Le ciel ne cesse de nous surprendre. Entre hypothèses troublantes et molécules inattendues, une planète lointaine ravive la plus vieille des questions humaines. Et si nous n’étions pas seuls ? Une nouvelle découverte semble aller dans le sens de celles et ceux qui croient que nous ne sommes en effet pas seuls dans cet univers.
Exoplanète K2-18 b : des traces de vie dans l’atmosphère ?
Le 16 avril 2025, une découverte a secoué le monde de l’astronomie : des chercheurs ont détecté des composés chimiques susceptibles d’être liés à une activité biologique sur une exoplanète située à 120 années-lumière de la Terre. La planète K2-18 b, déjà connue pour ses caractéristiques atypiques, se retrouve aujourd’hui au cœur des spéculations sur une vie extraterrestre. Derrière cette percée, une équipe dirigée par le Pr Nikku Madhusudhan, astrophysicien à l’Université de Cambridge, dont les travaux pourraient bien représenter un tournant historique dans la quête de l'inconnu.
Des traces chimiques révélatrices de la vie sur une planète extraterrestre
L’objet de toutes les attentions, K2-18 b, est ce qu’on appelle une « Hycean planet » : un type d’exoplanète théorique doté d’une atmosphère riche en hydrogène et recouverte d’un vaste océan. Elle se situe dans la zone habitable de son étoile, c’est-à-dire là où l’eau pourrait exister sous forme liquide.
Ce n’est pas la première fois que cette planète attire l’œil des chercheurs. En 2019, le télescope Hubble avait déjà révélé la présence de vapeur d’eau. Mais c’est grâce au télescope spatial James Webb (JWST) que l’histoire prend un tournant radical. Grâce à deux transits stellaires enregistrés par les instruments NIRISS et NIRSpec, les chercheurs ont capté les signatures spectrales de composés carbonés dans l’atmosphère de la planète.
Selon l’article publié par l’ESA le 11 septembre 2023, l’analyse révèle « la présence de méthane (CH₄), de dioxyde de carbone (CO₂), et l’absence notable d’ammoniac (NH₃) ». Ce cocktail chimique alimente l’hypothèse d’un océan liquide sous une atmosphère dense et légère, potentiellement propice à l’émergence de formes de vie.
Mais la véritable bombe vient de la détection possible de diméthylsulfure (DMS), une molécule connue pour n’être produite, sur Terre, que par des êtres vivants, principalement du phytoplancton marin. « La majeure partie du DMS présent dans l’atmosphère terrestre est émise par le plancton marin », précise le rapport de l’ESA.
Une découverte scientifique sans précédent, mais pas une preuve de vie extraterrestre
Faut-il pour autant crier à la vie extraterrestre ? Les scientifiques eux-mêmes restent prudents. Si la découverte du DMS se confirme, elle marquerait un jalon fondamental. Mais pour le moment, ce signal demeure statistiquement insuffisant pour constituer une preuve. L’analyse repose sur un seuil de confiance de trois sigma, soit une probabilité de 0,3 % que le résultat soit dû au hasard. Loin des cinq sigma requis pour parler de découverte en physique fondamentale.
« C’est la preuve la plus solide à ce jour d’une activité biologique au-delà du système solaire », affirme cependant le Pr Madhusudhan dans The Guardian, avant d’ajouter : « Nous devons nous interroger autant sur la réalité du signal que sur sa signification. »
Le chercheur pousse même la réflexion plus loin : « Il est possible que, dans quelques décennies, nous considérions ce moment comme celui où l’univers vivant est devenu accessible. Cela pourrait être le point de bascule, celui où la question fondamentale de savoir si nous sommes seuls devient enfin accessible. »
L’exobiologie en ébullition face à l’exoplanète K2-18 b
Le monde scientifique reste divisé. Pour certains chercheurs, les composés détectés pourraient également résulter de phénomènes non biologiques, comme des volcans, des orages ou des réactions chimiques inconnues. D’autres avancent l’idée que le DMS pourrait avoir été apporté par des comètes – hypothèse jugée peu probable au vu de l’intensité nécessaire d’un tel bombardement.
La BBC rappelle également que « le signal chimique détecté serait des milliers de fois plus élevé que ce qu’on observe sur Terre ». Une abondance difficile à expliquer par des mécanismes géologiques connus, mais qui ne constitue pas une certitude de vie pour autant.
La composition même de K2-18 b reste sujette à controverse. Tandis que le camp du Pr Madhusudhan plaide pour un monde océanique, d'autres équipes envisagent une planète gazeuse ou riche en magma, ce qui exclurait toute forme de vie telle que nous la connaissons. « Nous devons rigoureusement exclure toutes les autres hypothèses avant de pouvoir parler de vie », prévient la chercheuse Nora Hänni dans The Guardian.
James Webb : le télescope qui nous dévoile tout
Cette avancée n’aurait jamais été possible sans le télescope spatial James Webb, dont la précision spectrale inégalée a permis de détecter les composés en question avec seulement deux transits stellaires. « Un seul transit avec Webb a offert la même précision que huit observations réalisées avec Hubble sur plusieurs années », explique Madhusudhan à l’ESA.
La capacité du JWST à analyser la lumière filtrée à travers l’atmosphère d’exoplanètes ouvre un nouveau chapitre pour l’astronomie. Selon l’ESA, d’autres observations sont prévues avec l’instrument MIRI, permettant une validation plus fine des données recueillies. Cette mission, soutenue par l’Agence spatiale européenne (ESA) qui a fourni une partie des instruments embarqués, sera renforcée en 2029 par la mission Ariel, qui explorera en profondeur l’atmosphère de centaines d’exoplanètes.
Une vie extraterrestre… statistiquement probable ?
À ce stade, rien ne prouve que la vie existe sur K2-18 b. Mais si les molécules détectées s’avèrent effectivement d’origine biologique, le changement de paradigme sera immense. Comme l’a déclaré Madhusudhan dans The Indian Express : « Si nous confirmons qu’il y a de la vie sur K2-18 b, cela reviendra à confirmer que la vie est très commune dans la galaxie. »
La prudence reste de mise. Comme l’a formulé avec justesse la planétologue Jo Barstow, dans The Guardian : « Mon scepticisme est toujours à son maximum lorsqu’il s’agit de prétendre avoir trouvé la vie. Non parce que je n’y crois pas, mais parce qu’un tel bouleversement demande une preuve irréfutable. »