Le compte à rebours a commencé. Depuis le 31 janvier 2025, 162 communes françaises ont vu leur connexion Internet en ADSL brutalement interrompue, dans le cadre du démantèlement progressif du réseau cuivre. Avec pour but un arrêt complet d’ici 2030, au profit de la fibre optique. Le mouvement est piloté par Orange, sous la surveillance de l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (ARCEP).
Coupure de l’ADSL : ces communes doivent basculer vers la fibre sans attendre

Et ce n’est qu’un début. Dès le 27 janvier 2026, 829 autres communes seront concernées, soit près de 954 000 foyers. Le 31 janvier 2027, 2145 communes supplémentaires seront à leur tour privées de cuivre. La carte complète, régulièrement mise à jour, est disponible sur le site Ariase, permettant à chaque foyer de connaître la date fatidique. Dans les zones déjà impactées, il est impossible de souscrire une nouvelle offre ADSL. Les habitants doivent impérativement basculer vers la fibre pour conserver une connexion Internet. Un impératif technique devenu urgence numérique.
Connexion en zone rurale : tous fibrés… ou tous largués ?
La promesse semble simple, remplacer un vieux réseau vieillissant par une technologie plus performante. Mais la réalité est beaucoup plus épineuse. Si certains territoires bénéficient d’un déploiement fluide de la fibre optique, d’autres, plus enclavés, voient les retards s’accumuler. « Certaines municipalités manquent de moyens et se sentent littéralement abandonnées. Des élus vont jusqu’à faire du porte-à-porte pour alerter les administrés », souligne Jean-Yves Alric dans un article publié sur Presse-Citron.
Le rapport 2023 de l’Association de la médiation des communications électroniques (AMCE) confirme la tension. 42 % des litiges concernent désormais la fibre. Problèmes de raccordement, délais anormalement longs, absence d’opérateurs alternatifs… Le terrain est miné. Et que dire des zones où la fibre n’arrivera pas à temps ? Pour ces foyers oubliés, l’État propose une aide financière allant de 150 à 600 euros, via l’Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT), pour permettre l’installation de solutions alternatives (4G fixe, satellite, hertzien). Encore faut-il être informé… et réactif.
Fin de l'ADSL : que prévoit l’État pour préserver la connexion des communes ?
Le plan gouvernemental prévoit une fermeture progressive du réseau cuivre en sept vagues, jusqu’en 2030. Orange doit garantir, pour chaque commune, la disponibilité effective d’au moins un accès très haut débit filaire (souvent la fibre) avant toute coupure technique. Mais la Cour des comptes tire la sonnette d’alarme dans un rapport publié en mai 2024 : « L’information des usagers est souvent tardive et incomplète. La fracture numérique risque de s’amplifier dans certaines communes rurales. »
L’ARCEP rappelle qu’un calendrier précis doit être publié au moins trois ans avant la coupure effective. Encore faut-il que l’information soit comprise, relayée, et accompagnée sur le terrain. Car entre les documents administratifs, les délais techniques, les opérateurs absents et les promesses floues, le citoyen lambda, lui, voit surtout… sa connexion s’évanouir.
Dans l’Eure ou en vallée de Chevreuse, le laboratoire de la rupture numérique
Prenez l’Eure, 66 communes sont d’ores et déjà ciblées pour une coupure commerciale en 2026 et une extinction technique prévue avant 2030. Dans ces territoires pilotes, les collectivités anticipent, adaptent les infrastructures, organisent des réunions publiques, alertent les populations âgées. À Lévis-Saint-Nom, en vallée de Chevreuse, le test grandeur nature a mis en évidence les limites de la stratégie nationale.
Malgré un accompagnement renforcé, certains habitants sont restés plusieurs semaines sans connexion, faute de coordination entre les services. L’exemple est éloquent. Sans planification locale et communication claire, l’ambition technologique vire au cauchemar domestique. Et à l’heure où le télétravail, l’éducation en ligne et l’accès aux services publics numériques sont devenus vitaux, l’absence de connexion devient une réelle exclusion.