Surtourisme : la France sous pression face à l’afflux de visiteurs

La France est largement touchée par le surtourisme, ce phénomène où la fréquentation dépasse la capacité d’accueil des lieux. Depuis la crise du Covid-19, l’afflux de visiteurs s’est accentué, autant dans les petits bourgs que dans les grandes agglomérations.

Stephanie Haerts
By Stéphanie Haerts Published on 7 juillet 2025 11h00
Surtourisme : la France sous pression face à l’afflux de visiteurs
Surtourisme : la France sous pression face à l’afflux de visiteurs - © Economie Matin

Quand le surtourisme déborde

La France, première destination touristique mondiale avec 100 millions de visiteurs internationaux en 2024, semble incapable de digérer son succès. Selon Statista, 80 % du tourisme se concentre sur seulement 20 % du territoire. Une disproportion flagrante, symptomatique d’un tourisme mal réparti, mal régulé, et souvent mal compris. C’est dans ce contexte que la start-up Ville de rêve a mis au point un indicateur révélateur, le Touriscore, qui évalue la pression touristique dans 331 communes de plus de 10 000 habitants.

91 villes affichent un score critique (D ou E). Parmi elles, des poids lourds comme Cannes, Nice, Annecy, mais aussi des communes plus modestes comme Arras ou Épernay. Et le phénomène ne concerne pas seulement les zones balnéaires ou les sites emblématiques. Le Mont-Saint-Michel, 30 habitants à l’année, a accueilli 3 millions de touristes en 2024. À Annecy, on dénombre 700 bars et restaurants au kilomètre carré. À Cannes, 25 % des logements sont des Airbnb. À Nice ou Annecy, ce taux atteint 11 %. « Le fait que la thématique du surtourisme arrive dans les villes, c’est assez récent parce qu’il y a eu une explosion du nombre d’Airbnb. En dix ans, on est passé d’environ 200 000 à 800 000 », explique Jérôme Devouge, fondateur de Ville de rêve dans The Huffington Post.

Airbnb et ses déséquilibres

L’essor des plateformes de location meublée a provoqué une véritable mutation de l’écosystème urbain. Dans les centres-villes patrimoniaux, l’explosion d’Airbnb raréfie l’offre locative traditionnelle, pousse les habitants à s’exiler en périphérie, et favorise l’installation d’une économie strictement tournée vers les visiteurs de passage. Résultat ? Des commerces de proximité remplacés par des boutiques de souvenirs, des supérettes par des bars, des quartiers devenus musées à ciel ouvert où vivre devient une épreuve.

Jérôme Devouge résume ainsi dans The Huffington Post : « Quand vous avez 700 bars et restaurants au kilomètre carré dans des villes comme Annecy, c’est démentiel par rapport à la capacité réelle de la ville ». Cette urbanisation touristique ne relève pas d’un accident mais d’un modèle systémique. Le problème, c’est qu’il est devenu hors de contrôle.

La France étouffe, les limites nationales

Face à la saturation, certains territoires tentent de reprendre le contrôle. L’île de Bréhat, en Bretagne, 400 habitants pour 450 000 touristes en été, applique depuis trois ans des quotas. Pour l’été 2025, un arrêté limite l’accès à 4 700 visiteurs par jour, entre le 28 juillet et le 22 août. Même logique de préservation dans les calanques de Sugiton près de Marseille, sur l’île de Porquerolles dans le Var, ou dans les îles Lavezzi en Corse. Le mot d’ordre, respirer un peu. À l’échelle nationale, une campagne lancée en 2023 cherche à rediriger les flux vers des zones moins fréquentées et à promouvoir un tourisme « quatre saisons », mieux réparti dans le temps et l’espace.

L’objectif est clair, éviter l’asphyxie des sites surmédiatisés. Mais là encore, le remède semble timide. Les réglementations peinent à suivre l’intensité de la fréquentation. Jérôme Devouge alerte : « Il ne faut pas seulement pointer le doigt sur les touristes, il faut aussi garder en tête que pour protéger les habitants, il faut une réglementation qui ait un impact structurel sur eux ». C’est ainsi que des discussions se multiplient autour de la régulation des meublés touristiques : durée maximale de location, taxation, encadrement des plateformes.

Stephanie Haerts

Rédactrice dans la finance et l'économie depuis 2010. Après un Master en Journalisme, Stéphanie a travaillé pour un courtier en ligne à Londres où elle présentait un point bourse journalier sur LCI. Elle rejoint l'équipe d'Économie Matin en 2019, où elle écrit sur des sujets liés à l'économie, la finance, les technologies, l'environnement, l'énergie et l'éducation.

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