Droits voisins : la presse contre LinkedIn

La Société des Droits Voisins de la Presse (DVP) a décidé d’attaquer LinkedIn en justice.

Ade Costume Droit
By Adélaïde Motte Published on 3 juillet 2025 14h30
Droits Voisins La Presse Contre Linkedin
Droits voisins : la presse contre LinkedIn - © Economie Matin

Le 3 juillet 2025 marque une nouvelle étape dans la bataille juridique que mène la Société des Droits Voisins de la Presse (DVP) contre LinkedIn. L’organisme, représentant plus de 380 éditeurs et agences de presse en France, a en effet assigné le réseau social professionnel devant les tribunaux. Cette action, qui pourrait avoir des répercussions significatives pour l’ensemble du secteur de la presse, s’inscrit dans le cadre de la mise en œuvre de la législation européenne sur les droits voisins.

La DVP contre LinkedIn : un bras de fer juridique

Depuis 2019, la directive européenne instaurant des droits voisins pour les éditeurs et agences de presse oblige les plateformes numériques à rémunérer les créateurs de contenus lorsqu’ils exploitent leurs œuvres en ligne. La DVP, qui gère collectivement les droits de ses membres, a déjà signé des accords avec des géants du numérique comme Google, Meta (Facebook) et Bing (propriété de Microsoft). Cependant, LinkedIn, bien que faisant partie de Microsoft, refuse jusqu’à présent de respecter cette législation, suscitant l'ire de la DVP.

Jean-Marie Cavada, réélu président de la DVP en juin 2025, n’a pas caché sa frustration face à cette situation. Selon lui, il est « incroyable qu’un acteur comme LinkedIn, qui profite des contenus de presse, refuse toute transparence sur l’utilisation de ces derniers ». Il insiste sur le fait qu’« à l’heure où la presse est plus en danger que jamais, il est urgent que les droits des éditeurs et des agences de presse soient respectés ».

Les droits voisins : qu'est-ce que cela implique pour la presse et les plateformes ?

Les droits voisins sont nés pour protéger le travail des éditeurs de presse face à la multiplication des plateformes numériques qui diffusent leurs contenus. Concrètement, cela signifie que les plateformes comme LinkedIn doivent rémunérer les producteurs de contenu lorsque leurs articles ou autres publications sont utilisés sur leurs sites, que ce soit sous forme de partage, de mention ou d'extraction de données. Ce droit permet ainsi aux médias de profiter de la diffusion de leur contenu garantie par les géants du numérique pour s'assurer des rentrées financières.

Cette législation pourrait se traduire par une offre de contenus encore plus diversifiée et de meilleure qualité. En effet, si les éditeurs sont rémunérés de manière plus équitable pour l’utilisation de leurs articles, cela pourrait renforcer la production de contenu de qualité. Toutefois, cette évolution pourrait aussi entraîner une augmentation des restrictions sur la disponibilité de certains contenus ou une hausse des abonnements.

La procédure en cours : la DVP face à un défi de taille

La DVP ne se contente pas de déclarations : l’assignation de LinkedIn marque un tournant dans un dossier où l’organisme a montré sa détermination. La procédure judiciaire pourrait ouvrir la voie à une nouvelle ère de négociations pour les éditeurs, dans l’espoir de rétablir une juste répartition des revenus générés par leurs œuvres. Mais la route s’annonce longue. En effet, malgré les actions similaires menées par des acteurs comme Le Figaro ou l’APIG, LinkedIn persiste dans son silence.

Jean-Marie Cavada rappelle que DVP représente désormais plus de 50% du marché des éditeurs de presse en France et que ses membres génèrent collectivement une partie substantielle des contenus consommés par les utilisateurs des plateformes numériques. Mais si l’organisme a déjà distribué plusieurs dizaines de millions d’euros à ses membres, le chemin reste semé d’embûches.

Un combat pour l’avenir de la presse

L’issue de cette procédure aura des conséquences bien au-delà de l’affrontement juridique entre DVP et LinkedIn. Ce combat met en lumière les défis actuels auxquels la presse fait face face à l'omniprésence des grandes plateformes numériques. La question des droits voisins, bien qu’en place depuis plusieurs années, semble encore largement ignorée par certains acteurs majeurs, comme le montre le cas de LinkedIn.

Si cette affaire des droits voisins est une nouvelle étape dans la bataille juridique, elle soulève également des questions fondamentales sur la rémunération équitable des créateurs de contenu et la responsabilité des plateformes dans l’écosystème numérique. Jean-Marie Cavada, dans ses dernières déclarations, avertit : « Si les conditions d’une négociation transparente et équitable ne sont pas réunies, DVP continuera d’emprunter toutes les voies à sa disposition pour défendre ses membres ». Un message clair, alors que la presse cherche à se redéfinir face aux défis du numérique.

En attendant, la procédure continue, et la DVP espère que d’autres acteurs du secteur prendront exemple sur les succès obtenus avec Google et Meta concernant les droits voisins, pour faire avancer les droits des éditeurs et des agences de presse.

Ade Costume Droit

Diplômée en géopolitique, Adélaïde a travaillé comme chargée d'études dans un think-tank avant de rejoindre Economie Matin en 2023.

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