Un nouveau système de contrôle de l’âge en ligne est en test en Europe. L’objectif ? Bloquer l’accès des mineurs à certains contenus. Mais le remède numérique semble déjà obsolète.
Réseaux sociaux : bientôt interdits aux mineurs en France ?

Le 14 juillet 2025, la Commission européenne a annoncé le lancement d’un test grandeur nature d’une application de vérification de l’âge en ligne. Ce dispositif, expérimenté par cinq pays dont la France, doit permettre de restreindre l’accès des mineurs à des contenus sensibles. Un projet ambitieux sur le papier, mais qui soulève déjà une vague de scepticisme. Dans un contexte où l’usage des VPN (réseaux privés virtuels) est généralisé et les plateformes souvent peu coopératives, le contrôle de l’âge risque de se heurter à une réalité technique bien plus complexe.
Une application pour filtrer les contenus sensibles... ou faire semblant ?
C’est une initiative européenne qui veut paraître ferme : à partir de l’été 2025, cinq États membres — la France, l’Italie, le Danemark, la Grèce et l’Espagne — expérimentent une application numérique chargée de vérifier l’âge des internautes accédant à certains sites à risque, notamment pornographiques. L’objectif est clair : empêcher les mineurs d'accéder à des contenus jugés dangereux, tels que la pornographie, les jeux d’argent ou certains forums non modérés.
Selon l’article du Point, le système repose sur un tiers de confiance certifié chargé de vérifier la majorité de l’utilisateur, sans conserver ses données personnelles. La méthode reste volontairement floue, entre reconnaissance faciale, justificatif d’identité ou certificat numérique. Le test intervient quelques mois après l’entrée en vigueur, le 11 avril 2025, d’une nouvelle directive européenne exigeant une vérification active de l’âge sur les sites proposant du contenu pour adultes. Auparavant, un simple “oui” cliqué suffisait pour déclarer avoir plus de 18 ans.
Contrôle d’âge : un pare-feu contournable en un clic
Mais cette offensive réglementaire soulève une faille béante : l’inefficacité structurelle du dispositif face aux outils numériques contournant les restrictions. L’usage des VPN, accessibles gratuitement ou pour quelques euros par mois seulement, permet en effet de masquer son pays d’origine ou de simuler une autre localisation. En clair, un adolescent français peut apparaître comme un internaute mexicain et ainsi accéder sans contrôle aux plateformes bloquées.
Autre point faible : la prolifération de sites hors Europe qui ne sont pas concernés par les lois européennes. Tant que des géants comme Pornhub, X ou Telegram ne sont pas soumis à une régulation transfrontalière, l’application ne pourra qu’agir sur une minorité d’acteurs.
La députée européenne Clara Chappaz, engagée sur ce dossier, rappelle pourtant : « Le but est de responsabiliser les plateformes, pas de traquer les mineurs », relaye Le Point. Mais comment responsabiliser un site basé en Californie, ou un serveur russe hébergeant du contenu non modéré ? L’ambition affichée semble déjà minée par un déséquilibre technologique et juridique.
Les réseaux sociaux, prochaine cible d’un verrouillage générationnel
Au-delà de la pornographie, les réseaux sociaux pourraient bientôt être soumis à des règles similaires. Selon Le Figaro, Bruxelles prépare un cadre permettant d’interdire l’accès aux plateformes sociales aux moins de 15 ans. Une révolution en perspective pour TikTok, Instagram ou Snapchat, dont les audiences reposent largement sur la tranche 10-17 ans. Le projet européen prévoit de contraindre les entreprises à vérifier l’âge de chaque nouvel utilisateur de manière fiable. Et pour celles qui refuseraient ? Des amendes dissuasives, jusqu’à 6 % du chiffre d’affaires mondial. Mais là encore, les spécialistes de la protection de la vie privée tirent la sonnette d’alarme. Le dispositif pourrait déboucher sur une surveillance généralisée, où chaque internaute se verrait obligé de prouver son identité pour accéder à un service. Une inquiétude que les pouvoirs politiques ne semblent pas en mesure de calmer.
Derrière le vernis technologique, le contrôle de l’âge en ligne semble surtout répondre à une pression politique croissante. Face aux inquiétudes parentales, à l’hyperexposition des enfants aux écrans et aux risques psychologiques liés à certains contenus, les États cherchent une solution visible, rapide et centralisée.
Un système d’âge qui prend déjà un coup de vieux ?
En l’état, l’application européenne de vérification de l’âge ressemble davantage à une expérimentation symbolique qu’à un changement de paradigme numérique. Elle pose plus de questions qu’elle n’apporte de réponses concrètes : Qui vérifiera les vérificateurs ? Quelles garanties face au fichage ? Et surtout : à quoi sert un contrôle d’accès si la porte d’à côté reste grande ouverte ?