Pétrole : pic de consommation en 2030 et ensuite la baisse

Les prévisions de l’AIE sur la consommation de pétrole viennent de tomber, et elles bouleversent les certitudes. Ce que certains présentaient encore comme un fantasme se profile désormais dans les chiffres officiels. Une rupture semble imminente, et elle porte un nom : le pic pétrolier.

Paolo Garoscio
By Paolo Garoscio Published on 18 juin 2025 6h08
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petrole-baisse-prix-opep-reduction-production - © Economie Matin
76,75 DOLLARSEn Bourse, le pétrole Brent affiche 76,75 dollars le baril le 18 juin 2025.

Le 17 juin 2025, l’Agence internationale de l’énergie (AIE) a publié de nouvelles perspectives qui marquent un tournant dans l’histoire de la consommation mondiale de pétrole. Selon ces données, la demande d’or noir devrait atteindre un sommet en 2029 avant de commencer à décroître dès 2030. Cette projection confirme un changement structurel majeur dans l’économie mondiale de l’énergie, avec des implications durables pour le marché mondial et les politiques publiques.

Une baisse historique de la consommation de pétrole dès 2030

Selon les dernières prévisions de l’AIE, la consommation mondiale de pétrole devrait enregistrer une légère baisse en 2030, atteignant environ 105,5 millions de barils par jour, après un pic de 105,57 millions de barils en 2029. C’est une première depuis la crise du Covid-19 en 2020. Dans son rapport, l’agence précise : « La demande mondiale de pétrole atteindra un sommet avant 2030, pour ensuite entamer un déclin progressif. »

Les États-Unis, premier consommateur mondial, amorceront cette baisse dès 2026, suivis de la Chine en 2028. L’Arabie saoudite, pourtant membre influent de l’OPEP, devrait connaître la plus forte diminution en termes absolus d’ici à 2030. Cette chute s’explique par la substitution du pétrole par le gaz naturel et les énergies renouvelables dans la production d’électricité, selon les analystes de l’agence.

Une tendance de fond portée par l’électrification et les tensions économiques

Ce retournement n’est pas accidentel. Il résulte de dynamiques multiples :

  • L’essor des véhicules électriques, de plus en plus largement adoptés dans les pays développés.
  • Un contexte géopolitique instable, marqué par les tensions entre grandes puissances.
  • Un ralentissement de la croissance économique mondiale.
  • La montée en puissance des politiques publiques en faveur des énergies décarbonées.

Le rapport souligne : « L’énergie propre couvre pratiquement toute la croissance de la demande d’énergie entre 2023 et 2035, provoquant un pic global de la demande pour les trois combustibles fossiles avant 2030. » La projection climatique associée reste néanmoins préoccupante : « Dans les conditions politiques actuelles, le monde est toujours en voie de connaître une hausse de température moyenne de 2,4 °C d’ici 2100. » En somme, même si la consommation de pétrole, selon AIE, devrait commencer à baisser dès 2030, le monde n’est pas sorti de l’auberge et les risques liés au réchauffement climatique ne vont pas se réduire.

Pétrole : Une opposition frontale entre l’AIE et l’OPEP

Mais tout le monde ne partage pas cette vision. L’Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP) continue de nier l’imminence du pic pétrolier. Lors de la conférence Énergie Asie à Kuala Lumpur, le secrétaire général Haitham Al-Ghais a déclaré : « La théorie du pic pétrolier s’est révélée fausse encore et encore. », relaye le site Connaissance des Énergies. L’organisation table au contraire sur une hausse continue de la demande, avec une augmentation projetée de 1,3 million de barils par jour en 2025 et 2026.

Cette divergence met en lumière deux lectures du futur : d’un côté, un monde engagé vers la transition énergétique, de l’autre, des producteurs qui misent encore sur la croissance ininterrompue des besoins en pétrole. Pour eux, c’est une nécessité : les pays producteurs de pétrole tirent de l’or noir une grande partie de leurs revenus. Si le pic de consommation survient, ils risquent de se retrouver en difficultés.

Des marchés appelés à se restructurer en profondeur

Le marché pétrolier mondial entre ainsi dans une période de mutation, où l’offre pourrait bientôt dépasser largement la demande. « L’offre mondiale de pétrole va croître plus rapidement que la demande dans les prochaines années », observe l’AIE dans son rapport de juin 2025 cité par Le Figaro. Cette évolution pourrait avoir des conséquences économiques considérables : baisse durable des cours du pétrole, recomposition géopolitique autour de la rente pétrolière, et redistribution des investissements énergétiques vers des sources alternatives.

À l’échelle de la planète, le mouvement est enclenché. Si la baisse reste modeste en volume, son symbolisme est colossal : pour la première fois depuis l’industrialisation massive du XXe siècle, la consommation de pétrole pourrait amorcer une décroissance structurelle. L’histoire du pétrole entre dans une nouvelle phase. Le début de la fin...

Paolo Garoscio

Rédacteur en chef adjoint. Après son Master de Philosophie, il s'est tourné vers la communication et le journalisme. Il rejoint l'équipe d'EconomieMatin en 2013.   Suivez-le sur Twitter : @PaoloGaroscio

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