Urbanisme : la loi ZAN (zéro artificialisation nette) termine dans la poubelle de l’histoire (et les ZFE avec)

Un vote serré, un clivage partisan inédit et des conséquences lourdes pour les villes françaises : le sort des Zones à Faibles Émissions (ZFE) vient de basculer à l’Assemblée nationale avec un vote historique sur la loi ZAN.

Paolo Garoscio
By Paolo Garoscio Published on 18 juin 2025 7h48
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Vignette Crit’Air : le sésame pour entrer dans les ZFE arrive pour ces véhicules ! - © Economie Matin
59%59% des Français pensent qu'il y a trop de ZFE.

Mardi 17 juin 2025, l’Assemblée nationale a adopté en première lecture le projet de loi dit de « simplification de la vie économique », comprenant l'article emblématique abrogeant les Zones à Faibles Émissions (ZFE). Le texte a été voté par 275 députés contre 252, dans une atmosphère électrique, marquée par une fracture nette entre les groupes parlementaires.

Instaurées pour lutter contre la pollution atmosphérique en ville, les ZFE imposaient jusqu’ici des restrictions de circulation aux véhicules jugés trop polluants selon la vignette Crit’Air. Ces zones, déjà en vigueur dans plusieurs agglomérations comme Marseille, Lyon ou Paris, devaient s’étendre dans les années à venir à près de 45 métropoles françaises.

Loi ZAN : la fin des ZFE votée par une Assemblée nationale très divisée

Le vote du 17 juin 2025 a illustré une division inhabituelle du paysage politique. La droite parlementaire, le Rassemblement national, les députés Horizons et du MoDem ont soutenu le texte. Le groupe présidentiel Ensemble pour la République (EPR) s’y est majoritairement opposé, tout comme les groupes de gauche (LFI, PS, Écologistes), souligne BFMTV.

Selon les compte-rendus officiels de l’Assemblée nationale sur les débats ayant précédé le vote, ce désaccord s’est cristallisé autour de l’amendement déposé en commission spéciale par des élus Les Républicains, soutenu ensuite par des députés RN, supprimant purement et simplement le dispositif des ZFE. « Vous avez détourné un projet de loi technique en instrument idéologique contre l’écologie des villes », a lancé la députée PS Christine Pirès-Beaune dans l’hémicycle.

La députée du groupe EPR Anne-Laure Blin a déclaré en séance : « Nous voulons une transition écologique responsable, pas punitive. Supprimer les ZFE, ce n’est pas refuser l’écologie, c’est refuser une écologie de la culpabilisation. »

Fin des ZFE : Que va-t-il changer concrètement pour les automobilistes ?

Si le texte est définitivement adopté en Commission Mixte Paritaire (CMP), les communes ne seront plus tenues d’imposer des restrictions de circulation sur la base des vignettes Crit’Air. La métropole d’Aix-Marseille-Provence, par exemple, avait interdit dès 2022 les véhicules Crit’Air 5 et 4. Cette interdiction pourrait être levée, ouvrant à nouveau la circulation aux véhicules anciens.

En parallèle, plusieurs aides avaient été mises en place localement, comme l’« aide ZFE » proposée par certaines intercommunalités pour financer le changement de véhicule. Ces dispositifs risquent de disparaître ou d’être profondément remaniés puisque, de fait, ils deviennent inutiles.

Des conséquences économiques et juridiques sous surveillance

Un rapport de la Direction Générale du Trésor, cité dans les débats parlementaires, estimait que la suppression des ZFE pourrait coûter à la France environ trois milliards d’euros, en raison de possibles pénalités européennes pour non-respect des normes de qualité de l’air. Ce retrait remettrait également en cause l’obtention de certains fonds européens destinés à la transition écologique.

La suppression des ZFE pourrait fragiliser les engagements climatiques pris dans le cadre du plan national Santé-Environnement (PNSE 4), qui prévoyait une réduction drastique des concentrations de particules fines et de dioxyde d’azote en zone urbaine.

L’ultime étape législative : la Commission Mixte Paritaire

L’adoption en première lecture ne constitue pas encore l’aboutissement du processus législatif. Le texte est désormais entre les mains d’une commission mixte paritaire (CMP), composée de sept députés et sept sénateurs. Celle-ci devra s’accorder sur une version commune du projet de loi. Selon la chaîne parlementaire LCP, cette étape aura lieu à la rentrée de septembre 2025, en prévision d’une promulgation possible à l’automne. L’incertitude demeure : la majorité présidentielle pourrait s’opposer à la version actuelle du texte. Si aucun compromis n’est trouvé, un nouveau passage devant les deux chambres sera requis.

Et attention, les soutiens des ZFE pourraient se lancer dans une bataille d’usure, en saisissant les plus hautes instances. Comme, par exemple, le Conseil Constitutionnel, comme l'a souligné le président du groupe Horizons, Paul Christophe, selon Le Monde.

Paolo Garoscio

Rédacteur en chef adjoint. Après son Master de Philosophie, il s'est tourné vers la communication et le journalisme. Il rejoint l'équipe d'EconomieMatin en 2013.   Suivez-le sur Twitter : @PaoloGaroscio

1 comment on «Urbanisme : la loi ZAN (zéro artificialisation nette) termine dans la poubelle de l’histoire (et les ZFE avec)»

  • RENARD

    Enfin, une députée intelligente..
    La députée du groupe EPR Anne-Laure Blin a déclaré en séance : « Nous voulons une transition écologique responsable, pas punitive. Supprimer les ZFE, ce n’est pas refuser l’écologie, c’est refuser une écologie de la culpabilisation. »

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