Un engouement massif pour les produits locaux, un soutien affirmé, mais aussi des freins importants. Derrière la ferveur pour les produits locaux, les attentes françaises dessinent une vision bien précise de ce que doit être l’alimentation.
Alimentation : plus de 8 Français sur 10 achètent local !
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Published on 10 juin 2025 11h34
Le 5 juin 2025, l’Observatoire E.Leclerc des Nouvelles Consommations, en partenariat avec Ipsos, a publié une enquête qui ne laisse aucun doute : pour leur alimentation, les Français plébiscitent les produits locaux. Huit sur dix en consomment régulièrement, et une majorité déclare avoir augmenté ses achats ces douze derniers mois. Mais si le réflexe est fort, les raisons de ce choix, elles, ne sont pas toujours celles qu’on imagine.
8 Français sur 10 achètent local : une lame de fond pour l’alimentation
C’est une réalité chiffrée : 83 % des Français consomment régulièrement des produits locaux, dont 32 % très souvent. Et cette dynamique s’accélère : 61 % des personnes interrogées déclarent avoir augmenté leur consommation au cours de l’année écoulée. On ne parle plus ici d’une tendance marginale, mais d’un ancrage profond.
Ce retour à l'alimentation locale s’inscrit dans une volonté affirmée d’acheter responsable : 80 % privilégient les produits bons pour la santé, et 73 % disent acheter plus souvent local qu’il y a cinq ans. Une stabilité étonnante, d’autant que ces chiffres se rapprochent de ceux d’avant la pandémie.
Mais ce retour au terroir n’est pas alimenté par une quête écologique. Les raisons avancées révèlent un profil inattendu : 45 % citent la qualité comme première motivation, suivie par le soutien aux agriculteurs (41 %) et l’impact positif sur l’économie locale (28 %). L’écologie n’arrive qu’en quatrième position avec 27 %, loin derrière le goût (48 %) et la transparence recherchée sur l’origine des produits.
Le bio peine à convaincre : quand l’éthique ne suffit plus
Ce classement des priorités éclaire une forme de désamour pour le bio. Trop souvent perçu comme déconnecté des préoccupations quotidiennes, il ne parvient pas à s’imposer face au local. Pourtant, 85 % des Français estiment que les produits locaux sont respectueux de l’environnement.
Pourquoi, alors, le bio est-il laissé de côté ? Parce qu’il est perçu comme flou, cher et peu ancré dans le tissu agricole français. Le consommateur d’aujourd’hui veut du concret, du visible, du palpable. Il veut savoir qui produit son alimentation, où, et comment. C’est pour cela que 64 % achètent local avant tout pour soutenir les agriculteurs – un critère désormais plus décisif que les labels ou les normes nutritionnelles.
Le bio, lui, reste un produit segmenté, souvent éloigné des filières territoriales. Le local incarne une proximité que le label vert ne suffit pas à garantir.
Où s’achètent ces produits locaux, et pourquoi le rôle de la grande distribution est clé
Le marché reste roi : 73 % des acheteurs locaux s’y fournissent pour leur alimentation. Mais les grandes surfaces suivent de près (66 %), et même en tête pour les achats occasionnels (77 %). Contrairement aux idées reçues, les grandes enseignes ne freinent pas la consommation locale, elles l’organisent.
Et le public en redemande. 75 % des Français trouvent des produits locaux dans leur supermarché habituel (+5 points depuis 2019), 61 % sont satisfaits de l’offre actuelle, 89 % en reconnaissent la qualité, et 93 % estiment que leur magasin doit soutenir l’économie locale.
Mais cette confiance s’accompagne d’exigences : seuls 68 % jugent la valorisation de l'alimentation locale suffisante, et 71 % réclament davantage d’informations sur l’origine des produits. Une minorité de consommateurs considère que l’histoire du producteur est aussi importante que l’impact écologique (31 % contre 32 %). Le message est limpide : vendre local ne suffit pas. Il faut aussi raconter, expliquer, incarner.
Le prix, frein n°1 à un engouement durable
Malgré l’enthousiasme affiché, 78 % des consommateurs ayant réduit leur consommation locale pointent le prix comme principal frein. C’est le talon d’Achille de cette révolution alimentaire. Même les plus convaincus hésitent devant le ticket de caisse. D’un côté, ils veulent soutenir les producteurs, valoriser leur territoire, consommer mieux. De l’autre, leur pouvoir d’achat stagne, et les arbitrages se durcissent.
L’amour des Français pour les produits locaux est indéniable, massif, durable. Mais cet amour a ses conditions : prix juste, lisibilité, proximité. Sans ces garanties, le local risque de rester un luxe. À l’inverse, bien accompagné, il peut devenir le socle d’une alimentation plus responsable, plus humaine, plus enracinée.