Le 14 mai 2025, l’Assemblée nationale a adopté une proposition de loi visant à interdire le démarchage téléphonique sans consentement préalable. Si le Sénat confirme le texte – ce qui est quasi certain –, la nouvelle réglementation entrera en vigueur le 11 août 2026. Loin d’être un simple ajustement, il s’agit d’un renversement total du paradigme légal : désormais, seuls les appels explicitement autorisés par les consommateurs seront autorisés.
Démarchage téléphonique : l’interdiction de principe votée par l’Assemblée nationale

Première victoire contre le démarchage téléphonique : un long combat législatif
Le démarchage téléphonique, cette pratique commerciale invasive, a longtemps bénéficié d’un flou juridique savamment entretenu. Les dispositifs comme Bloctel, censés protéger les abonnés, n’ont guère fait illusion. Malgré l’inscription sur cette liste censée interdire les appels commerciaux, des millions de Français continuaient à recevoir plusieurs appels indésirables par jour. « Nos concitoyennes et concitoyens n’en peuvent plus de ce harcèlement », s’est d'ailleurs insurgée Delphine Batho, députée écologiste des Deux-Sèvres, fer de lance de cette proposition de loi.
Cette proposition n’est pas née d’un caprice conjoncturel. Depuis plus d’un an, les auditions parlementaires se succédaient. Le Sénat avait déjà validé le texte lors d’un vote en avril 2025. L’Assemblée vient de lui donner le feu vert. Le dernier obstacle reste le vote de confirmation du 21 mai 2025, mais tout indique que ce sera une formalité.
Démarchage téléphonique : une interdiction encadrée mais différée
Le cœur du texte repose sur un principe simple : plus aucun démarchage téléphonique ne sera légal sans un consentement explicite préalable. En clair, pour qu’une entreprise puisse vous appeler à des fins commerciales, il faudra :
- soit que vous ayez donné un accord formel, clair et éclairé, dans un cadre précis ;
- soit que vous soyez déjà client de cette entreprise, et que l’appel concerne un produit ou service en lien direct avec un contrat en cours.
Finis les numéros masqués et les appels à 19h42 pour une pompe à chaleur ou une complémentaire santé. L’objectif est clair : inverser la charge de la preuve et interdire les sollicitations sauvages, qui prolifèrent notamment dans les secteurs de la rénovation énergétique, des assurances ou de la téléphonie.
Mais la mise en œuvre tarde. La loi n’entrera en vigueur que le 11 août 2026, soit près de quinze mois après son adoption. Un délai que regrette Delphine Batho : « Je regrette le report de l’entrée en vigueur de l’interdiction. L’impatience est énorme, tant nos concitoyens n’en peuvent plus de ce harcèlement ».
L’ombre des dérogations plane néanmoins
Si le texte semble solide sur le papier, sa portée réelle dépendra de l’exécution. Deux brèches risquent de fragiliser la belle mécanique annoncée :
- L’exception contractuelle : une entreprise pourra toujours contacter un consommateur si un contrat les lie déjà. Cette faille pourrait être exploitée pour élargir artificiellement les prestations « liées ».
- Le consentement préalable : en théorie, il doit être « libre, spécifique, éclairé, univoque et révocable ». Mais dans la pratique, de nombreux sites et applications piègent encore l’internaute, dissimulant des cases pré-cochées ou des CGU floues.
Autant dire qu’il faudra une vigilance accrue de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (Cnil) et des associations de défense des consommateurs pour empêcher un retour en douce du démarchage par des voies détournées.