Les cent jours du gouvernement de François Bayrou. Et après ?…

Un noeud gordien est apparu dans le fonctionnement de nos institutions politiques : sous son deuxième quinquennat, Emmanuel Macron a nommé, à trois reprises, des Premiers ministres ne disposant pas de majorité parlementaire. Cette situation ne doit pas se reproduire. C’est le préalable à tout redressement national.

Alain Dumait
By Alain Dumait Published on 26 mars 2025 9h15
éducation, François Bayrou; enseignement public, Premier ministre, USA, réforme, dissolution
Les cent jours du gouvernement de François Bayrou. Et après ?… - © Economie Matin

Vendredi dernier 21 mars 2025, tandis qu’aux États-Unis le président Trump signait un nouveau décret annonçant la disparition (sic) du ministère de l’Éducation, en France, le Premier ministre François Bayrou - à la tête du gouvernement depuis le 13 décembre 2024 - annonce une prochaine grande réforme de la formation des enseignants.

Bien sûr, s’agissant des réformes “à la tronçonneuse“ du président américain, il faut toujours relativiser. D’abord parce que, d’ores et déjà, aux États-Unis, la responsabilité de l’Éducation appartient aux États, programmes, financement et recrutement des enseignants compris. Le niveau fédéral n’intervient que pour 10 % des financements, et, principalement, a pour mission de faire respecter les droits civiques, et mettre en œuvre les lois fédérales qui concernent les populations défavorisées. Pour beaucoup d’électeurs républicains de Donald Trump, c’est déjà trop…

En France, la situation est très différente. L’éducation nationale s’est bien déchargée des bâtiments et de leur entretien, ainsi que du péri-scolaire sur les collectivités locales, depuis les lois de décentralisation de 1982, mais le mammouth n’a pas bougé d’un poil concernant les programmes et la gestion des personnels éducatifs et administratifs, toujours gérés par l’administration centrale et ses rectorats.

Ne peut-on pas conserver le principe constitutionnel selon lequel "l'organisation de l'enseignement public obligatoire gratuit et laïque à tous les degrés est un devoir de l'État“, tout en confiant sa mise en oeuvre aux régions ?

Mais ne nous berçons pas d’illusions : dans le contexte politique actuel, sans majorité parlementaire, ni le gouvernement de François Bayrou, ni aucun autre, ne peut faire autre chose que de gérer les affaires courantes. Parvenir à plafonner la dette publique, en pourcentage du P.I.B. serait déjà un exploit…

En attendant une prochaine dissolution…

À partir du  10 juin 2025, le Président de la République retrouvera la possibilité de dissoudre l’Assemblée nationale. (Pour certains constitutionnalistes, il devrait attendre le 8 juillet 2025, un an et un jour après le second tour des élections législatives de 2024…)

Ensuite, le scrutin doit se dérouler au moins vingt jours et au maximum quarante jours après la dissolution. Soit entre le dimanche 3 août et le dimanche 17 août, dans la seconde hypothèse constitutionnelle. À noter que l’élection doit forcément avoir lieu un dimanche. On peut également imaginer que la dissolution ne serait pas décidée aussitôt le délai constitutionnel écoulé, mais au retour des vacances d’été 2025…

Aujourd’hui, la cote de popularité du Premier ministre est au plus bas. Sa survie est à la merci des députés du PS et du RN. Seule une promesse de modification du mode électoral pour de prochaines élections législatives serait de nature à retenir le vote d’une motion de censure par ces deux groupes parlementaires...

Les réformes, pourtant urgentes, attendront.

Dans ce contexte, les bonnes nouvelles, au plan économique, ne peuvent venir que de l’extérieur : la relance en Allemagne, le cessez-le-feu en Ukraine, de belles commandes d’armement venues des autres pays d’Europe…

Et, puisque, pour la France, les réformes économiques nécessaires sont rendues impossibles par le mauvais fonctionnement de nos institutions politiques, il conviendra d’y porter remède.

Jusqu’à présent, conformément à l’esprit de la Constitution de la Vᵉ République, le Premier ministre est nommé par le Président de la République, sans que ce dernier ait à se soucier que son gouvernement dispose d’une majorité parlementaire. François Bayrou, comme la plupart de ses prédécesseurs, n’a pas posé la question de confiance à l’issue de sa déclaration de politique générale, le 14 janvier dernier. Une motion de censure a été déposée - et même deux, en l’occurrence… - et elle a été rejetée.

Les deux prédécesseurs de François Bayrou sont tombés sur des motions de censure, pour lesquelles RN et PS ont mêlé leurs voix.

Il me semble qu’il conviendrait, dorénavant, que le président de la République s’assure, préalablement à la nomination d’un Premier ministre, que celui-ci disposera bel et bien d’une majorité parlementaire. Et que cela soit vérifié par l’engagement de la responsabilité d’un nouveau gouvernement dès la déclaration de politique générale de ce nouveau Premier ministre.

Pour cela, point n’est besoin d’une réforme constitutionnelle. Une nouvelle pratique, plus démocratique, suffirait. C’est un point sur lequel devraient s’engager les prochains candidats à l’élection présidentielle.

Alain Dumait

Alain Dumait, 79 ans, est journaliste depuis 1970. Il devient éditeur de journaux en 1978 et crée La Lettre A, lance "Les 4 Vérités-Hebdo", puis plusieurs autres publications. Il a racheté L’Essor de la Gendarmerie en 2012, qu'il dirige toujours.

No comment on «Les cent jours du gouvernement de François Bayrou. Et après ?…»

Leave a comment

* Required fields