Crise. Les boutiques ferment, les chiffres s’effondrent, les clients fuient. Si certaines grandes enseignes de prêt-à-porter parviennent encore, du moins tant que faire se peut, à garder la tête hors de l’eau, les commerçants indépendants, eux, ont de plus en plus de mal à tenir la corde…
Crise du prêt-à-porter : les indépendants au bord du précipice
Les fermetures de magasins de prêt-à-porter sont presque hebdomadaires. La crise du secteur de l'habillement bat son plein et les derniers chiffres du baromètre de la Fédération Nationale de l’Habillement (FNH), publié le 8 avril 2025, le confirment. Malgré un léger rebond enregistré en mars 2024, l'organisme tire de nouveau la sonnette d'alarme, en particulier pour les commerçants indépendants qui sont en première ligne.
Prêt-à-porter : 67 % des commerçants indépendants affiche un CA en recul
Le baromètre de mars 2025, publié par la Fédération Nationale de l’Habillement (FNH), dresse un constat des plus alarmants : 67 % des commerçants indépendants ont enregistré une baisse de leur chiffre d’affaires, soit un recul moyen de - 8,1 % par rapport à mars 2024, malgré le rebond observé un an plus tôt, lorsque mars 2024 affichait une hausse de +7,6 % par rapport à mars 2023.
Ce souffle court, qui avait redonné espoir l’an dernier, s’est évaporé en moins de douze mois. Aucun segment n’est épargné : –11 % de chiffre d’affaires pour la mode mixte, –8 % pour la mode homme, –5 % pour les rayons femme, enfant et lingerie. À l’échelle géographique, c’est une saignée nationale : –24 % à La Réunion, –16 % en Normandie, –14 % en Occitanie, –13 % en Nouvelle-Aquitaine.
Seule la région PACA fait figure d’exception, les commerçants indépendants y ayant enregistré une hausse moyenne de chiffre d’affaires de +6 % en mars 2025. Mais ce sursaut, s’il peut sembler rassurant de prime abord, fait immédiatement suite à une chute brutale de - 24 % enregistrée en février de la même année.
Des ventes gelées, et des saisons décalées
Mars 2025 a été doux sur le papier, mais ressenti comme hivernal. Résultat : les vêtements printaniers sont restés sur cintres. La Fédération Nationale de l’Habillement le souligne : les clients ne se sont pas projetés dans la saison suivante, et les nouvelles collections, mises en rayon dès janvier, n'ont pas trouvé preneur.
En effet, si les températures hivernales du mois de mars expliquent en partie le ralentissement du secteur du prêt-à-porter, c’est avant tout l’absurdité d’un calendrier commercial qui en constitue la véritable cause. Trop de promotion tue la promotion. Les soldes d’hiver, lancés dès le 10 janvier et achevés le 6 février, n’ont fait qu’accélérer la dévalorisation des articles, tout en lassant une clientèle saturée de rabais permanents. Résultat : les achats se sont naturellement freinés, faute d’envie, faute de nécessité, faute de logique.
Les grandes enseignes (aussi) tombent comme des mouches
Depuis plusieurs années, les annonces de restructuration et de fermetures de magasins de prêt-à-porter se succèdent, et se sont même accélérées depuis deux, voire trois ans. L'une des dernières en date est IKKS. L’enseigne a en effet officiellement annoncé, en février 2025, un Plan de Sauvegarde de l’Emploi : 77 magasins sont concernés, pour un total de 202 suppressions de postes. Une grande partie de ces mesures est déjà en cours d’application, certaines boutiques ayant d’ores et déjà fermé leurs portes. Chez Pimkie, le couperet était tombé dès le 18 janvier 2024, avec l’annonce d’un vaste plan de fermeture. Depuis janvier 2025, une seconde vague a été enclenchée : 36 magasins supplémentaires doivent fermer d’ici l’été, portant le nombre total de postes supprimés à près de 500.
Princess Tam Tam, Comptoir des Cotonniers, Camaïeu, Burton of London, Kaporal, Esprit… La liste est longue, très longue. La crise du secteur du prêt-à-porter est d’autant plus inquiétante pour les commerçants indépendants que, contrairement aux grandes enseignes, ils ne disposent pas des mêmes filets de sécurité — qu’il s’agisse de trésorerie, d’appuis institutionnels ou de leviers de restructuration.
Les indépendants demandent à être protégés
Face à ces perspectives noires, les commerçants indépendants ne mâchent plus leurs mots. Dans son communiqué du 8 avril 2025, la Fédération Nationale de l’Habillement a lancé un appel pressant, demandant l’adoption sans délai du projet de loi anti-fast fashion. Ce texte, déposé fin 2023 et actuellement en discussion au Parlement, n’a toujours pas été adopté, malgré son passage en commission des affaires économiques et un calendrier initial qui prévoyait un examen en séance publique au premier trimestre 2025. Le message est clair : il ne s’agit plus de sauver quelques marges, il faut changer les règles du jeu.
Appuyée par un nombre croissant d’adhérents, la Fédération Nationale de l’Habillement exige aujourd’hui un cadre juridique fort : pour freiner l’importation massive de textile à bas coût liée à la fast-fashion, restaurer des cycles de vente cohérents, et protéger durablement le commerce de proximité.
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