Victimes collatérales d’un imbroglio judiciaire entre assureurs, des milliers d’automobilistes découvrent avec stupeur qu’ils sont en infraction sans le savoir.
Assurance : des dizaines de milliers d’automobilistes arnaqués

Le 5 mars 2025, une révélation secoue le marché français de l’assurance. Plus de 75 000 véhicules circulent sans couverture valide, exposant leurs propriétaires à des risques financiers et légaux majeurs. À l’origine du scandale : un litige opposant Pilliot Assurances et Accelerant Insurance Europe (AIE). Ce dernier conteste l’émission de contrats en son nom, plongeant des milliers d’usagers dans une incertitude totale. L’affaire, portée devant le tribunal de commerce de Boulogne-sur-Mer, met en lumière des failles dans ce secteur.
Une faille qui laisse 75 000 véhicules sans assurance
Derrière ce cauchemar administratif, une chaîne de responsabilités défaillantes. Tout commence le 31 octobre 2024, lorsque Pilliot Assurances signe un accord avec Accelerant Insurance Europe (AIE) pour la souscription de contrats d’assurance en France. Cet accord exclut explicitement la couverture automobile, en attendant un agrément du Bureau Central Français (BCF).
Malgré cette restriction, Pilliot Assurances aurait commencé à délivrer des attestations frauduleuses dès le 1er janvier 2025, sur la base d’un simple SMS envoyé par un intermédiaire, MSI Assurances. Ce dernier aurait prétendu que l’agrément du BCF était une formalité. Résultat : les clients, entreprises et collectivités, ont souscrit des contrats d’assurance qui, en réalité, étaient totalement invalides.
Les automobilistes pris au piège d’un vide juridique
Les victimes de cette escroquerie sont nombreuses. Parmi les 75 000 véhicules concernés, on retrouve des automobilistes particuliers convaincus d’être en règle, des poids lourds appartenant à des sociétés de transport, ainsi que des véhicules de collectivités, comme les bus de l’agglomération de Guéret, immobilisés faute de couverture valide.
Les conséquences pour ces propriétaires sont potentiellement dramatiques. En cas d’accident, aucune indemnisation n’est possible, ni pour eux ni pour les tiers impliqués. Ils s’exposent à des amendes pouvant atteindre 3 750 euros, à l’immobilisation de leur véhicule et à une suspension de permis. Selon l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR), les propriétaires concernés doivent souscrire immédiatement un nouveau contrat sous peine de sanctions sévères.
Un scandale judiciaire
Face à l’ampleur de l’affaire, les protagonistes se rejettent la responsabilité. Pilliot Assurances accuse Accelerant Insurance Europe et MSI Assurances d’avoir induit ses services en erreur. De son côté, Accelerant Insurance Europe nie toute implication et rappelle qu’il n’a jamais autorisé l’émission de polices d’assurance automobile.
Le tribunal de commerce de Boulogne-sur-Mer a tranché le 24 février 2025 en ordonnant à Pilliot Assurances de notifier à ses clients que leurs attestations ne sont pas valides. L’enquête judiciaire a mis en évidence une gestion du dossier qualifiée de légère par la justice, soulignant l’absence d’un avenant officiel validant l’extension du contrat au secteur automobile. Cette affaire met en lumière les failles du contrôle et interroge sur la régulation du secteur.
Quels recours pour les automobilistes lésés ?
Les conducteurs concernés doivent impérativement vérifier leur contrat d’assurance auprès de leur courtier, puis souscrire une nouvelle offre auprès d’un organisme agréé. Ils peuvent également engager des démarches judiciaires contre Pilliot Assurances afin d’obtenir un éventuel remboursement.
Certaines associations de consommateurs commencent à intervenir sur le dossier et appellent les pouvoirs publics à mettre en place un fonds d’indemnisation exceptionnel pour soutenir les automobilistes lésés. La question de la responsabilité des acteurs impliqués reste au cœur des débats, alors que des milliers de propriétaires de véhicules se retrouvent sans couverture.
Cette affaire révèle de graves lacunes dans la régulation du marché. Certains experts recommandent une certification renforcée des assureurs étrangers opérant en France, un contrôle plus strict des attestations délivrées par les courtiers, ainsi qu’une responsabilisation accrue des assureurs intermédiaires. En attendant, les automobilistes français, qui paient déjà des primes élevées, doivent redoubler de vigilance pour éviter de tomber dans des pièges administratifs.