Sur 4.726 promotions relevées dans les catalogues de Carrefour, Leclerc, Intermarché, Lidl et Système U par un collectif d’associations (dont la Confédération Syndicale des Familles, l’Union Nationale des Associations Familiales et Foodwatch), deux tiers concernent des produits que le Programme National Nutrition Santé (PNNS) recommande de limiter. Seulement 12 % des promotions promeuvent des aliments bénéfiques pour la santé.
Supermarchés : les produits sains représentent seulement 12% des promotions
Les produits reconnus comme sains par le PNNS ne représentent que 12% des promotions
Dans les allées lumineuses des supermarchés, les promotions s’affichent en grand, accrocheuses et prometteuses d’économies. Mais que cachent réellement ces étiquettes rouges et jaunes ? D'après une enquête d'un collectif d'associations (dont la Confédération Syndicale des Familles, l'Union Nationale des Associations Familiales et Foodwatch), ce sont les aliments ultra-transformés, les charcuteries, les sodas et les produits de Nutri-Score « D » ou « E » qui raflent la majorité des promotions. À eux seuls, les produits ultra-transformés représentent 47% de toutes les promotions relevées. Les produits classés « D » ou « E » par le Nutri-Score s’en tirent avec 39%. Quant à la charcuterie et la viande rouge, elles cumulent 17% des promotions. Des chiffres encore plus élevés dans certains cas : Lidl, par exemple, concentre 72% de ses promotions sur des produits « à réduire », un record parmi les enseignes analysées. Elle est aussi l’enseigne la plus généreuse en produits ultra-transformés (52%), et celle qui promeut le plus les produits de Nutri-Score « D » ou « E » (47%).
À l’opposé, les produits reconnus comme sains par le PNNS — fruits et légumes, légumineuses, céréales complètes, huiles de qualité — peinent à atteindre le seuil de visibilité. Ils ne représentent que 12% de l’ensemble des promotions. Dans le détail, les fruits et légumes frais arrivent en tête avec 6% des promotions, suivis par les fruits et légumes transformés (compotes, surgelés) à hauteur de 4%. Les autres catégories, comme les huiles végétales ou les céréales complètes, ne dépassent jamais le seuil d’1%. Lidl, encore une fois, ne propose aucune promotion sur les huiles végétales recommandées (colza, noix, olive), et Leclerc est en queue de peloton pour les fruits et légumes avec seulement 8 % de promotions sur cette catégorie.
Les produits bio ne représentent que 5% des promotions recensées
Le déséquilibre ne s’arrête pas là. En matière de stratégies commerciales, l’étude révèle que 60% des promotions sont conçues pour inciter à l’achat en grande quantité. « Deux achetés, un offert », « le deuxième à -50 % »... : autant de formules qui, loin de favoriser la modération, poussent à la surconsommation. Sur les 1.975 promotions identifiées comme des incitations au volume, la majorité concerne encore une fois des produits « à réduire ». Carrefour est l’exemple le plus parlant : près de 7 promotions sur 10 incitent à l’achat en volume, contre seulement 32% qui misent sur une réduction directe de prix. À l’inverse, Lidl affiche une répartition plus équilibrée entre réduction unitaire et offre par lots.
La question des produits bio, souvent perçus comme un repère de qualité, n’est guère plus rassurante. Ils ne représentent que 5% des promotions recensées. Et dans cette fraction déjà faible, plus de la moitié concerne des produits classés comme « à réduire ». La part des produits bio « à favoriser » plafonne à 1,29%. Carrefour est l’enseigne la plus généreuse avec 2% de produits bio à consommer davantage, tandis que Leclerc et Lidl n’en proposent qu’1%.
Ce décalage entre les recommandations de santé publique et les choix promotionnels des enseignes n’est pas anodin. Il influence massivement les comportements d’achat. Une étude NielsenIQ menée en 2022 révélait que 60% des consommateurs reconnaissaient adapter leurs achats aux promotions. Selon un sondage plus récent commandé par le Réseau Action Climat en mars 2025, 88% des Français souhaitent que les supermarchés mettent en avant les produits bons pour la santé, notamment les fruits, les légumes et les légumineuses. Un vœu resté lettre morte, comme en témoigne la faiblesse des chiffres observés.
Les associations demandent qu'au moins 50% des promotions concernent des produits sains
Les associations à l’origine de l’enquête appellent à un changement radical des pratiques. Elles demandent que 50% des promotions concernent des produits « à augmenter » selon le PNNS, et que 10% des produits promus soient issus de l’agriculture biologique, non ultra-transformés. Cette exigence repose sur un triple objectif : améliorer l’état de santé de la population, alléger la pression sur les systèmes de soins et favoriser une alimentation durable. Elles pointent aussi la responsabilité des distributeurs dans la formation des prix, réclamant plus de transparence sur les marges, une juste rémunération des producteurs et un soutien aux consommateurs modestes.
Dans le contexte actuel d’inflation persistante et de crise alimentaire, ces chiffres résonnent comme un signal d’alarme. Les supermarchés ne peuvent plus prétendre défendre à la fois le pouvoir d’achat et la santé publique tout en promouvant massivement les produits les moins recommandables. Les outils existent, les leviers aussi. Il ne manque que la volonté d’agir.