Alors que le monde surveille de près la progression du virus de l’influenza aviaire (grippe) hautement pathogène, la France ne fait pas exception. Les autorités sanitaires françaises, en alerte depuis plusieurs mois, intensifient leurs efforts pour anticiper une éventuelle mutation du virus qui pourrait le rendre transmissible entre humains.
Grippe aviaire : la France se prépare-t-elle à une nouvelle pandémie ?

Le 6 février 2025, le ministère de l’Agriculture et de la Souveraineté alimentaire a publié un communiqué alarmant sur l’évolution d'un virus en France et dans le monde. Si le risque de transmission à l’Homme est toujours considéré comme faible, l’augmentation des cas de grippe aviaire observés dans certains pays, notamment aux États-Unis, impose un renforcement des mesures de surveillance et de prévention. Face à cette menace, la France mise sur une approche coordonnée entre les différents acteurs de la santé publique et du monde vétérinaire.
Grippe aviaire : une menace sous surveillance renforcée
La grippe aviaire en circulation depuis plusieurs années, touche principalement les oiseaux sauvages et domestiques. Les autorités sanitaires internationales constatent une évolution préoccupante : une augmentation des transmissions à l’Homme. Bien que ces cas restent isolés et sans transmission interhumaine avérée, les instances de santé redoublent de vigilance.
Selon le ministère de l’Agriculture, plusieurs espèces de mammifères ont déjà été infectées par le virus, dont des phoques, loutres, visons et renards. Plus inquiétant encore, des cas ont été détectés dans des élevages bovins aux États-Unis, confirmant la capacité du virus à s’adapter à de nouveaux hôtes. Une mutation facilitant la transmission entre mammifères, et donc potentiellement à l’Homme, ne peut être exclue. « Nous avons une très bonne vision de ce qui circule dans la faune sauvage et les élevages. Tous les virus détectés sont analysés afin de confirmer ou non leur caractère hautement pathogène. » a déclaré Nicolas Eterradossi, directeur du laboratoire national de référence sur l’influenza aviaire (FranceInfo).
La France a décrété un niveau de risque "élevé" pour ce virus depuis le 9 novembre 2024, le plus haut niveau d’alerte sanitaire. Cette décision, prise par arrêté ministériel, impose un renforcement des mesures de protection et de surveillance, notamment dans les zones à risque.
Une stratégie préventive qui repose sur la vaccination et la surveillance
Face à la menace, la France mise sur une surveillance accrue et une vaccination ciblée pour éviter une propagation incontrôlée de la grippe aviaire.
Depuis octobre 2023, tous les canards d’élevage doivent être vaccinés contre l’IAHP. Une mesure unique en Europe, qui commence à porter ses fruits. En un an, 62 millions de canards ont été vaccinés, entraînant une chute drastique des foyers d’infection en élevage. Alors qu’en 2021-2022, la France avait enregistré environ 1 400 foyers d’infection dans ses élevages, ce chiffre avait déjà diminué à 400 pour la période 2022-2023. En 2023-2024, seuls dix foyers ont été détectés, ce qui démontre l’efficacité de la vaccination. Le ministère de l’Agriculture se félicite de cette avancée, expliquant que la réduction du nombre de foyers d’infection dans les élevages diminue le risque de transmission aux professionnels exposés et à la population générale.
Une surveillance renforcée des élevages et de la faune sauvage
La vaccination ne suffit pas et doit être accompagnée d’une surveillance accrue des élevages et de la faune sauvage. Des tests PCR gratuits sont désormais accessibles aux professionnels les plus exposés, notamment les éleveurs et les vétérinaires, afin de détecter rapidement toute présence du virus. La surveillance des oiseaux migrateurs a été renforcée, ceux-ci étant les principaux vecteurs du virus sur de longues distances. Nicolas Eterradossi rappelle l'importance de cette mesure, précisant que les espèces sensibles comme les mouettes et les goélands font l’objet d’un suivi spécifique.
Préparer l’avenir : un dispositif en cas de pandémie humaine
Le plan de prévention intègre la constitution de stocks de vaccins pour les populations à risque et un approvisionnement en antiviraux capables de traiter rapidement les personnes infectées. L’objectif est de garantir une réponse immédiate en cas d’apparition d’une souche transmissible entre humains. Ces stocks comprennent des vaccins destinés aux personnes en contact avec un foyer épidémique, ainsi qu’une réserve d’antiviraux pour limiter la transmission et traiter les malades. Afin d’éviter l’engorgement des hôpitaux, un plan de planification sanitaire, appelé plan ORSAN, a été mis en place pour assurer une répartition efficace des ressources médicales et des capacités hospitalières en cas de crise.
Une coordination des autorités sanitaires
L’approche "One Health" adoptée par la France repose sur la coopération entre les spécialistes de la santé animale et humaine. L’objectif est simple : éviter que le virus franchisse la barrière des espèces. Marie-Anne Rameix-Welti, responsable du Centre national de référence des infections respiratoires à l’Institut Pasteur, souligne que la montée de la pression impose une surveillance rigoureuse de toute mutation qui faciliterait la transmission à l’Homme.