Budget de la défense : Sébastien Lecornu demande 100 milliards d’euros

Pour assurer la souveraineté de la France et moderniser ses forces, le ministre des Armées, Sébastien Lecornu, estime qu’un budget de 100 milliards d’euros par an est nécessaire.

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Jade Blachier
By Jade Blachier Published on 11 mars 2025 9h35
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budget-defense-lecornu-demande-100-milliards - © Economie Matin

Le 9 mars 2025, Sébastien Lecornu a accordé une interview à La Tribune Dimanche dans laquelle il préconise une augmentation massive du budget de la défense. Loin d’un caprice, cette annonce intervient dans un contexte de tensions internationales accrues : guerre en Ukraine, réajustement stratégique des États-Unis, et montée en puissance militaire de pays comme la Chine et la Russie.

Un budget de la défense en pleine inflation

Depuis 2017, le budget de la défense a connu une ascension vertigineuse. Passé de 32 milliards d’euros à 50,5 milliards d’euros en 2025, il devrait atteindre 68 milliards en 2030 selon la trajectoire actuelle. Mais pour Sébastien Lecornu, cette projection est insuffisante. Il plaide pour une enveloppe annuelle de 100 milliards d’euros, soit presque le double du budget actuel.

Cette augmentation spectaculaire repose sur plusieurs constats. Tout d’abord, l’obsolescence des équipements militaires devient préoccupante. L’armée française, bien que technologiquement avancée, souffre de lacunes en matière de munitions, de guerre électronique et de cybersécurité. Ensuite, le contexte géopolitique actuel pousse la France à revoir ses ambitions. La guerre en Ukraine a révélé l’incapacité des pays européens à soutenir un effort militaire de longue durée.

La dépendance européenne vis-à-vis des États-Unis en matière de défense devient une problématique majeure, notamment face au désengagement progressif de Washington. Enfin, la France doit rattraper son retard par rapport à ses voisins européens. L’Allemagne, par exemple, a drastiquement augmenté son budget militaire, contraignant Paris à suivre cette tendance sous peine de perdre en influence stratégique.

La France en retard sur l'échelle internationale ?

Si l’on compare les efforts budgétaires des grandes puissances militaires, la France se situe bien loin derrière les États-Unis, dont le budget de la défense atteint 850 milliards d’euros en 2024. La Chine investit environ 250 milliards d’euros dans son armée, tandis que la Russie consacre près de 100 milliards d’euros à son appareil militaire. En Europe, l’Allemagne a récemment décidé d’injecter 100 milliards d’euros pour moderniser ses forces.

Dans ce contexte, la France, avec ses 50,5 milliards d’euros prévus en 2025, semble sous-dimensionnée face aux nouvelles menaces mondiales. L’objectif des 100 milliards d’euros annuels permettrait donc à Paris de retrouver une place prépondérante sur l’échiquier stratégique international. Atteindre ce seuil nécessiterait un effort financier sans précédent, notamment dans un pays où les dépenses publiques sont déjà sous tension.

Quelles priorités pour ces 100 milliards d’euros ?

Sébastien Lecornu identifie plusieurs axes essentiels pour justifier cet investissement. La première priorité concerne la production de munitions, jugée insuffisante pour permettre à l’armée française de tenir dans un conflit prolongé. Le renforcement des capacités en cybersécurité et en intelligence artificielle est également crucial, les cyberattaques constituant aujourd’hui une menace majeure.

Le ministre des Armées insiste aussi sur la nécessité de moderniser les flottes aériennes et navales. L’accélération de la production des Rafale et des frégates de dernière génération permettrait à la France de garantir sa supériorité technologique. Enfin, l’espace militaire devient un enjeu stratégique majeur. Le développement de satellites de surveillance et de défense spatiale est indispensable pour protéger les infrastructures nationales et éviter toute dépendance technologique vis-à-vis d’autres puissances.

100 milliards d’euros : une utopie budgétaire ?

Le principal obstacle à ce projet reste son financement. Actuellement, la dette publique française dépasse 3 000 milliards d’euros, soit environ 112 % du PIB. Dans ce contexte, dégager une enveloppe de 100 milliards d’euros pour la défense semble extrêmement difficile sans affecter d’autres secteurs clés.

Plusieurs pistes sont évoquées pour y parvenir. Une réaffectation des dépenses publiques pourrait être envisagée, mais cela impliquerait des coupes budgétaires dans des domaines sensibles comme l’éducation, la santé ou les infrastructures. L’hypothèse d’une hausse des impôts est également sur la table, bien que politiquement risquée. Enfin, un endettement supplémentaire permettrait d’absorber cette hausse des dépenses militaires, mais au prix d’une aggravation des finances publiques.

D’ailleurs, certains experts remettent en question l’idée selon laquelle cet investissement serait un levier économique efficace. Certes, le secteur de la défense génère plus de 200 000 emplois directs et indirects en France et représente un moteur important pour l’industrie. Toutefois, son impact positif sur la balance commerciale reste incertain et ne suffirait pas à compenser intégralement l’effort budgétaire demandé.

Jade Blachier

Diplômée en Information Communication, journaliste alternante chez Economie Matin.

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