Plan Bayrou : un redressement contesté dans une France sous tension

Le Premier ministre François Bayrou a dévoilé le 15 juillet 2025 un plan de redressement budgétaire d’une ampleur inédite depuis plus d’une décennie. Avec pour objectif de réaliser 43,8 milliards d’euros d’économies dès l’an prochain, ce plan vise à ramener le déficit public à 4,6 % du PIB. Mais derrière l’ambition chiffrée, plusieurs économistes, acteurs politiques et observateurs alertent sur la fragilité structurelle du plan, ses hypothèses contestées, et les risques économiques à moyen terme.

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By Amandine Leclerc Published on 16 juillet 2025 17h51
Tension Financière
Plan Bayrou : un redressement contesté dans une France sous tension - © Economie Matin
+1,7 %Le gel des prestations sociales et le blocage des barèmes fiscaux pourraient réduire le pouvoir d’achat réel des ménages, dans un contexte d’inflation estimée à +1,7 % pour 2026.

Une équation budgétaire tendue

Le gouvernement table sur un effort de redressement porté principalement par deux leviers : la maîtrise des dépenses publiques et une hausse modérée des recettes. Selon les chiffres communiqués par l’exécutif, les dépenses de l’État, des collectivités et de la Sécurité sociale atteindront 1.722 milliards d’euros en 2026, soit 29 milliards de plus qu’en 2025.
Ce chiffre inclut notamment le nouvel effort de défense annoncé par Emmanuel Macron, tout en affirmant une « modération » par rapport à une dynamique naturelle de +60 milliards sans intervention.

Pour tenir les objectifs, François Bayrou mise sur :

  • Une "année blanche" pour l’ensemble des prestations sociales, y compris les pensions de retraite.
  • La suppression de deux jours fériés, destinée à augmenter la productivité nationale.
  • Des hausses ciblées de recettes, notamment sur certains droits de timbre et tickets modérateurs.

Mais 14 milliards de ces économies viendraient de prélèvements supplémentaires, selon le député Charles de Courson, qui estime que le plan « ne va pas assez loin dans la baisse des dépenses publiques ».

Le signal d’alerte d’Édouard Philippe

L’ancien Premier ministre Édouard Philippe a vivement critiqué ce plan, y voyant un catalogue de mesures transitoires sans portée structurelle : « Quasiment rien dans ce qu’il propose ne règle le problème », a-t-il déclaré au  Parisien.

« Ce n’est qu’un plan d’urgence. Je préfère un plan d’urgence du Premier ministre qu’un plan imposé par le FMI. »

Il pointe notamment l’absence de réforme profonde des systèmes de protection et d’administration publique, jugée indispensable pour retrouver une trajectoire soutenable.

Les critiques des économistes et des syndicats

Plusieurs économistes pointent un risque de contraction de la consommation intérieure, à l’heure où la croissance française est déjà atone. Le gel des prestations sociales et le blocage des barèmes fiscaux pourraient réduire le pouvoir d’achat réel des ménages, dans un contexte d’inflation estimée à +1,7 % pour 2026.

Du côté des syndicats, la réaction est sans appel. Sophie Binet, secrétaire générale de la CGT, déclare sur RTL : « Il nous prépare un appauvrissement généralisé du pays, une année noire pour les travailleurs. »

Même tonalité chez la CFE-CGC. François Hommeril, son président, s’indigne sur BFMTV : « Quel est ce projet qui consiste à taper sur les salariés, les chômeurs et les malades ? »

Des marges de négociation restreintes

Face à la fronde politique et sociale, le gouvernement tente d’afficher une posture d’ouverture. Amélie de Montchalin, ministre chargée des Comptes publics, évoque un plan « équitablement réparti » et annonce la recherche d’un compromis budgétaire.
Mais comme le souligne Gérald Darmanin sur BFMTV-RMC, « ce budget a peu de chances d’être voté » dans une Assemblée où l’exécutif reste minoritaire.

Malgré le soutien du président de la République, qui parle d’un plan « courageux, audacieux et lucide », l’avenir de cette trajectoire budgétaire reste incertain. Les motions de censure brandies par La France insoumise et le Rassemblement national pourraient faire tomber le gouvernement avant même que le projet ne soit débattu.

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