. Dans les industries intensives en énergie, comme la chimie et la métallurgie, la morosité est frappante. Les perspectives d’investissement sont atones et les dirigeants se montrent extrêmement prudents.
Le Budget du gouvernement pèse sur les entreprises
L’année 2025 marque une inflexion majeure dans la politique budgétaire du gouvernement. Après plusieurs années de déficits élevés, l’exécutif a choisi la rigueur. La loi de finances 2025 prévoit un ajustement budgétaire de 0,7 point de PIB, avec pour objectif de ramener le déficit public à 5,4 % du PIB, après 6,0 % en 2024. Cette consolidation repose en grande partie sur une hausse des prélèvements obligatoires, qui contribuerait à 0,9 point de PIB à l’ajustement budgétaire.
Les entreprises seront les premières victimes de cette politique de rigueur. La surcote d’impôt sur les sociétés, qui s’applique aux grandes entreprises, devrait coûter 8 milliards d’euros aux acteurs concernés. La réduction du Crédit d’Impôt Recherche amputerait encore 0,4 milliard d’euros. La création d’une taxe sur les rachats d’actions et l’augmentation du forfait social sur les attributions gratuites d’actions représenteront un fardeau supplémentaire de 0,9 milliard d’euros.
Au total, la situation financière des entreprises devrait se dégrader à hauteur de 0,9 point de leur valeur ajoutée. Ce poids supplémentaire sur leurs marges risque de freiner l’investissement et de limiter leur capacité à recruter.
Des ménages relativement épargnés, mais toujours prudents
Si le gouvernement veille à ne pas trop affecter le pouvoir d’achat des ménages, certaines mesures budgétaires auront tout de même un impact négatif. La hausse de la taxe de solidarité sur les billets d’avion, le durcissement du bonus-malus automobile et la fin du bouclier tarifaire sur l’électricité entraîneront une hausse de 0,2 point du prix de la consommation des ménages.
Toutefois, la désinflation offre un répit aux ménages. Après avoir culminé à 2,5 % en 2024, l’inflation devrait redescendre à +1,1 % mi-2025. Avec des revenus en progression, notamment grâce à la revalorisation des retraites et des salaires, le pouvoir d’achat continuerait de croître, affichant un gain de +0,9 % à mi-2025.
Mais cette amélioration du pouvoir d’achat ne se traduira pas nécessairement par une forte reprise de la consommation. Le taux d’épargne des ménages reste à des niveaux historiquement élevés, atteignant 18,2 % à mi-2025, après 18,4 % fin 2024. Cette prudence s’explique par un manque de confiance persistant et une incertitude qui continue de peser sur les perspectives économiques.
Des perspectives fragiles et une incertitude persistante
Si le scénario central de l’INSEE mise sur une croissance de +0,4 % à mi-année, plusieurs aléas pourraient remettre en cause cette trajectoire. Le premier risque est d’ordre géopolitique. La montée des tensions commerciales entre les États-Unis et l’Europe pourrait entraîner une contraction des échanges internationaux, ce qui pénaliserait les exportateurs français.
L’évolution du marché du pétrole constitue une autre inconnue. Le baril est actuellement autour de 70 dollars, ce qui soulage les ménages et les entreprises européennes, mais toute remontée des cours viendrait renchérir les coûts de production et freiner la consommation.
Enfin, la réaction des ménages à la consolidation budgétaire demeure incertaine. Si la confiance revenait et que le taux d’épargne diminuait, la consommation pourrait surprendre à la hausse. À l’inverse, un durcissement du marché du travail ou une montée des incertitudes politiques pousserait les Français à encore plus de prudence, plombant ainsi toute tentative de reprise.
La France : un pays en attente de moteur pour relancer sa croissance
En définitive, l’économie française tourne au ralenti, prisonnière d’un environnement international complexe et d’une politique budgétaire qui, bien que nécessaire, pèse sur l’activité. L’INSEE dresse un diagnostic sans appel : sans impulsion nouvelle, la croissance restera modeste en 2025. Loin des ambitions de redressement, la France risque de se contenter d’un simple surplace.