Un ancien PDG d’EDF veut arrêter les éoliennes

Henri Proglio relance le débat énergétique en France avec une série de propositions radicales. En ligne de mire : le marché européen, l’ARENH, les éoliennes. Et une ambition affichée : redonner à EDF sa puissance d’autrefois, au service d’une électricité moins chère et plus stable.

Ade Costume Droit
By Adélaïde Motte Published on 24 juin 2025 12h00
Ancien Pdg Edf Veut Arreter Eoliennes
Un ancien PDG d’EDF veut arrêter les éoliennes - © Economie Matin

Le 24 juin 2025, Henri Proglio, ancien président-directeur général d’EDF, a dressé un réquisitoire frontal contre le fonctionnement actuel du marché de l’électricité en France. En s’attaquant aux piliers du système — le marché européen, l’ARENH, les énergies renouvelables — il propose de remettre EDF au cœur d’un modèle étatique, souverain, fondé sur le nucléaire. Une rupture assumée avec la stratégie du gouvernement.

EDF doit abandonner les éoliennes

Pour Henri Proglio, le diagnostic est sans appel : les éoliennes — terrestres comme maritimes — sont trop coûteuses, trop variables et « incompatibles avec un réseau stable et pilotable ». Il propose de « les arrêter complètement, d’autant plus que leur production n’est pas stockable et impose des compléments fossiles ». Aujourd’hui, la France mise sur un développement massif des renouvelables pour respecter les objectifs climatiques européens. Ce qu'Henri Proglio conteste : « La priorité devrait être donnée au nucléaire, non aux énergies aléatoires subventionnées. »

Son argument est économique autant que stratégique : selon lui, ces filières aggravent l’instabilité des prix sur les marchés. Les éoliennes génèrent de l’électricité en dehors des besoins de consommation, provoquant des surproductions mal valorisées. Il en résulte une volatilité des prix que le nucléaire, plus constant, pourrait éviter.

Sortir du marché européen de l’électricité : une rupture assumée

L’ancien dirigeant d’EDF propose également de « sortir la France du marché européen de l’électricité ». Une idée que peu de responsables avaient jusque-là osé formuler aussi clairement. Ce marché, fondé sur le principe du prix marginal, contraint EDF à vendre son électricité au tarif dicté par l’énergie la plus coûteuse disponible à l’instant T — souvent du gaz. Résultat : même le courant nucléaire à bas coût est vendu au prix fort.

Henri Proglio dénonce un mécanisme « absurde et toxique pour les consommateurs ». Il salue le modèle espagnol où l’État encadre davantage les prix et module la rémunération des producteurs pour amortir les pics de production renouvelable. Pour lui, une France souveraine dans sa gestion énergétique doit pouvoir fixer ses prix en fonction de ses coûts réels, pas des marchés étrangers.

L’ARENH dans le viseur : Henri Proglio veut rendre à EDF ses marges

Autre chantier jugé prioritaire : la refonte de l’ARENH, le mécanisme d’Accès Régulé à l’Électricité Nucléaire Historique. Créé en 2010, il oblige EDF à vendre une part de sa production nucléaire à ses concurrents à un prix plafonné — actuellement à 42 euros le mégawattheure. Henri Proglio fustige ce système qu’il qualifie de « spoliation légale » : « EDF produit de l’électricité à coût maîtrisé, mais doit la brader à des opérateurs qui n’investissent pas dans la production. »

Il plaide pour une réduction drastique des volumes disponibles à prix régulé, voire pour sa suppression. Selon lui, l’ARENH empêche EDF de bénéficier pleinement de ses investissements passés dans le nucléaire et freine sa capacité à investir dans le nouveau nucléaire de génération EPR.

Une électricité plus stable et plus abordable

Derrière ces propositions techniques, l’enjeu est clair : réduire la facture d’électricité pour les ménages et les petites entreprises. Selon Henri Proglio, un système recentré sur le nucléaire et protégé des marchés spéculatifs permettrait de stabiliser durablement les prix, de limiter les hausses brutales observées ces dernières années, et d’assurer une continuité d’approvisionnement sans recours systématique aux imports.

Un artisan boulanger, une TPE en zone rurale, une famille de quatre personnes : tous profiteraient d’un tarif plus stable, indexé sur les coûts réels d’un parc nucléaire déjà amorti. « C’est le rôle d’une grande entreprise publique comme EDF : fournir une électricité accessible, fiable, nationale », martèle-t-il.

Ce que propose Henri Proglio : un modèle à l’espagnole

Le système espagnol, évoqué par Henri Proglio, repose sur un marché électrique national dans lequel l’État intervient régulièrement pour contenir les hausses de prix et réguler les effets de la surproduction renouvelable. Contrairement au modèle français actuel — soumis au mécanisme marginaliste européen — l’Espagne applique des ajustements tarifaires internes pour lisser les chocs.

Henri Proglio souhaite imiter cette philosophie : il appelle à un marché national français, autonome, centré sur la planification publique, avec un prix régulé du mégawattheure nucléaire et une restriction des subventions aux renouvelables intermittents.

Un désaveu pour le gouvernement et sa stratégie verte

Henri Proglio adresse une critique sévère à la ligne énergétique actuelle. Pour lui, le gouvernement a cédé à « une vision idéologique des renouvelables imposée par Bruxelles ». Il regrette un abandon progressif du nucléaire, alors même que ce dernier est le plus décarboné et le plus stable des moyens de production.

Il déplore aussi une logique de marché qui désorganise le secteur. Le rejet le 24 juin 2025 de la proposition de loi Gremillet, qui visait à restreindre les énergies intermittentes, est selon lui un « symptôme de l’incohérence politique française ». Et il invite EDF à redevenir un outil stratégique de souveraineté énergétique.

Ade Costume Droit

Diplômée en géopolitique, Adélaïde a travaillé comme chargée d'études dans un think-tank avant de rejoindre Economie Matin en 2023.

No comment on «Un ancien PDG d’EDF veut arrêter les éoliennes»

Leave a comment

* Required fields