Le chiffre peut paraître encourageant. Pourtant, derrière la courbe qui descend, les alertes s’accumulent. Ralentissement, retards, inerties sectorielles : la dynamique climatique française inquiète car les émissions de CO2 font de la résistance.
Pollution : la France a émis beaucoup trop de CO2 en 2024 !
Le 16 juin 2025, le Citepa a publié une nouvelle série de données confirmant une baisse de 1,8 % des émissions de dioxyde de carbone (CO2) en France pour l’année 2024. Si cette annonce semble aller dans le bon sens, elle masque un essoufflement du rythme de réduction amorcé depuis plusieurs années. Un recul qui menace les engagements climatiques pris au niveau national et européen.
Climat : Un ralentissement net de la réduction des émissions de CO2 en France
En 2024, la France a émis 369 millions de tonnes équivalent CO₂, contre 376 millions en 2023, soit une baisse de 6,7 Mt CO₂eq. Mais cette diminution reste largement inférieure à celle observée un an plus tôt, lorsque la réduction atteignait 5,8 % sur douze mois. Le ralentissement est patent, et d’autant plus préoccupant qu’il intervient dans un contexte d’objectifs climatiques ambitieux.
Selon la Stratégie nationale bas-carbone (SNBC), la France s’est engagée à abaisser ses émissions à 270 Mt CO₂eq d’ici 2030. Pour y parvenir, il faudrait désormais une baisse annuelle d’environ 5 %, contre seulement 1,8 % en 2024. Un rythme jugé « bien trop lent » par de nombreux observateurs, soulignent Les Échos.
Pollution : Le poids écrasant des secteurs du transport et du bâtiment
Les chiffres révèlent de fortes disparités sectorielles. Tandis que l’industrie de l’énergie affiche une réduction significative de -3,8 Mt CO₂eq, les autres domaines ralentissent. Le secteur des transports, qui représente une part considérable des émissions nationales, ne baisse que de -1,5 Mt CO₂eq, et les bâtiments résidentiels stagnent avec une réduction marginale de -0,4 Mt CO₂eq selon Batiactu.
« Nous attendons du gouvernement un retour au sens des responsabilités, en particulier pour les secteurs qui ont pris du retard », déclare Anne Bringault, directrice des programmes au Réseau Action Climat, dans une déclaration à l’AFP. La suspension de l’aide publique MaPrimeRénov' durant l’été 2025 a contribué à cette perte de dynamique, en freinant les projets de rénovation énergétique dans le logement. Et même si le gouvernement a une nouvelle fois changé d’avis, notamment sur les monogestes, la situation est claire : la France ne va pas assez vite.
Réduction des émissions de CO2 en France : une trajectoire nationale déconnectée des objectifs européens
La loi européenne sur le climat impose aux États membres de réduire leurs émissions de 55 % d’ici 2030 par rapport aux niveaux de 1990. Or, à ce stade, la France ne parvient pas à enclencher un rythme compatible avec cette cible. Selon les experts, cela nécessiterait une réduction annuelle d’au moins 4 %, seuil qu’elle ne franchit plus depuis 2022.
Le président du Conseil national de l’air, Jean-Luc Fugit, l’admet : « On a mangé les gains les plus faciles. Désormais, il va falloir aller chercher les réductions dans des secteurs plus complexes à transformer », explique-t-il dans Les Échos. En clair : les gains techniques ne suffisent plus, seule une transformation structurelle des comportements, des usages et des infrastructures permettra d’inverser la tendance.
La fragilité des puits de carbone aggrave la situation
Le Citepa alerte également sur un phénomène souvent ignoré : la détérioration des puits de carbone naturels. Forêts, prairies et zones humides, censées compenser une partie des émissions, voient leur capacité d’absorption diminuer sous l’effet cumulé de la sécheresse, de la déforestation et du changement d’usage des sols. « Il faut tenir compte de la fragilité des puits de carbone », insiste le rapport. Ce recul invisible ajoute une pression supplémentaire sur les politiques de transition énergétique.
Les chiffres sont clairs. Si la France veut éviter un échec climatique, elle doit changer de braquet. Réduire les émissions est une urgence qui prend de plus en plus d’ampleur… et pour laquelle le temps manque. Pour rattraper son retard, elle devra multiplier les efforts dans les transports, réinventer sa politique du logement et reconstruire une stratégie industrielle compatible avec ses engagements écologiques. Car à ce rythme, l’objectif de 2030 pourrait bien rester hors d’atteinte — avec des conséquences majeures, tant économiques que climatiques.